Le contrôle renforcé de l’âge des internautes accédant aux sites pornographiques est en bonne voie pour devenir obligatoire en France. L’Assemblée nationale a approuvé cette disposition en janvier et le Sénat en juin. Mais ce qu’on ne sait pas encore, c’est la façon dont cette vérification s’opérera. La loi en passe d’être adoptée ne prend pas position sur ce sujet, laissant la question ouverte.
Une chose est sûre, l’identification via FranceConnect est officiellement écartée. Lors de la présentation, le 15 juin, du rapport du Conseil national du numérique sur les identités numériques, le secrétaire d’État au numérique a fait savoir que cette piste n’est pas retenue par le gouvernement, rapporte le journaliste Benjamin Hue, alors qu’elle circulait parmi d’autres hypothèses.
FranceConnect est un portail d’accès aux différents services publics, grâce à un système de connexion centralisé. En utilisant par exemple son identifiant et son mot de passe pour le site des impôts, on peut se connecter à son compte Ameli de l’assurance maladie ou bien sur le site ANTS dédié à la carte grise, le permis de conduire, le passeport ou la carte d’identité. Plus de 700 services sont couverts.
L’hypothèse de FranceConnect figure notamment dans un amendement d’une sénatrice, qui a été approuvé par ses collègues et le gouvernement. Plus exactement, il en fait mention dans l’exposé des motifs, l’amendement portant sur autre chose. La plateforme est présentée comme une « solution d’identification de l’âge ». En France, plus de 16 millions de personnes utilisent cet outil.
Quelles autres pistes ?
Trois autres approches possibles sont couramment évoquées pour appliquer un contrôle renforcé de l’âge des mineurs :
- un contrôle via la carte bancaire, avec éventuellement un micro-paiement symbolique, qui serait remboursé ;
- un passe porno à acheter dans le commerce, avec une vérification de l’âge au moment de passer à la caisse – dans un bureau de tabac par exemple ;
- un dispositif tiers d’authentification, français ou étranger. Google ou Facebook pourraient éventuellement servir à vérifier l’identité réelle, peut-être via les réseaux sociaux, mais cela ne collerait guère à la souveraineté numérique que Cédric O brandit désormais.
Une autre éventualité est de laisser l’industrie de la pornographie s’organiser pour fournir un système ad hoc. C’est justement ce que propose MindGeek, la maison-mère de sites comme Pornhub, RedTube et YouPorn, d’un certain nombre de sociétés de production, de Brazzers à Reality Kings, en passant par Digital Playground. Leur idée ? AgeID, qui joue le rôle d’une interface entre l’identité et le porno.
Sauf que là encore, cette piste inquiète : AgeID est-il suffisamment armé pour accueillir en sécurité des données personnelles permettant d’identifier une personne et de certifier son âge ? Quelle est la garantie d’anonymat pour éviter que l’on puisse rapprocher les goûts pornographiques d’un individu avec son compte AgeID ? En outre, rien ne dit qu’AgeID soit massivement adopté par tous les sites X.
Toutes ces pistes connaissent leurs limites et s’avèrent très difficiles à surmonter. Cela s’est vu avec le Royaume-Uni, qui a précédé la France sur ce dossier avant de renoncer en 2019, alors même que le chantier était engagé depuis plusieurs années. Or, Londres a bien exploré les mêmes options que Paris. Dès lors, on ne peut que s’interroger sur le destin de l’initiative française.
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