Un mouvement social de grève se tient en France depuis le 5 décembre 2019 et au moins jusqu’à lundi. Cette protestation à l’encontre de la réforme des retraites touche les transports et d’autres secteurs. Dans une optique de convergence des luttes, le mouvement écologiste Extinction Rebellion (XR), revendiqué pacifiste, a rejoint la contestation pour « dire non à l’extinction de masse des acquis sociaux ». Le communiqué affirme que XR ne se bat pas seulement sur le sujet du climat.
Le mouvement a expliqué sur son compte Twitter avoir mis hors service, durant la matinée, 3 600 trottinettes électriques dans Paris, Lyon et Bordeaux. Ce geste a un but autant social qu’écologiste. Extinction Rebellion dénonce d’abord les trottinettes comme des « briseuses de grève », car elles permettent à la RATP de fournir d’autres moyens de transport, sur lesquels un mouvement social de grève ne peut pas avoir d’impact — puisqu’ils ne nécessitent pas de conducteurs autres que les usagers.
Les rebelles de XR évoquent ensuite, comme deuxième raison, les effets néfastes des trottinettes sur l’environnement. « En raison de leur production très énergivore, de leur faible durée de vie, ces véhicules ne représentent qu’un instrument de plus de greenwashing », dénonce le mouvement. Comme à son habitude, XR tient à mettre en avant des sources scientifiques à ses propos, cette fois-ci en proposant différents liens vers Wired ou vers Environemental Research Letters. Que disent ces sources ?
Les trottinettes, pas si vertes
Les articles cités mettent en avant la problématique croissante des batteries qui servent à alimenter ces moyens électriques de déplacement. En tout état de cause, c’est un fait, elles ne sont pas si « propres » et « vertes ». C’est leur constitution à base de lithium-ion qui est en est la raison principale. L’extraction de ce métal, en des quantités exponentielles, est un désastre incontestable pour l’environnement, la biodiversité et même pour les communautés humaines locales. En Bolivie, le plus grand désert de sel du monde s’en retrouve menacé. Le processus nécessite d’extraire des litres et des litres d’eau, ce qui mène à un stress hydrique croissant dans ces régions. En plus de cela, l’ONG Les Amis de la Terre avait enquêté sur l’utilisation de produits chimiques toxiques pendant le processus. La situation est d’autant plus problématique que le lithium de ce type de batteries est très peu recyclé.
Les militants d’Extinction Rebellion pointent également le coût écologique du transport puis du rechargement, chaque soir, des trottinettes électriques : « elles émettent en moyenne 202g de CO2 par passager et par km parcouru ». La source est une étude de l’université américaine de Caroline du Nord, publiée dans Environemental Research Letters. Les auteurs indiquent que le rechargement lui-même ne correspond qu’à 7 % de l’impact écologique des trottinettes électriques. En plus du lithium et de la production des appareils (50 %), l’autre coût important est à trouver dans le transport des appareils pour les recharger et les redistribuer dans les villes (43 %). Il faudrait selon eux songer à ne pas récolter ces appareils lorsqu’ils ne sont pas entièrement déchargés, par exemple, afin de réduire l’impact quotidien sur l’environnement.
Le bus est parfois plus écolo qu’une trottinette électrique
Relevons que les chercheurs restent nuancés : « Il y a beaucoup de facteurs à considérer, mais les trottinettes électriques restent écologiques par rapport à d’autres moyens de transport ». Par exemple, elles seront toujours meilleures que la voiture. En revanche, prendre un vélo, même électrique, sera toujours écolo qu’une trottinette électrique. De même que les transports en commun dans certaines situations : « prendre l’autobus sur une ligne très fréquentée est généralement plus respectueux de l’environnement qu’une trottinette électrique ». L’un des arguments souvent employés sur les pancartes est également que la trottinette ne remplace pas la voiture… mais la marche à pied, écologiquement préférable.
Les militants d’Extinction Rebellion s’appuient sur tous ces éléments ambivalents pour dénoncer les trottinettes électriques comme les « jouets des capitalistes verts », préférant militer en faveur de villes qui favoriseraient des transports « doux et réellement écologiques », pour des villes « moins rapides » aux « rapports humains apaisés ». S’ils appuient sur cet aspect humain et global, c’est parce que XR veut être un mouvement proposant un renouveau radical de la société.
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