YouTube est régulièrement accusé de démonétiser et rendre moins visibles des vidéos sur la sexualité ou le corps, surtout lorsqu’elles concernent les femmes. La directrice de YouTube en Europe, en Afrique et au Moyen-Orient est revenue sur ce sujet dans un échange avec la vidéaste Marie Lopez (EnjoyPhoenix) ce 29 juin. Elle explique pourquoi la plateforme ne changera pas fondamentalement de position sur ce sujet.
Jusqu’à 90 % de vidéos démonétisées
Dans une vidéo intitulée « Les dessous de YouTube », Marie Lopez interroge celle qui dirige la plateforme dans plusieurs régions du monde, Cécile Frot-Coutaz. Entre deux questions sur l’écologie ou les conséquences de la directive européenne sur les droits d’auteur, elles évoquent la démonétisation des vidéos sur le corps ou la sexualité.
Comme le rappelle Marie Lopez, de nombreuses vidéos parlant de l’acte sexuel ou de connaissance de son corps ont été démonétisées, même s’il n’y a aucun caractère pornographique. Cela signifie que les vidéastes ne peuvent pas y mettre de publicités et ainsi gagner de l’argent. En mai 2018, Clemity Jane, une youtubeuse spécialisée dans les questions de sexualité, expliquait par exemple au Monde qu’environ 90 % de ses vidéos subissaient ce sort. Pour gagner de l’argent avec son activité, elle est obligée de trouver d’autres sources de revenus comme des partenariats ou le recours à Utip, une plateforme qui lui rapporte de l’argent lorsque ses abonnés regardent une publicité.
L’association Les Internettes, qui promeut la création féminine sur YouTube, avait lancé un hashtag à ce sujet, #MonCorpsSurYouTube. De nombreuses femmes y avaient témoigné de situations similaires.
Des règles publicitaires pas toujours claires
Cécile Frot-Coutaz explique que cela n’est pas prêt de changer sur YouTube. « Le modèle de YouTube est un modèle basé sur la publicité (…) et les marques ont un point de vue sur les vidéos avec lesquelles elles veulent être associées et celles avec lesquelles elles ne veulent pas être associées », éclaire-t-elle.
Elle indique que les marques peuvent choisir de ne pas être associées à des vidéos pourtant autorisées sur YouTube.
Dans ses règles publicitaires, YouTube est plus ou moins clair sur le sujet. Les vidéos présentant un « caractère sexuel très prononcé » (nudité, pornographie, etc) ne peuvent pas être monétisées. Les contenus « présentant des jouets ou des objets sexuels ou qui traitent explicitement de sexe » ne peuvent l’être que s’il s’agit de vidéos d’éducation sexuelle (ce qui ne s’applique pas toujours, comme dans le cas de Clemity Jane où il s’agit bien d’éducation). Enfin, les vidéos portant sur des sujets « sensibles » comme « les abus sexuels » sont d’office démonétisées « même si aucune image choquante n’est diffusée ».
Les politiques qui régissent YouTube sont décidées en fonction de ce que souhaitent les marques au niveau mondial. Si une marque française accepte de figurer sur des vidéos avec de la nudité mais qu’une marque américaine le refuse, YouTube décidera de ne pas mettre de publicités sur les vidéos de nudité, y compris en France, explique Cécile Frot-Coutaz. « Les politiques, il faut qu’elles fonctionnent pour toute la plateforme », dit-elle, avant de préciser que les équipes de la plateforme travaillent actuellement à introduire plus de « nuances » à ce niveau-là.
Pour le moment, il est difficile voire cher pour une marque de sélectionner seulement un certain type de vidéos (uniquement celles sur les menstruations pour une marque de tampons par exemple). Ceci est de la responsabilité de YouTube qui pourrait faciliter les procédés.
La plateforme assume son côté « conservateur »
Quoiqu’il en soit, l’important reste, indique la dirigeante de YouTube Europe, « que les marques aient confiance en la plateforme ». « Parfois on est effectivement un peu conservateurs, ajoute-t-elle, mais on est conservateurs pour essayer de préserver l’intégralité de l’écosystème. »
Pour elle, être moins conservateur, c’est apparaître comme « une plateforme à risque » et donc potentiellement perdre le soutien des annonceurs. À plusieurs reprises, ils ont menacé de quitter YouTube, notamment lorsque des journalistes et vidéastes ont trouvé des commentaires de prédateurs sexuels sous des vidéos de mineurs et mineures. Cela s’est toujours soldé par de nouvelles mesures, le site craignant de perdre sa principale source de revenus.
Cécile Frot-Coutaz a également fait savoir que contrairement à ce que beaucoup de vidéastes pensent, il n’y aurait aucun lien entre la démonétisation d’une vidéo et sa visibilité. Elle ne figurerait pas moins dans les recommandations ou tendances lorsqu’elle ne contient pas de publicités.
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