125 personnes sont mortes en 2020 sous les coups de leur conjoint, 102 femmes et 23 hommes. Les différents confinements de 2020, instaurés afin de lutter contre la pandémie de Covid-19, ont de plus conduit à une explosion du nombre d’actes violents : la mission interministérielle pour la protection des femmes victimes de violences (la MIPROF) fait état d’un « bond de 400 % » des appels reçus entre le 9 mars et le 20 avril 2020, lors du premier confinement. « Beaucoup de femmes ont découvert qu’elles étaient victimes de violences physiques, sexuelles et psychologiques pendant le confinement », explique Marie-Pierre Badré, la présidente du centre Hubertine Auclert, l’organisation francilienne pour l’égalité femmes-hommes.
Mais ce n’est pas parce que les divers confinements sont finis que les violences se sont arrêtées : en 2021, on dénombre d’ores et déjà 80 féminicides en France. La lutte contre ces violences doit rester une priorité : près de 220 000 femmes déclarent chaque année subir des violences au sein de leur couple, et seulement 18% des victimes portent plainte. Il reste nécessaire, aujourd’hui plus que jamais, d’agir contre les violences.
Si vous, ou une personne que vous connaissez, êtes victime de violences conjugales, voici les numéros à appeler et les ressources nécessaires pour vous mettre en sécurité.
Parler
En cas de violences, qu’elles soient psychologiques, sexuelles ou physiques, le premier réflexe à avoir est de prévenir de sa situation.
Les numéros de téléphone
Le numéro national 3919, gratuit et anonyme, est une ligne d’écoute gérée par la Fédération nationale Solidarité Femmes. La ligne est ouverte 24h sur 24, tous les jours.
Elle propose des services d’écoute et d’information, et pourra vous donner les adresses et numéros d’associations locales si vous avez besoin de partir de chez vous.
Ce n’est pas un numéro d’urgence : si vous êtes en danger immédiat, appelez les services de police au 17 ou au 112. Un service de messagerie instantané vous permet également de contacter les forces de l’ordre. Le chat est disponible sur Internet sur le site du service public, et vous met en relation avec un officier de police ou de gendarmerie. « À tout moment, l’historique de discussion pourra être effacé de votre ordinateur, téléphone portable ou tablette », est-il précisé sur le site.
Si vous ne pouvez pas passer un appel, vous pouvez contacter les services d’urgence en envoyant un SMS au 114. Le service, à la base destiné aux personnes sourdes ou malentendantes, est depuis le 31 mars ouvert aux victimes de violences conjugales et est disponible 24 h sur 24. L’envoi de SMS au 114 est gratuit. Vous serez mis ou mise en relation avec des opérateurs qui pourront envoyer les services de police. Vous pouvez retrouver le mode d’emploi du service ici.
Vous pouvez également appeler le 116 006, le numéro de la fédération France Victimes, qui pourra vous accompagner. Ce service est gratuit, et est ouvert toute la semaine, y compris le dimanche, de 9 h à 19 h.
L’application App’elles
L’application App’elles, téléchargeable gratuitement sur l’App Store d’Apple et sur le Play Store d’Android, propose énormément de ressources pour les victimes de violences conjugales. Vous pouvez renseigner dans l’application vos « contacts de confiance », que vous pourrez par la suite prévenir en cliquant sur un bouton d’alerte. Ce bouton vous permettra également de contacter les services d’urgence. L’application vous géolocalise, ce qui permet à vos contacts de venir directement vous retrouver, sans que vous ayez besoin de parler ou de leur écrire. Autre fonctionnalité : App’elles recense les lignes d’aide et d’écoute spécialisées, mais également les centres d’accueil dans votre région, dans toute la France.
Les alertes en pharmacie
Si vous ne pouvez pas appeler ou envoyer de SMS, vous pouvez alerter votre pharmacien. Le partenariat avec l’ordre des pharmaciens, instauré lors du premier confinement, est toujours en cours. Vous pouvez aller dans n’importe quelle pharmacie, et demander à ce que les services de police soient prévenus. Si jamais vous ne pouvez pas parler librement, le mot code « masque 19 » peut être utilisé afin d’alerter discrètement les pharmaciens, qui demanderont ensuite une intervention immédiate de la police ou de la gendarmerie.
Les centres commerciaux
En plus du partenariat avec l’ordre des pharmaciens, des points d’accompagnement ont été mis en place dans certains centres commerciaux ou supermarchés lors du premier confinement de mars. Cette initiative a été renouvelée, et les points d’accueil sont toujours en place dans les centres commerciaux partenaires. Ils sont gérés par des associations, qui y assurent des permanences.
Vous pouvez retrouver la liste des associations, leurs heures de présence et l’endroit où elles se situent dans le tableau ci-dessous.
