L’Élysée, la Maison Blanche, les ambassades, Russia Today, Sputnik, le Quotidien du Peuple ou encore China Daily. Toutes ces entités partagent deux points communs : d’abord, elles possèdent chacune un compte sur Twitter. Mais surtout, elles sont toutes désormais étiquetées d’un label sur le réseau social pour indiquer au public qu’il s’agit soit d’un compte gouvernemental, soit d’un média affilié à un État.
Ce nouveau marqueur est tout récent. Dans un billet de blog publié le 6 août, Twitter justifie cette évolution par le fait que « les gens ont le droit de savoir quand un compte médiatique est affilié directement ou indirectement à un acteur étatique ». Cette nouvelle politique inclut aussi les personnes, si elles occupent des fonctions officielles ou d’importance dans des rédactions.
On trouve par exemple des ministres des affaires étrangères, comme Jean-Yves Le Drian, mais aussi les porte-paroles, comme Gabriel Attal pour le gouvernement français, ainsi que des rédacteurs ou des rédactrices en chef, comme Margarita Simonian pour Russia Today, des journalistes de premier plan, des ambassadeurs, comme Liu Xiaoming, ambassadeur de Chine au Royaume-Uni, ou bien des diplomates.
Les chefs d’État ne sont en revanche pas encore signalés avec ce label — les comptes de Donald Trump, Emmanuel Macron ou Boris Johnson ne sont par exemple par marqués avec cette étiquette. D’autres ministres d’importance, comme Florence Parly pour la défense, ne sont pas non plus identifiés de cette façon. Chacun de ces labels est accompagné d’une icône spéciale, ainsi que d’un lien expliquant cette démarche.
Pour l’heure, le réseau social déploie cette fonctionnalité pour les autorités publiques et les médias des « cinq Grands » du conseil de sécurité des Nations unies, à savoir les États-Unis, la Chine, la Russie, la France et le Royaume-Uni. Toutefois, une différence de traitement peut s’observer au niveau de certains médias, selon qu’ils sont basés en Occident ou non.
Ainsi, des médias comme France 24, France Télévisions, la BBC ou NPR (National Public Radio) ou France Info ne présentent aucun label, contrairement à leurs homologues russes ou chinois. Comme justification, Twitter déclare que « les organismes médiatiques financés par l’État et dotés d’une indépendance éditoriale ne seront pas labellisés » — ce qui à coup sûr ne manquera pas de faire débat.
En termes de conséquences pratiques, les comptes qui reçoivent ce label ne pourront plus faire partie des recommandations de Twitter ni être amplifiés d’une façon ou d’une autre par les algorithmes de la plateforme. Ils seront toujours accessibles, mais leur visibilité sera réduite. En filigrane, il s’agit de limiter leur influence et leur ingérence, qui s’exercent à des fins politiques.
Twitter définit un média affilié à un État comme un média où le pouvoir politique exerce un contrôle sur le contenu éditorial par le biais de ressources financières, de pressions politiques directes ou indirectes, et / ou un contrôle sur la production et la distribution, et dont la couverture de l’actualité sert fréquemment comme levier pour faire avancer un agenda politique.
Le réseau social n’est pas le seul à utiliser un système d’étiquetage de comptes pour dire au public la nature de la page sur laquelle il se trouve. Sur YouTube, on trouve aussi des mentions de ce genre. Par exemple, France est signalée comme une chaîne du service public français. Un lien menant vers Wikipédia permet pour celles et ceux qui le veulent de lire la fiche correspondante.
Une élection américaine en novembre
Ce changement dans le design du site se déroule alors que se profile à l’horizon l’élection présidentielle américaine, qui verra s’opposer le Républicain Donald Trump au Démocrate Joe Biden. Or après le scrutin de 2016, des craintes très fortes existent aux USA sur des manœuvres de Moscou et d’autres puissances étrangères, comme la Chine, pour peser sur le scrutin, d’une façon ou d’une autre.
Washington ne veut surtout pas revivre la même séquence qu’il y a quatre ans. La Silicon Valley non plus, d’ailleurs, puisqu’elle a été accusée de n’avoir rien vu venir. Des géants du net comme Facebook, Google ou Twitter ont été critiqués pour n’avoir pas su détecter et contrer les opérations d’ingérence attribuées à la Russie, à travers l’achat de publicités, des comptes automatisés et des trolls.
Depuis lors, les plateformes prennent diverses mesures pour éviter l’influence étrangère, en avançant parfois en ordre dispersé : sur les publicités politiques par exemple, Twitter a choisi de s’en passer complètement, tandis que Facebook a préféré les garder, au nom de la liberté d’expression. Twitter a aussi fermé de nombreux comptes, et pris des mesures à l’encontre de RT et Sputnik, deux médias qui servent le soft power russe.
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