Ce sont des hommes en armes qui patrouillent aux États-Unis ou qui montent la garde, mais qui n’agissent ni pour le compte de l’armée américaine ni pour les forces de l’ordre. Ils ont pourtant tout un attirail militaire et disposent visiblement d’une forte puissance de feu. Vous les avez d’ailleurs peut-être aperçus à la télévision ou en photo dans des articles de presse, après la mort de George Floyd.
Il s’agit de représentants liés à « Boogaloo », une mouvance qui fédère des partisans de l’extrême droite et croit à la survenue d’une nouvelle guerre civile aux États-Unis — d’où un attrait très prononcé pour les armes à feu, de préférence à très gros calibre. Et si ces milices font aujourd’hui l’actualité, c’est parce que Facebook a annoncé le 30 juin leur exclusion sur sa plateforme.
Classé comme organisation dangereuse
L’entreprise américaine a en effet banni le mouvement Boogaloo, après l’avoir classé dans la catégorie des personnes et organisations dangereuses. « Ce réseau violent est interdit de présence sur notre plateforme et nous retirerons les contenus qui le louent, le soutiennent ou le représentent », déclare le site, parce qu’il « encourage activement la violence contre les civils, les forces de l’ordre, le gouvernement et les institutions ».
Le nom du mouvement serait inspiré d’un film de 1984, Breakin’ 2: Electric Boogaloo, qui fait lui-même référence à une danse de rue afro-américaine, le boogaloo, qui a ensuite engendré l’eletric boogaloo. Le mot est devenu un terme argotique sur le net et il a fini par être associé à l’idée d’une suite à la guerre de Sécession (« Civil War 2: Electric Boogaloo »), tout comme Breakin’ 2: Electric Boogaloo est la suite de Breakin’.
Dans le détail, Facebook déclare avoir supprimé 106 groupes sur le réseau social, mais aussi 220 comptes et 28 pages. Sur Instagram, filiale du site communautaire, ce sont 95 profils qui ont été fermés. Au passage, le site en a profité pour clore 400 autres groupes et 100 autres pages, parce que des contenus semblables étaient partagés — mais sans être liés à Boogaloo.
Selon Facebook, c’est en 2012 que la mouvance a commencé à germer, du moins sur son espace. L’expression était déjà utilisée à l’époque sur l’imageboard 4Chan, qui traîne une réputation sulfureuse depuis des années pour la violence et la haine qui s’y déploient, mais aussi pour le partage de toutes sortes de contenus extrêmes, et qui versent parfois dans le gore et la pédopornographie.
La mouvance était hors des radars médiatiques les premières années, mais elle a gagné une certaine visibilité en 2019. Les tentatives de confinement aux USA, l’émergence du mouvement Black Lives Matter après la mort de George Floyd, la défense du port d’arme ou bien l’intervention de l’État fédéral face à la crise sanitaire ont ensuite été autant d’occasions pour Boogaloo de se mobiliser.
Des incidents et une première tuerie
Le problème, c’est que les partisans de Boogaloo ne font pas que parader en treillis avec un gros armement à la ceinture : ils sont d’ores et déjà liés à des fusillades. Entre fin mai et début juin 2020, deux embuscades ont été perpétrées contre des agents de sécurité et des policiers en Californie, causant deux morts et trois blessés. Deux suspects ont été arrêtés, dont l’un s’avère être un sergent de l’Air Force.
Une autre tuerie de ce type aurait pu survenir plus tôt, dès avril 2020 : en effet, un autre membre de ce groupe informel promettait de s’en prendre aux forces de l’ordre. Il avait lancé une diffusion en direct sur Facebook pour filmer une attaque en direct. Il avait pu toutefois être appréhendé après une course poursuite. Des armes furent retrouvées dans le véhicule, ainsi que des munitions, un gilet pare-balles et, sur sa page Facebook, diverses références au mouvement Boogaloo.
D’autres incidents ont également été signalés au cours des derniers mois, notamment lors des manifestations contre le racisme systématique après la mort de George Floyd, qui a été étouffé par un policier blanc. Certains se comportaient en agitateurs, pour inciter aux émeutes, et étaient armés de cocktails Molotov et d’armes à feu. Des arrestations sont aussi survenues en lien avec ce groupuscule.
L’intervention de Facebook contre ces radicaux s’inscrit dans un contexte particulier aux États-Unis. Régulièrement accusés de ne pas en faire assez contre la haine en ligne, les géants du net semblent se réveiller. Plusieurs plateformes de premier plan comme Twitch, YouTube, Twitter, Snapchat ou encore Reddit ont fait fermer des espaces ou des comptes litigieux. Facebook, qui semble montrer moins d’allant, est toutefois sous la pression des marques, à travers l’appel Stop Hate For Profit.
L’implication dans la durée de l’entreprise américaine sera observée, car le coup de balai passé le 30 juin ne met en aucune façon fin au mouvement. Celui-ci devrait en outre tenter de revenir sous une nouvelle identité, avec l’espoir de passer sous le radar du site — qui leur a été très utile jusqu’à présent pour se structurer et échanger. Mais Facebook l’assure : il surveillera leurs activités et agira quand il le faudra.
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