Le 20 janvier 2021, date à laquelle la passation de pouvoirs entre Donald Trump et Joe Biden est censée avoir lieu, la présence numérique du président républicain sortant risque d’être quelque peu malmenée. D’abord par Twitter, dont la modération devrait être bien plus rude, avec possiblement la suppression de tweets trop outranciers — ce qu’il ne fait pas aujourd’hui, compte tenu du statut du chef de l’État.
Il s’avère que Facebook aussi devrait changer d’attitude à l’égard de Donald Trump à partir de l’entrée en fonction officielle de Joe Biden — mais peut-être pas de façon aussi brusque que Twitter. Sollicité par Business Insider le 18 novembre, un porte-parole du réseau social a expliqué que le départ du président républicain de la Maison Blanche autorisera le site à « fact checker » ses publications, via des médias partenaires.
Une exemption pour les personnalités et discours politiques
Dans ses règles, Facebook explique en effet que « les anciens candidats à une élection ou les anciens élus sont toujours soumis à notre programme de vérification des informations par des tiers ». Ce travail est réalisé par des médias de vérification. On en recense 83, dont 7 pour la France (AFP, 20 Minutes, France 24, Le Monde, Science Feedback, Libération et France Info).
Cependant, les mêmes règles de Facebook ajoutent que « les opinions et les discours des personnalités politiques ne sont pas éligibles à la vérification des informations ». Or après le 20 janvier 2021, rien ne dit que Donald Trump va arrêter de faire de la politique, même s’il n’aura plus de mandat. Il est susceptible d’être toujours un ténor du parti Républicain et de vouloir se présenter pour l’élection de 2024.
Selon Facebook, la notion de « personnalité politique » inclut les candidats à une élection, les élus actuels et, par extension, la plupart des personnes nommées au sein de leur cabinet, ainsi que les partis politiques et leurs dirigeants. Dès lors, il n’est pas absurde de penser que le fact checking de Donald Trump pourrait être contrarié ou empêché selon le rôle politique qu’il aura dans quelques semaines.
Facebook s’oppose au fact checking des informations issues des personnalités politiques, au motif que son programme « n’est pas destiné à interférer avec l’expression ou le débat individuel ». Il faut permettre aux politiques la possibilité de transmettre au public leur défense d’idées ou leurs conclusions « qui reposent sur [leur] interprétation de faits ou de données ». En somme, à exprimer une opinion.
Le site estime « que les discours politiques sont ceux qui sont le plus analysés » et qu’il serait donc inutile d’en remettre une couche. Il ajoute qu’il n’est pas non plus partisan de limiter l’accès du public aux propos politiques, car « il serait ainsi moins au courant des propos de ses élus ». Pourtant, l’un n’empêche pas l’autre : Facebook pourrait permettre les labels de fact checking sans limiter les pages.
Comment Facebook pourrait agir contre Donald Trump ?
Dans ces conditions, Facebook pourrait se retrouver à devoir résoudre la quadrature du cercle. Mais à supposer qu’il finisse par trouver une ligne de crête pour la modération de Donald Trump, comment cela se passerait-il ? Si par exemple une publication est accusée de désinformation par les médias vérificateurs, et que la procédure appropriée a eu lieu, plusieurs options s’offrent à Facebook.
- Il limite la visibilité de la publication, en l’affichant plus loin dans le fil d’actualité, ce qui réduit sa diffusion, sans la couper totalement ;
- Il appose une étiquette d’avertissement sur le contenu pour avertir les internautes et accompagne ce nouveau label de liens vers des articles vérifiant les faits ;
- Il prévient l’internaute voulant partager le contenu litigieux avec un encart de mise en garde sur ce qu’il vient de lire, afin de l’inciter à se demander si c’est bien judicieux de l’envoyer à d’autres ;
- Il peut aussi prévenir a posteriori les internautes ayant partagé un contenu avant qu’il ait été signalé par les médias partenaires ;
Il existe aussi une disposition spéciale pour les récidivistes, que Donald Trump devrait sans peine déclencher au regard du nombre d’interventions que Twitter est obligé de faire à chaque fois qu’il parle de l’élection présidentielle du 4 novembre. Dans ce cas de figure, un récidiviste voit sa diffusion réduite davantage et son droit de faire de la publicité ou de monétiser des contenus suspendu provisoirement.
Et qu’en est-il de la suppression des publications, alors ? Facebook déclare que les infractions à ses standards de la communauté peuvent aboutir à cette situation, notamment quand sont constatés les plus graves écarts : désinformations ou rumeurs pouvant entraîner de la violence ou des dommages imminents, vidéos manipulées à des fins politiques (deepfakes), fraudes ou ingérences électorales.
La destruction pure et simple du profil ou de la page de Donald Trump sur Facebook est a priori hors de propos. Elle serait sans doute exagérée et peut-être contre-productive : aussi outrancier que le président américain sortant peut-être, il a quand même écrit une page de l’histoire des États-Unis. Une page controversée, difficile, contestée. Mais une page qu’il ne faudrait pas effacer, pour des raisons historiques.
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