Pointé du doigt, le Black Friday pourrait peut-être être de l’histoire ancienne en France. C’est en tout cas ce que souhaitent des députés, qui veulent en finir avec cette opération.

Tout comme il existe une honte de prendre l’avion qui s’empare de certains touristes, préoccupés par le dérèglement climatique, ressentira-t-on bientôt un malaise à l’égard des soldes et des campagnes commerciales, comme le Black Friday ? En tout cas, force est de constater que certaines opérations commencent à fédérer contre elles une opposition de plus en plus forte.

Dernier exemple en date, un amendement déposé par la députée non-inscrite Delphine Batho. Rattaché au projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, il vise à en finir avec cette « opération de méga-gaspillage [qui] profite d’un laxisme législatif », selon l’élue. Et justement, cet amendement a été adopté par la commission du développement durable.

Delphine Batho

Delphine Batho, en 2013.

Source : Mathieu Delmestre

Le Black Friday 2019 pas concerné

Est-ce à dire qu’il n’y aura pas de Black Friday cette année ? Non. Pour deux raisons : d’abord, il faut que cet amendement survive tout au long du processus législatif. Ce n’est que lorsque la loi sera promulguée et publiée au Journal officiel avec cette disposition que celle-ci prendra en effet. Ensuite, l’examen en séance du projet de loi ne commencera que le… 9 décembre, soit bien après le Black Friday.

Cela étant, la mesure pourrait figurer dans la loi. Dans le gouvernement, des voix se sont exprimées pour manifester leur hostilité envers le Black Friday. C’est le cas d’Élisabeth Borne, ministre de la Transition écologique et solidaire, et de Brune Poirson, secrétaire d’État. Les deux responsables politiques sont d’ailleurs derrière ce projet de loi — en revanche, Bruno Le Maire, en charge de l’économie, est plus tempéré.

Ce 25 novembre, Élisabeth Borne a déclaré sur le plateau de BFM TV que le Black Friday entraîne une « frénésie de consommation », avec des publicités et des remises qui incite le public à acheter des produits dont il n’a « pas forcément besoin ». La ministre a également mis en balance l’enjeu logistique et les conséquences en termes de pollution : en 2018, le Black Friday a conduit à livrer un million de colis dans Paris.

Rien ne va avec le Black Friday

Dans son exposé des motifs, Delphine Batho dresse un constat très sévère du Black Friday. Il s’agit d’une « opération à la gloire du consumérisme », venue de l’étranger, qui « utilise le flou encadrant les promotions pour contourner de façon manifeste la législation encadrant les soldes ». En outre, cet évènement présente un « bilan environnemental désastreux », en total décalage avec les efforts demandés.

En somme, rien ne va.

Et surtout, et c’est peut-être là le pire, le Black Friday ne serait même pas intéressant sur un plan commercial. « Cette opération repose sur une communication trompeuse », qui fait miroiter des remises exceptionnelles, écrit la parlementaire. Elle s’appuie sur une analyse des prix conduite par l’UFC-Que Choisir en 2019, qui montre que la moyenne réelle des réductions est inférieure à 2 %.

Bref, en plus de « contribuer au gaspillage des ressources », argue Delphine Batho, le Black Friday est tout simplement « une arnaque par une publicité trompeuse ». Juridiquement, le droit prévoit un emprisonnement de deux ans et amende de 300 000 euros pour des pratiques commerciales trompeuses. Un montant qui peut être porté à des seuils plus élevés dans certains cas, en marge de peines complémentaires.

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