Le malheur des uns fait le bonheur des autres. Huawei est en train de l’apprendre à ses dépens au Royaume-Uni : alors que l’équipementier chinois devait participer un peu à la mise en place du futur réseau 5G outre-Manche, il a découvert le 14 juillet que Londres ne veut plus de lui. Le pays fera appel à d’autres fournisseurs, notamment européens. Et, bien sûr, Nokia et Ericsson se sont empressés de signaler leur disponibilité.
« Nous avons la capacité et l’expertise nécessaires pour remplacer tous les matériels Huawei des réseaux britanniques à l’échelle et à la vitesse voulues, et nous sommes prêts à soutenir la mise en œuvre de la décision du gouvernement britannique avec un impact minimal sur les personnes qui utilisent les réseaux de nos clients », a déclaré Cormac Whelan, le patron de Nokia au Royaume-Uni.
Même son de cloche chez Ericsson : « Nous sommes prêts à travailler avec les opérateurs britanniques pour respecter leur calendrier, sans perturber les clients », a fait savoir Arun Bansal, le responsable en charge des zones Europe et Amérique latine au sein du groupe suédois. Nokia comme Ericsson sont déjà implantés au Royaume-Uni et l’un comme l’autre travaille déjà sur la 5G dans le pays.
Un remplacement sur plusieurs années
Le remplacement de Huawei ne se fera pas d’un claquement de doigt : si l’interdiction d’acheter de l’équipement Huawei est effective à partir du 1er janvier 2021, dans près de cinq mois (mais les effets devraient se faire ressentir dès maintenant, car les opérateurs n’ont plus trop intérêt à acquérir du matériel s’il faut l’enlever par la suite), le retrait des appareils déjà en place s’étalera sur sept ans et demi.
Londres laisse en effet aux opérateurs jusqu’au 31 décembre 2027 pour nettoyer la totalité de leur réseau de tout équipement 5G.
Officiellement, le pays a changé de fusil d’épaule en observant les effets des sanctions américaines sur Huawei en matière d’approvisionnement. Les services de renseignements britanniques considèrent qu’il n’est plus possible de garantir la fiabilité de la chaîne de production et, donc, la sécurité du matériel de Huawei. Dans ces conditions, il a été décidé d’écarter le groupe chinois.
D’autres considérations ont toutefois pu peser dans la balance : le risque d’espionnage de la Chine via Huawei d’abord, même si les opérations dans le cyberespace peuvent très bien passer aussi par des équipements tiers, comme ceux de Nokia ou Ericsson. L’économie entre les deux parties ensuite, qui n’est pas conforme aux attentes de Londres. Et le cas Hong Kong, enfin, qui mine leurs relations.
Des réactions contrastées après la décision de Londres
Forcément dépité, Huawei a jugé que cette reculade « est une mauvaise nouvelle pour quiconque a un smartphone au Royaume-Uni ». L’équipementier estime que le pays se place dans une situation pouvant le conduire sur la bande d’arrêt d’urgence de l’autoroute du numérique, de creuser la fracture numérique et d’alourdir la facture téléphonique de la population. Pour Huawei, cette décision est « politisée ».
À l’étranger, la décision de Londres a aussi été observée et commentée. Sur Twitter, Liu Xiaoming, ambassadeur de Chine au Royaume-Uni, l’a jugée « décevante et erronée ». Il estime qu’il n’est plus du tout certain que le pays « puisse offrir un environnement commercial ouvert, équitable et non discriminatoire aux entreprises d’autres pays ». Et déjà, des voix s’élèvent pour des représailles.
Outre-Manche par contre, ce sont des compliments qui sont venus jusqu’aux oreilles du Royaume-Uni. Commentant également la nouvelle sur Twitter, Mike Pompeo, le patron de la diplomatie américaine, a déclaré que cela « fait progresser la sécurité transatlantique à l’ère du 5G tout en protégeant la vie privée des citoyens, la sécurité nationale et les valeurs du monde libre ».
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