Le calendrier est fixé : la proposition de loi sur la sécurité globale fera son retour au Parlement au mois de mars. L’agenda du Sénat signale que le texte, très controversé, mais soutenu par le gouvernement ainsi que par la majorité présidentielle, passera le 3 mars devant la commission des lois de la chambre haute, puis les 16, 17 et 18 mars en hémicycle.
Adoptée fin novembre par l’Assemblée nationale, la proposition de loi pourrait connaître un autre destin au Sénat, dans la mesure où la droite, qui est majoritaire, a laissé entendre son intention de réécrire certaines dispositions les plus polémiques, en particulier l’article 24, qui porte sur l’enregistrement et la diffusion de forces de l’ordre pouvant être identifiées, dans le cadre de leurs missions.
L’article 24 entend punir d’un an de prison et de 45 000 euros d’amende toute personne diffusant ces enregistrements à des fins malveillantes, notamment sur les réseaux sociaux, s’il est établi qu’ils portent atteinte à l’intégrité physique ou psychique d’un policier ou d’un gendarme. Or, de nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer cet article, qui pourrait affecter la liberté de la presse et laisser place à l’arbitraire.
Tout au long de l’année passée, plusieurs interventions ont fait remarquer que l’article 24 ne servait même à rien, puisque la loi est déjà outillée pour réprimer ces comportements. C’est ce qu’a notamment dit la Défenseure des droits, à deux reprises (la première fois, la seconde). La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) n’a pas dit autre chose en début d’année.
Si la disposition la plus critiquée reste l’article 24, d’autres portions du texte concentrent aussi de vives critiques. C’est le cas notamment de toute la partie sur les drones. Celle-ci vise à donner un cadre légal à l’utilisation d’aéronefs sans pilote, équipés de caméras, à des fins de surveillance. Dans les faits, la police s’en sert déjà, mais hors de toute légalité, ce qu’ont relevé le Conseil d’État et la CNIL.
Et ensuite ?
Le gouvernement a engagé la procédure accélérée sur ce texte, ce qui veut dire qu’il n’y aura qu’un seul passage de la proposition de loi devant chaque chambre. Si le Sénat vote un texte différent par rapport à l’Assemblée nationale, une commission mixte paritaire (composée de sept sénateurs et sept députés) devra tenter de gommer les disparités pour qu’il n’y ait plus qu’un seul texte législatif.
En cas d’échec d’un accord, c’est l’Assemblée nationale qui aura le dernier mot.
Le président de la République aura alors un délai de quinze jours pour promulguer la loi. Elle sera ensuite publiée au Journal officiel, entrant en vigueur le lendemain, sauf pour les mesures éventuelles qui dépendent de décrets d’application qui doivent encore être pris pour préciser les modalités de mise en œuvre de certains articles. Cependant, une autre étape est prévue : celle du Conseil constitutionnel.
En effet, le Premier ministre Jean Castex a fait savoir l’an dernier qu’il comptait saisir cette instance pour lui demander de vérifier la conformité de cette loi à la Constitution. Il n’est pas garanti que cela se passe bien : l’examen par les Sages de la rue de Montpensier peut se terminer par une censure partielle ou totale du texte, si des dispositions sont jugées contraires à la Constitution.
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