Des centaines de militants écologistes et Gilets jaunes ont bloqué des locaux d’Amazon ce 2 juillet en France. Ils demandent au géant de prendre des mesures globales pour protéger l’environnement.

Amazon annonçait ce 2 juillet la création de 1 800 emplois en France en 2019, s’attirant ainsi les félicitations du secrétaire d’État au numérique, Cédric O. Cette « excellente nouvelle » n’a pourtant pas ravi tout le monde. Quelques heures après l’annonce, des militants écologistes et membres du mouvement des Gilets jaunes bloquaient plusieurs sites du géant pour demander à ses dirigeants de prendre des mesures climatiques et sociales. « Amazon vend tout, même la planète », ont-ils scandé.

De nouveaux entrepôts au cœur de la discorde

Ils étaient près de 400 à bloquer Amazon ce mardi matin. Trois sites étaient visés : le siège d’Amazon, situé à Clichy et deux entrepôts situés près de Lille et de Lyon. Cette mobilisation a rassemblé des associations écologistes comme les Amis de la terre et ANV Cop21 mais aussi des membres du mouvement social des Gilets jaunes.

Jointe par Numerama, Alma Dufour, la porte-parole des Amis de la Terre, nous explique que l’objectif est de « bloquer l’activité de l’entreprise, de manière non-violente ». Pour elle, la création de trois nouveaux entrepôts de stockage équivaut à mettre sur pied « trois bombes climatiques » de plus.

« Cela signifie qu’ils vont encore faire croître leur activité, or Amazon a un rôle particulier sur le climat », explique-t-elle. Parce que le site de vente propose des produits bon marché et rapides (il existe des systèmes de livraison de courses dans la journée qui sont très peu coûteux en prenant un abonnement), il contribue pour les militants à favoriser la surconsommation, c’est-à-dire l’accumulation d’objets à outrance.

Surconsommation et transport en avion

La surconsommation est un risque pour l’environnement pour plusieurs raisons. Les industries qui produisent les objets de notre quotidien comme les vêtements sont particulièrement polluantes. Les emballages souvent en plastique et le transport des marchandises venues de l’étranger sont aussi mis en cause, comme l’expliquait un rapport de l’ADAME paru en 2018 sur l’impact écologique des produits de grande consommation.

À ce propos, Alma Dufour regrette d’ailleurs amèrement qu’Amazon fasse la promotion de ses avions de livraison, un mode de transport particulièrement polluant que la firme compte davantage développer. « On a dix ans pour transformer radicalement notre modèle économique selon l’Accord de Paris sur le climat, rappelle-t-elle. Selon nous, Amazon ne respecte pas cet accord. »

« On a dix ans pour transformer radicalement notre modèle économique »

Le gouvernement serait quant à lui auteur d’un « double-discours ». « Le modèle économique qu’ils nous proposent et qu’ils vantent n’est pas climato-compatible », indique la porte-parole qui rappelle les discours déçus de l’ancien ministre de l’écologie Nicolas Hulot sur le sujet. Pour elle, la création d’emplois n’est qu’une « fausse excuse » pour encenser Amazon. Depuis le début du mouvement, les Gilets jaunes auraient manifesté 17 fois devant des locaux d’Amazon en France. Ils regrettent que sous le vernis de ces créations d’emploi, se cachent aussi des destructions d’autres emplois et de l’évasion fiscale, nous dit-on. « Le gouvernement félicite Amazon mais on ne sait pas trop pourquoi », s’interroge Alma Dufour.

Des efforts jugés insuffisants

Le sujet des destructions d’emplois est délicat. Amazon crée effectivement de l’emploi au niveau local mais pour certains, son impact serait neutre voire négatif à long terme, notamment sur les petites entreprises. Des études témoignent de ce phénomène aux États-Unis. « De fait, il n’y a même pas de dilemme entre emploi et climat », note Alma Dufour.

Elle reconnaît qu’Amazon a fait quelques efforts récemment. Suite à un reportage diffusé sur Capital auquel son association a contribué, l’entreprise a par exemple annoncé qu’elle donnerait davantage à des associations ses produits invendus. Ils étaient jusqu’alors détruits pour la plupart, même lorsqu’ils étaient neufs : c’est une pratique légale — peut-être plus pour très longtemps –,mais elle est jugée « révoltante » par les écologistes.

Un entrepôt Amazon. // Source : Flickr/CC/Scott Lewis

Un entrepôt Amazon.

Source : Flickr/CC/Scott Lewis

Il ne s’agirait que de « petites mesures », alors que les militants demandent « une décision globale ». Leur action de blocage devrait durer « au moins pour la journée ». Ils espèrent que cela convaincra Amazon d’au moins « stopper l’hémorragie climatique ».

Rien ne semble gagné pour l’instant. Il y a seulement quelques semaines, des employés et employées d’Amazon ont manifesté aux États-Unis pour convaincre Amazon de mener un large plan d’action pour le climat. Les actionnaires avaient refusé cette idée.

Contacté, Amazon France a fait parvenir un communiqué à Numerama. « Nous respectons le droit de chacun d’exprimer ses opinions. Cependant, les déclarations faites aujourd’hui sont incorrectes », y-est-il écrit. Amazon assure ne pas faire d’évasion fiscale. L’entreprise indique être par ailleurs « très fière de [son] environnement de travail et de [ses] milliers d’employés » et invite qui le souhaiterait à venir visiter l’un des sites pour « se faire leur propre opinion ». Amazon assure aussi être engagé et investir dans le développement durable depuis des années, citant des initiatives comme l’expédition dans l’emballage d’origine (au lieu d’ajouter un autre carton inutile) et son réseau de parc éoliens et solaires. Concernant enfin les avions, la firme fait part de l’initiative Shipment Zero qui vise à réaliser 50 % des livraisons à vélo d’ici 2030.

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