Selon une étude de l’Association de Lutte contre la Piraterie Audiovisuelle (ALPA) – dont la qualité informative du site internet reflète probablement le niveau de compréhension de l’Association face aux nouvelles technologies, 40,5 % des films seraient piratés sur Internet l’année de leur sortie. Il y aurait donc plus d’un film sur deux qui ne serait jamais copié une seule fois sur Internet dans les douze mois suivant sa sortie sur les écrans ? Le chiffre, qui se veut pourtant alarmant, nous semble extrêmement faible. Connaissez-vous un seul film sorti dans les 12 derniers mois qui ne puisse être téléchargé avec eMule ou BitTorrent ?
Mieux, concernant les films français, seul 3 films français sur 10 (28,9 %) seraient disponibles sur les réseaux P2P. Sans doute le chiffre inclue-t-il le cinéma d’art et d’essai, qui bénéficierait pourtant à être piraté davantage tant il est sous-exposé dans les salles de cinéma. Car le piratage contre lequel l’ALPA veut lutter est aussi une forme de publicité, ou à tout le moins la possibilité pour les internautes d’aller vers des formes d’arts qu’ils auraient autrement ignoré. Pourquoi empêcher aux consommateurs la copie de films d’auteurs qui sont financés presque exclusivement grâce au fonds de soutien du CNC, lui-même alimenté par les mêmes consommateurs, qui payent des places de blockbusters dans les cinémas ? Il faudra un jour ouvrir le débat sur les conditions de la mise à disposition des œuvres financées sur fonds publics.
Sans surprise, ce sont les films américains qui sont le plus piratés, avec un « taux de piratage » à 68,9 %. Le cinéma français est moins touché alors qu’il génère 61,1 % des entrées en salle. Selon l’ALPA, 142 films ont été piratés en 2006, contre 206 films américains, et 79 d’autres nationalités.
Il s’agit pour l’essentiel de copies de DVD (55,8 %), puis de camcords (copies filmées en salle, 24,2 %). Les DVD promotionnels, envoyés à la presse ou aux jurys de festivals, sont à l’origine de 12,2 % des copies, tandis que le Téléciné (copie réalisée directement grâce à la pellicule du film) représente environ 5 % des copies.
La haute-définition (HD) représente déjà en 2006 1,9 % des fichiers de films proposés.
Quelle fiabilité pour les chiffres du piratage ? On le voit, les chiffres fournis par le CNC et par l’ALPA semblent totalement décalés par rapport aux impressions « de terrain » des fichiers réellement mis à disposition sur les réseaux P2P. Il est de toute façon difficile pour l’ALPA de confesser un niveau proche de 100 % de piratage si elle souhaite démontrer aux professionnels qui la finance un semblant d’efficacité. Comme nous l’avons déjà vu, il est toujours difficile de se fier aux chiffres fournis par ceux qu’ils arrangent. Voici ce que disait lui-même en 2004 Michel Gomez, le délégué général de l’ARP, pourtant chargé également de défendre les intérêts des auteurs et des réalisateurs de films contre le piratage : « Honnêtement, je doute beaucoup de la fiabilité de ces chiffres. Quand je les lis, j’ai l’impression d’entendre les « spécialistes » qui arrivent à chiffrer l’économie souterraine mais, par définition, c’est impossible. Ces chiffres sont irréalistes, personnellement je suis incapable de faire la moindre estimation. Par contre, je remarque que le chiffre d’affaires de l’industrie n’en souffre pas vraiment. La fréquentation en salle continue d’augmenter, les audiences télévision sont bonnes, et la vente de DVD augmente moins vite, certes, mais cela est principalement dû à la maturation du marché. Le cinéma se porte bien« |
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