L’actualité de l’application TousAntiCovid rebondit, mais cette fois en justice. Le lundi 22 mars, l’association Anticor a annoncé avoir saisi la Cour de justice de la République pour lui signaler une possible infraction pénale dans les conditions d’attribution des contrats pour concevoir ce programme de traçage des contacts. Anticor fait en effet le constat d’une absence d’appel d’offres.
Or, développe l’association se consacrant à la lutte contre la corruption dans son communiqué, cette procédure est requise lorsque la commande publique dépasse un certain montant. Elle constate que cette étape n’a pas été respectée, alors même que les sommes en jeu vont « va bien au-delà des seuils réglementaires permettant une dispense de procédure d’appel d’offres ».
En juin 2020, le coût d’exploitation de StopCovid (qui n’était pas encore renommé en TousAntiCovid) était évalué entre 200 000 et 300 000 euros par mois. L’hébergement du serveur de l’application est assuré par Outscale, une filiale de Dassault Systèmes. À la fin du même mois, Cédric O, secrétaire d’État en charge du numérique, détaillait les postes de dépense au cours d’une conférence de presse :
- 40 000 euros mensuels pour l’hébergement informatique ;
- 40 000 à 80 000 euros par mois pour la maintenance et le développement de l’application ;
- 50 000 euros par mois d’appui au support utilisateur ;
- 30 000 euros par mois pour les frais de déploiement.
À l’époque, Cédric O avait considéré que ces dépenses n’étaient pas si élevées compte tenu de la pandémie, du coût que la crise fait peser sur l’hôpital et de l’échelle à laquelle doit évoluer l’application, au niveau de tout un pays.« Ce montant est epsilonesque par rapport aux coûts et aux effets délétères évités d’une admission en réanimation par exemple », avait-il fait remarquer.
Dans une FAQ, le gouvernement suggère que le choix d’Outscale a été fait par défaut, car « c’est à ce jour le seul prestataire d’hébergement qualifié SecNumCloud par l’ANSSI. Ils sont également hébergeur de données de santé sur leur périmètre ». Cette double certification n’étant pas courante, du moins à l’époque où le projet TousAntiCovid a été démarré, un appel d’offres ici n’aurait pas eu de sens.
Anticor porte plainte pour favoritisme
Mais, poursuit Anticor, le coût de StopCovid rendu public fin novembre a montré que cette application « a coûté bien plus cher à l’État », avec l’arrivée de nouveaux frais, en plus des dépenses d’exploitation, déjà décrites comme « supérieures aux pratiques du secteur ». Or, à partir d’un certain seuil, l’absence d’appel d’offres peut « constituer l’infraction pénale de favoritisme ». L’association a d’ailleurs porté plainte.
Les dépenses additionnelles évoquées par Anticor sont les suivantes :
- 69 676 euros par an pour les licences ;
- 720 000 euros par an pour le support utilisateur ;
- 432 000 euros par an pour l’hébergement ;
- 2 793 000 euros par an pour la communication.
« Chacun des postes de dépenses, qu’il s’agisse de la communication ou de l’exploitation de l’application, aurait dû faire l’objet d’un appel d’offres ou d’une procédure de mise en concurrence au regard de leurs montants », développe l’association. Elle fait remarquer au passage que les règles de la commande publique fixent à 139 000 euros (hors taxe) le seuil à partir duquel l’appel d’offres doit être déclenché.
L’association ne discute pas le bien-fondé de créer une application mobile devant appuyer la lutte contre la crise sanitaire due au coronavirus. Mais elle estime néanmoins que cela n’autorise pas de s’affranchir des règles en vigueur, et cela même si la situation revêtait un caractère inédit et d’urgence. L’association avait d’ailleurs déjà saisi en juin 2020 le parquet national financier, pour une possible atteinte aux finances publiques
« Pour des marchés publics portant sur des montants aussi importants, la mise en concurrence était obligatoire pour garantir la transparence, d’une part dans l’attribution des marchés et d’autre part dans l’usage de l’argent public », justifie Anticor. « Les manquements aux règles relatives à la commande publique ont un impact sur la vie démocratique, mais également sur les comptes publics ».
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