Ville | Site | Jours et horaires de présence | Associations partenaires |
Monistrol sur Loire (43) | Intermarché | Vendredi de 9h à 15h15 en semaine paire, et de 13h à 18h en semaine impaire | CIDFF + Justice et partage |
Riorge (42) | Carrefour Market | Lundi de 10h à 15h | SOS VC 42 |
Unieux (42) | Carrefour Market | Mardi de 14h à 17h | SOS VC 42 |
Sorbieux (42) | Carrefour Market | Mercredi de 9h à 12h | SOS VC 42 |
Lorette (42) | Carrefour Market | Mercredi de 14h à 16h30 | SOS VC 42 |
Montbrison (42) | Carrefour Market | Jeudi de 14h à 18h | SOS VC 42 |
Sorbiers (42) | Carrefour Market | Vendredi de 9h à 12h | SOS VC 42 |
Veauche (42) | Carrefour Market | Vendredi de 13h30 à 16h30 | SOS VC 42 |
Ménétrol (63) | Centre Commercial Riom Sud | Sur Rdv les lundis, mercredis et jeudis de 9h à 12h30. Sans Rdv les lundis, mercredis et jeudis de 13h30 à 17h et les vendredis de 9h à 12h30 et de 13h30 à 17h |
CIDFF |
Lorient (56) | Carrefour K2 Keryado | Mardi, mercredi et jeudi de 14h à 18h | CIDFF |
Villeneuve d’Ascq (59) | Centre Commercial V2 | Du mardi au samedi de 10h à 19h | CIDFF |
Lieusaint (77) | Le Carré Sénart | Mercredi de 11h à 17h | Association LEA |
Sartrouville (78) | Centre Commercial Carrefour | Une fois par semaine | Alternative |
Epinay sur Seine (93) | Centre Commercial Aushopping l’Ilo-Epinay | Du lundi au vendredi de 10h à 17h | CIDFF |
Sevran (93) | Centre Commercial Beau Sevrean | Du lundi au vendredi de 10h à 17h | CIDFF |
Ivry sur Seine (94) | Centre Commercial Quai d’Ivry | Mardi de 12h à 17h | CIDFF |
Roques sur Garonne (31) | E. Leclerc | De 14h à 17h les 05 et 18 novembre, 04 et 21 décembre. |
France Victimes 31 + Gendarmerie |
Perpignan (66) | Auchan Porte d’Espagne | Lundi, mercredi, vendredi et samedi de 8h30 à 13h30 | Apex |
Puget sur Argens (83) | Carrefour Puget sur Argens | Du lundi au vendredi de 12h à 17h | AAVIV |
Partir
En cas de danger imminent, et si vous n’avez pas le temps de prévenir les lignes d’écoute, la première chose à faire et de vous mettre à l’abri. Il ne faut pas hésiter à se rendre à la gendarmerie ou au commissariat de police le plus proche, ou chez des proches.
Les associations à contacter
Si vous devez partir de chez vous, la ligne 3919 peut vous indiquer à quel endroit vous rendre pour être pris ou prise en charge et conseillée. Si vous avez besoin d’hébergement, vous pouvez également demander des précisions sur les centres d’accueil et les permanences des associations.
Si vous habitez en région parisienne, vous pouvez également consulter la carte disponible sur le site du centre Hubertine Auclert. Elle recense les organismes d’accueil, mais aussi les centres médicalisés, et les lieux de prise en charge des enfants exposés aux violences conjugales. De même, vous pourrez trouver la liste des lieux prodiguant des conseils sur l’IVG, ou sur les IST. Il est important de ne pas appeler directement le centre Hubertine Auclert, mais bien les associations recensées.
Cette carte n’est pour l’instant disponible sur pour la région Île-de-France, mais vous pourrez obtenir des informations similaires au 3919. Vous pouvez également retrouver ces informations et la cartes des associations et centres d’accueil sur l’application App’elles, dont nous parlons un peu plus haut dans cet article.
Les places d’hébergement
Partir du domicile signifie parfois ne pas avoir d’endroit où dormir, si vous ne pouvez pas vous rendre chez de la famille ou chez des proches. Il est cependant possible de demander à avoir une place dans des centres d’hébergement d’urgence. Les places sont gérées par les SIAO, le service intégré d’accueil et d’orientation, qui disposent d’une antenne dans chaque département. Ils sont joignables au 115, un numéro gratuit et ouvert 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Il existe également un annuaire des SIAO installés dans chaque département, que vous pouvez consulter ici.
Pour l’instant, 6 700 places d’hébergement d’urgence sont disponibles en France. D’ici la fin d’année 2021, 7 800 devraient être mises à la disposition du SIAO.
Porter plainte
Les premiers pas
« Il ne faut pas trop se poser de questions », explique Me Anouchka Assouline, avocate spécialisée dans la défense des victimes de violences conjugales. « Même si on a toujours une bonne raison de rester, ou si on a peur de perdre sa maison, il faut se dire qu’il y a de l’accompagnement. Il ne faut pas s’isoler, et avoir le réflexe de garder les SMS ou les mails d’insultes, et toutes les preuves ». Si vous ne voulez pas porter plainte tout de suite, il ne faut pas hésiter à déposer des mains courantes : « C’est un élément important, parce que ça montre que le problème n’est pas nouveau », ce qui permettra d’alimenter le dossier une fois la plainte déposée, explique Me Assouline.
