La Cour européenne des droits de l’Homme sera amenée à réfléchir sur la valeur d’un lien d’amitié sur Facebook et s’il est de nature à remettre en cause l’impartialité d’un juge s’il a dans ses amis Facebook une partie au procès.

Une amitié sur Facebook équivaut-elle à une véritable amitié ? La question semble de prime abord très anecdotique. Elle l’est moins lorsqu’il s’avère que cette connexion virtuelle concerne un juge et une partie à un procès. Dès lors, ce ne sont pas tout à fait les mêmes problématiques qui sont en jeu, puisque le juge pourrait être partial dans un dossier où il pourrait avoir des liens personnels.

En France, ce risque de défaut d’impartialité a déjà provoqué le commentaire de la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire français. En janvier 2017, la Cour de cassation a rappelé ce que beaucoup constatent déjà au quotidien : un ami sur Facebook n’est pas toujours un vrai ami. Sur les réseaux sociaux, le terme d’ami « ne renvoie pas à des relations d’amitié au sens traditionnel du terme », écrit l’instance.

Facebook a supprimé 1,5 milliards de comptes. // Source : Capture d'écran / Numerama

Facebook a supprimé 1,5 milliards de comptes.

Source : Capture d'écran / Numerama

L’amitié sur Facebook en discussions à la CEDH

Cette fois, c’est au niveau européen que la réflexion va avoir lieu. Lundi 16 septembre, le juriste de droit public Nicolas Hervieu a signalé sur Twitter l’existence d’une requête transmise auprès de la Cour européenne des droits de l’Homme dans laquelle une femme se demande si une amitié virtuelle, via un réseau social, entre un juge et une partie « peut constituer un motif de récusation.

Dans cette affaire, la bataille a pour origine l’attribution de l’autorité parentale et la fixation des relations personnelles avec un enfant.

Une mère, qui est requérante dans ce dossier, cherche depuis janvier 2017 à obtenir l’annulation de tous les actes liés à la procédure auxquels avait participé l’ancien président de l’Autorité de protection de l’enfant et de l’adulte de Monthey (APEA), parce qu’il a été constaté que cette personne est « ami sur Facebook » avec le père de l’enfant.

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La Cour européenne des droits de l’Homme. // Source : Barnyz

À travers cette affaire, deux questions peuvent se dégager. Dans le cas d’espèce, est-ce qu’il est démontré que l’ex-président de l’APEA est vraiment un proche du père de l’enfant, au-delà du site communautaire ? Et plus généralement, est-ce qu’une « amitié sur Facebook » entre un juge et une des parties est compatible avec la garantie d’un juge impartial ? Ou bien est-ce de nature à invalider toute décision ?

Jusqu’à présent, la justice suisse — puisque c’est de ce pays qu’est partie l’affaire — a plutôt tranché en faveur du statu quo : comme le résume la Cour européenne des droits de l’homme, par un jugement du 14 juillet 2017, le tribunal cantonal a rejeté la requête du 16 janvier 2017. De même, par un arrêt du 14 mai 2018, le tribunal fédéral a également rejeté le recours de la plaignante.

Fredrik Rubensson

L’affaire est apparue en Suisse. // Source : Fredrik Rubensson

Souci équivalent aux USA

Ces questionnements ne sont pas propres à l’Europe. Outre-Atlantique, il y a aussi eu des cas de figure de ce type. Dans le cas d’un juge chargé de prononcer un divorce, il avait été découvert qu’il voulait ajouter la divorcée dans sa liste d’amis. En appel, la justice avait alors annulé le jugement et souligné également que le concept d’ami sur Facebook est un terme générique qui revêt des réalités bien différentes.

« Une amitié sur Facebook ne signifie pas nécessairement l’existence d’une relation proche », écrivait-elle alors. La cour ajoutait que « l’apparence de partialité doit être évitée » et qu’il « est de la responsabilité des juges de placer des bornes dans leur comportement », afin, notamment, d’éviter de faire naître la « crainte bien-fondée de ne pas avoir un procès juste et équitable ».

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