Nous rapportions le mois dernier l’intention des députés UMP Alain Suguenot et Marc le Fur de déposer sur le bureau de l’Assemblée Nationale une proposition de loi d’amnistie en faveur des « petits téléchargeurs » qui piratent comme tant d’autres sur les réseaux P2P notamment. Le texte final est prêt, et nos confrères de PC INpact le révèlent ce soir (voir encadré ci-dessous). Dans les motifs, les deux députés exposent un historique des développements juridiques et judiciaires depuis la présentation du projet de loi DADVSI par le ministre Renaud Donnedieu de Vabres. Ils rappellent que le texte avait été présenté aux députés avec l’intention de mettre en place un régime de sanctions pénales amoindries, la « réponse graduée », pour les internautes téléchargeurs d’œuvres piratées. Les amendes devaient aller de 38 à 150 euros, avec des possibilités de multiplication d’ailleurs floues. Mais finalement, le Conseil constitutionnel a invalidé la disposition et replacé les P2Pistes dans le régime général des condamnations à 3 ans d’emprisonnement et 300.000 euros maximum. Il a jugé qu’il n’était conforme au principe d’égalité de faire une différence entre les modes de contrefaçons.

Ainsi, « vont continuer à s’appliquer des dispositions que le législateur a explicitement voulu réformer« , rappellent les députés Suguenot et le Fur. Le premier, pour mémoire, était aussi l’auteur d’une proposition de loi visant à instaurer la licence globale, rejetée en bloc par la majorité lors des débats sur la loi DADVSI. « Plusieurs millions d’internautes, notamment les jeunes, sont sous la menace de poursuites pénales pour des faits que la très grande majorité ne considère pas comme graves. Cela pourrait donner une mauvaise image de la justice, occupée à réprimer des faits jugés mineurs par la population, au détriment de la poursuite de faits bien plus graves« , écrivent les deux auteurs qui pointent par ailleurs l’absence totale d’harmonie dans les décisions judiciaires.

Leur proposition de loi, qui n’a aucune chance d’être adoptée, comporte un seul article, en deux points. Il vise d’abord à amnistier les contraventions dressées au titre de l’interdiction de contourner les mesures techniques de protection (DRM), ou de détenir ou distribuer un outil de contournement. Puis il amnistie les contrefaçons lorsqu’elles ont pour origine « des téléchargements d’œuvres protégées par le biais du réseau internet« . Ce dernier article a lui seul brise toute chance d’adoption, puisque c’est très exactement pour avoir fait une différence entre les modes de contrefaçon que la riposte graduée a été censurée par le Conseil constitutionnel. Par ailleurs, même si le premier article était adopté, ce serait sans conséquence aucune. A notre connaissance, aucune plainte n’a jamais été déposée suite à un contournement de DRM ou à la fourniture d’un outil de contournement. Le seul cas concerne des membres du collectif StopDRM, qui se sont eux-mêmes dénoncés auprès des services de police pour provoquer une jurisprudence favorable. L’affaire n’a pas été instruite par le parquet.

Notons enfin que l’amnistie concerne les actes de téléchargement ou de contournement de DRM réalisés avant le 1er novembre 2007. Les auteurs de la loi veulent passer l’éponge une dernière fois avant que les conclusions de la mission Olivennes ne remette à l’ouvrage la riposte graduée.

PROPOSITION DE LOI
Article unique

I. – Sont amnistiées les contraventions dressées en vertu des articles R. 335-3 et R. 335-4 du code de la propriété intellectuelle, lorsqu’elles ont été commises avant le 1er novembre 2007.

II. – Sont amnistiés les faits délictueux et les condamnations qui auraient été prononcées en application de l’article L. 335-4 du code de la propriété intellectuelle pour des téléchargements d’œuvres protégées par le biais du réseau internet, lorsqu’ils ont été commis avant le 1er novembre 2007.

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