Denis Olivennes ne doit rendre les conclusions de sa mission qu’à la fin du mois d’octobre, mais déjà semble se dessiner une convergence de vues et de propositions sur certaines grandes lignes de solutions proposées pour enrayer la progression du piratage sur Internet. Le gouvernement, les professionnels du cinéma et de la musique, et les fournisseurs d’accès à Internet, se dirigent en effet de concert vers une solution qui, a minima, devrait permettre un retour de la chasse aux P2Pistes en France.
L’Association des Fournisseurs d’Accès à Internet et des Editeurs de Services (AFA) rencontrait Denis Olivennes le 3 octobre pour présenter ses propositions. Chose inimaginable il y a encore quelques mois, elles sont proches de celles avancées par la SACD, le principal lobby de l’industrie cinématographique (voir notre article du….). Sans surprise toutefois, étant donnée les positions déjà exprimées par Neuf Cegetel.
Entre autres, l’AFA suggère la mise en place de leurres sur les réseaux P2P, qui effectueraient des requêtes en téléchargement et capteraient les adresses IP des internautes qui partagent le plus de contenus piratés, ou qui partagent des contenus particulièrement récents. Ces leurres ne seraient pas mis en place par les FAI eux-mêmes, mais par un organisme public tiers. Chacun s’accorde en effet à proposer l’installation d’un organisme chargé de mettre en place la lutte contre le piratage, de sorte que chaque acteur puisse individuellement se laver les mains de cette chasse aux P2Pistes bien impopulaire auprès des internautes. Reste qu’en pratique, un tel organisme aura bien du mal à voir le jour, du moins s’il doit respecter le principe républicain de l’égalité. Car par respect d’égalité, il ne peut surveiller uniquement certaines œuvres de certains des lobbys du droit d’auteur, mais l’ensemble des œuvres (au sens du code de la propriété intellectuelle) protégées par le droit d’auteur, de tous les auteurs. Or l’œuvre est protégée dès sa création. En pratique, tout sur Internet est une œuvre. Il faudrait surveiller et protéger non pas des milliers ou des centaines de milliers de contenus, mais des centaines de millions. Sauf, encore une fois, à briser le principe d’égalité et à se concentrer sur les seules œuvres des lobbys les plus puissants.
L’AFA, par ailleurs, a dit son accord avec la proposition de la SACD de remettre sur la table l’idée de la riposte graduée censurée par le Conseil constitutionnel au moment de l’examen de la loi DADVSI. L’organisme public aurait ainsi la possibilité d’envoyer des messages aux internautes pris en flagrant délit, et les sanctions pourraient aller jusqu’aux amendes pénales. Grâce à l’accord de principe sur le fond, un tel système pourrait non plus être imposé par la loi, mais mis en place volontairement par les FAI sur la base d’un accord contractuel, hors de portée du Conseil d’Etat ou du Conseil constitutionnel.
Free, qui est le seul FAI majeur à ne pas être membre de l’Association (et qui est en guerre contre l’industrie du disque), pourrait-il en profiter pour trouver là un avantage marketing sur ses concurrents ? Pas sûr, si l’on considère d’un côté que son adhésion à la Fédération Française des Télécoms témoigne d’une volonté de « rentrer dans le rang », et surtout que le gouvernement étudie la possibilité de demander à l’ARCEP de faire de la lutte contre le piratage une condition d’octroi des licences de télécommunications. De plus, Free a tout intérêt à se plier aux demandes des lobbys culturels s’il veut développer ses offres de contenus payants sur la Freebox…
Après des années de laisser-faire et de marketing orienté vers les P2Pistes, 2008 pourrait donc être l’année où les FAI retournent leur veste et s’accordent de concert pour brider les échanges illicites et favoriser le développement de leurs offres légales desquelles ils reçoivent des commissions. On se félicitera, cependant, que l’idée de filtrer les contenus soit pour le moment totalement rejetée par les FAI.
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