Il faut se rendre dans un commissariat de police ou en gendarmerie afin de déposer une main courante. Dans certaines villes, vous pourrez également le faire en mairie. Vous pouvez retrouver tous les détails sur la procédure sur le site du service public.
Contacter un ou une avocate spécialisée
« Si on ne se sent pas tout de suite d’appeler un avocat, il est important de prendre contact avec des associations », explique Me Assouline. Mais dès que la décision est prise de faire une action en justice, il est très important de faire appel à un ou une avocate spécialisée. « La préparation psychologique des clients et l’écoute sont très importantes », justifie Me Assouline, et « pour obtenir une ordonnance de protection, il faut savoir le faire au bon endroit et au bon moment ».
Malheureusement, il n’existe pas encore de liste consultable par le grand public sur Internet recensant les avocats et avocates spécialisées dans les droits des victimes de violences conjugales. « Certaines listes sont affichées dans les tribunaux, mais cela implique de se déplacer », regrette Me Assouline. Si vous pouvez vous déplacer, une permanence est organisée tous les lundis au tribunal judiciaire de Bobigny, en région parisienne, de 9 h 30 à 12 h.
Porter plainte
Si vous êtes décidé ou décidée à porter plainte, vous pouvez le faire de plusieurs façons.
Vous pouvez vous déplacer dans le commissariat ou la gendarmerie de votre choix pour porter plainte, vous n’êtes pas obligée d’aller dans celui le plus proche de votre domicile. Les officiers et agents de police sont obligés de prendre une plainte, comme spécifié sur le site du Service public, et ce même « si les faits ne relèvent pas de leur zone géographique de compétence ». S’ils refusent malgré tout d’enregistrer votre plainte, vous pouvez saisir en ligne l’IGPN et la direction de la gendarmerie pour des « faits contraires à la déontologie ».
Si vous déposez plainte en vous rendant dans un commissariat ou dans une gendarmerie, « il faut demander une réquisition pour aller voir un médecin des unités médico-judiciaires », insiste Me Assouline. Le médecin pourra ainsi examiner vos blessures, qui pourront être prises en compte lors de l’enquête et du procès. C’est une visite gratuite. Si vous ne voulez pas, vous pouvez également demander à votre médecin traitant de vous examiner et de consigner les hématomes ou blessures.
Vous pouvez également porter plainte sans avoir à vous déplacer. Vous pouvez le faire par courrier, directement adressé au procureur. La procédure est expliquée sur le site du Service public, et vous y trouverez également un modèle de la lettre à envoyer.
Se protéger
Les ordonnances de protection
Afin de vous assurer que votre agresseur ne pourra pas rentrer en contact avec vous, vous pouvez demander auprès d’un tribunal une ordonnance de protection.
« Une ordonnance de protection peut interdire à l’auteur des violences de vous contacter ou de s’approcher de vous, à votre domicile, sur votre lieu de travail ou ailleurs », explique le site du ministère de l’Intérieur.
Il faut effectuer la demande d’ordonnance auprès d’un juge aux affaires familiales, que vous ayez d’ores et déjà déposé plainte ou non. « Les ordonnances d’éloignement ou les autres dispositifs de protection des victimes pourront rapidement être appliqués », annonce Me Assouline. Les dossiers de violences conjugales doivent être traités rapidement, sous 6 jours maximum, après l’audience avec le juge. La procédure pour demander une ordonnance de protection est détaillée sur le site du Service public.
Le téléphone grand danger
Dans les cas de violences conjugales les plus graves, vous pouvez également demander un téléphone grand danger. Ce sont des téléphones qui vous permettront de rentrer immédiatement en contact avec une plateforme spécialisée et de prévenir les forces de l’ordre. Vous pouvez faire la demande d’un tel téléphone auprès du parquet ou bien auprès de policiers ou de gendarmes. Vous pouvez trouver plus de détails sur le site du Service Public. 129 téléphones ont été distribués pendant le précédent confinement.
Le bracelet anti-rapprochement
Les bracelets anti-rapprochement (aussi appelés BAR) sont une nouveauté. Pour l’instant sur 1000 bracelets disponibles, 245 ont été mis en service.
Les bracelets anti-rapprochement sont installés sur les chevilles des auteurs des violences, et permettront de les géolocaliser en temps réel, 24 h sur 24, 7 jours sur 7. Le port de ces BAR ne peut être décidé que par un juge, et seulement si l’auteur des violence donne son accord. C’est également le juge qui fixera la distance d’alerte que l’auteur des violences devra respecter.
Au cas où un porteur franchirait la distance de préalerte, il sera contacté par ce service de télésurveillance qui lui intimera de faire demi-tour. Si ça n’est pas fait et que la distance d’alerte est franchie, ou bien que le porteur ne répond pas aux appels du service de télésurveillance, les forces de l’ordre seront prévenues. Les opérateurs leur transmettront alors la géolocalisation du porteur, afin qu’il soit appréhendé. Ils contacteront également le ou la victime des violences, également équipée d’un boîtier géolocalisé, et l’aideront à se mettre à l’abri en attendant l’intervention des forces de l’ordre.
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