Le vote par Internet ne fera pas ses débuts avec l’élection présidentielle et les législatives en 2022. Cependant, le ministère de l’Intérieur explore son emploi pour de futurs scrutins.

2022 ne sera pas l’année de l’arrivée du vote électronique pour les élections politiques en France. Mais pour les échéances suivantes, la porte est ouverte. C’est en somme le propos qu’a tenu Gérald Darmanin au micro de Jean-Jacques Bourdin, le 29 septembre 2021 sur BFM TV. Il s’agirait, a expliqué le ministre de l’Intérieur, de traduire une promesse de campagne d’Emmanuel Macron, lors de la campagne de 2017.

« Le président de la République, dans son programme, a dit qu’il était favorable au vote à distance. Donc je travaille sous son autorité à mettre en place le vote à distance », a relevé le locataire de la place Beauvau. Mais l’intéressé a fait comprendre que lui-même est défavorable à ce type de possibilité, car il y aura toujours une petite incertitude sur la sincérité du vote : a-t-il bien été effectué librement ?

Vote en ligne

Outre tous les enjeux attachés au vote en ligne, cette modalité pourrait même ne pas avoir d’incidence positive réelle sur le taux de participation. // Source : Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères

« Personnellement, je suis très attaché au fait que c’est un caractère absolument solitaire, le vote », a ainsi tenu à souligner Gérald Darmanin. « Il ne faut pas que votre mari, votre curé, vos enfants, votre communauté voit ce que vous votez et vous oblige à voter quelque chose. » Cependant, en tant que membre du gouvernement, le ministre doit s’évertuer à mettre en œuvre le programme du chef de l’État.

Dans son programme électoral, Emmanuel Macron disait vouloir « généraliser le vote électronique d’ici 2022 ». Il était ajouté que la mise en place de cette modalité « élargira la participation, réduira les coûts des élections et modernisera l’image de la politique ». En somme, « plus d’efficacité, c’est aussi plus de numérique », était-il affirmé sur le site d’En Marche.

L’effet positif du vote par Internet sur l’abstention loin d’être acquis

Il s’avère que l’effet du vote par Internet sur le taux de participation est loin d’être acquis. Au mieux, il n’aurait aucun impact ou à la marge. Au pire, il pourrait même dégrader le nombre de bulletins de vote valides. Des études sur le sujet, en France et à l’étranger, n’ont en tout cas pas mis en évidence un bénéfice réel du vote électronique sur une réduction de l’abstention, qui atteint des niveaux préoccupants.

Quant à tenir les délais évoqués dans le programme d’Emmanuel Macron, ce ne sera pas possible en 2022. « On n’en aura pas le temps d’organisation », a reconnu le ministre. Cela vaut d’ailleurs pour l’autre piste de vote à distance, qui est le vote par correspondance. Si elle n’est pas évoquée dans l’ancien programme d’Emmanuel Macron, elle a refait parler d’elle au détour d’une proposition de loi déposée en septembre.

« Le vote à distance est techniquement possible », a rappelé Gérald Darmanin, mais il y a certains obstacles à franchir pour le mettre en place. Ces obstacles sont d’ordre juridique (il faudrait une réforme constitutionnelle, par exemple pour pouvoir voter sur plusieurs jours et pas uniquement un dimanche) et administratif (il faut vérifier que la personne qui vote est la bonne et qu’elle le fait sans pression).

Le ministre ne s’est pas attardé sur les autres problématiques généralement associées au vote par Internet, à commencer par la fiabilité du scrutin et la vérifiabilité du processus. Il n’a pas non plus évoqué les tentatives d’ingérence qui pourraient survenir pour tenter de modifier la répartition des voix, ou pour tout simplement faire planter largement le système et faire capoter les élections.

Selon Gérald Darmanin, la mise en place éventuelle du vote par Internet sera couplée avec la carte d’identité électronique, dont plus d’un million d’exemplaires ont déjà été distribués. Cette carte « a vocation à répondre à des usages régaliens », notait la Cnil. Couplée avec « la mise en œuvre d’une identité numérique d’État de haut niveau », c’est-à-dire hautement sécurisée, elle pourrait jouer un rôle dans ce vote électronique.

Le vote par Internet a existé pour les Français de l’étranger en 2012 lors des législatives. Il a été retiré pour les suivantes en 2017, pour des raisons de sécurité empêchant d’assurer la fiabilité du vote à distance. Nous étions alors quelques mois à peine après les accusations américaines d’ingérences russes dans leur processus électoral. À l’époque néanmoins, le président avait souhaité le retour de cette modalité pour 2022.

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