« En tant que militant·e, on passe un temps fou à répéter, c’est épuisant. Pour durer dans le militantisme, tu dois prendre soin de ta santé mentale. C’est plus simple de dire à une personne avec qui l’ont discute : je vais t’envoyer des liens et puis on en parle. » Mais où trouver ces liens ? Sur Ba(f)fe, par exemple.
Il y a deux ans, Ondine Vermenot, une Marseillaise de 27 ans aujourd’hui expatriée au Portugal, a mis en ligne cette « base de données féministe ». Vidéos, articles, podcasts, analyses… le site recense 1 010 liens (majoritairement francophones) triés avec soin par la directrice artistique et programmeuse web. Ils renvoient vers des contenus qui éclairent des notions diverses, comme l’afroféminisme, le consentement, le racisme ordinaire, les LGBTQIAAP phobies ou encore le validisme. « Pour un militant ou une militante, le temps passé à expliquer ces notions est précieux », souligne Ondine Vermenot, interrogé par Numerama.
C’est en lisant le contenu de groupes féministes sur Facebook qu’elle a eu l’idée de créer cette base de données. « C’était une caverne qui s’ouvrait ! Il y avait tellement de ressources à lire et comprendre. Au début, j’ai répertorié tous les liens dans mes favoris. Puis je les ai classés par oppressions, j’ai refait les dossiers… pour m’apercevoir que ce sont souvent les mêmes sujets qui reviennent », nous explique Ondine Vermenot. À l’été 2017, elle met en ligne Ba(f)fe après « un mois de design, deux mois de code et trois autres pour entrer les liens » et avec 900 liens collectés au fur et à mesure de ses recherches.
« La claque de prendre conscience de ses privilèges »
Le site est un acronyme, reprenant les deux premières lettres des mots « BAse » et « FÉministe ». Avec le « f » entre parenthèse, Ondine Vermenot voulait filer la métaphore de la « claque de prise de conscience lorsqu’on entre dans le monde militant, mais aussi la claque de prendre conscience de ses privilèges », nous raconte-t-elle.
Grâce à ce site, la programmeuse espère aussi « rendre le savoir militant plus accessible » pour celles et ceux qui souhaitent des contenus vulgarisés. « On n’a pas toutes et tous les connaissances, le temps ou l’argent de lire des gros bouquin ou des thèses, poursuit Ondine Vermenot. Certaines personnes sont aussi plus sensibles à certains formats ou manières de parler. On peut préférer écouter des podcasts, par exemple. »
Sur Ba(f)fe, cependant, vous ne trouverez pas d’articles d’actualité. Ondine Vermenot privilégie les « analyses, les explications de concepts, qui donnent des clés de compréhension. Sur la Ligue du LOL, par exemple, c’était intéressant de lire tous les articles. Mais je n’en ai pas mis dans ma base car en soi, ces articles n’expliquent pas forcément les structures du harcèlement. » Elle préfère plutôt partager ces contenus via Facebook ou Twitter.
Devenir le Wikipédia de la sphère militante française
Ondine Vermenot, qui écrit également dans le magazine féministe Roseaux, se considère comme une « bébé militante ». « Ma manière à moi de contribuer, c’est de relayer la parole des autres », explique-t-elle. Elle définit d’ailleurs Ba(f)fe comme une porte d’entrée vers le militantisme. C’est aussi pourquoi elle tient à trier les liens qu’il est possible de lui envoyer depuis ce formulaire. « Ensuite, il faut être patient, car je dois lire tous ces articles, et je dois aussi lire ceux que je trouve de mon côté », continue Ondine Vermenot.
Depuis un an, Ondine Vermenot songe à plusieurs améliorations pour Ba(f)fe. La programmeuse souhaiterait modifier le système des tags, pour permettre d’en croiser deux lors d’une recherche. « Si on veut des chiffres sur le racisme, par exemple, on pourrait croiser les tags ‘statistiques’ et ‘racisme’. Je voudrais aussi faire une page par types d’oppression, en recensant le livre clé, le documentaire clé, la personne clé à lire sur ce sujet… Faire une sorte de Wikipédia de la sphère militante française. »
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