Dans un article, Le Parisien révèle des statistiques éclairantes sur le niveau d’usage de l’application TousAntiCovid en France. Le journal, qui a consulté un rapport du ministère de la Santé et du secrétariat d’État au numérique, indique que 51,4 millions de téléphones et de tablettes ont téléchargé au moins une fois l’application depuis son lancement (34,2 millions de téléchargements sur Android, 17,2 millions sur iOS). Un chiffre indéniablement excellent, mais pas forcément facile à saisir. Que représente vraiment un téléchargement de TousAntiCovid ?
Plusieurs téléchargements par personne ?
Premièrement, passons en revue les 51,4 millions de téléchargements dont se félicite le gouvernement. Puisque l’application n’identifie pas directement chaque utilisateur, il est impossible de savoir combien de personnes l’ont réellement installée. Dans ces 51,4 millions, il y en a forcément qui ont téléchargé TousAntiCovid sur plusieurs appareils ou qui ont changé de smartphone dans l’année. Sur Twitter, le chercheur Gaëtan Laurent ironise d’ailleurs sur le nombre de téléchargements de TousAntiCovid supérieur au nombre estimé de smartphones en France.
Toutefois, il est difficile de parler d’un faux succès. Même en imaginant que plusieurs millions de téléchargements sont faussement comptabilisés, TousAntiCovid est une application extrêmement populaire. Si le gouvernement s’est trompé en indiquant qu’il s’agissait de l’application française la plus populaire, mais TousAntiCovid est bel et bien installé sur une grande majorité des smartphones français.
38 millions d’utilisateurs en janvier, mais pour quoi faire ?
Dans son article, Le Parisien communique un nombre un peu plus concret : 38 millions. Il s’agit du nombre de personnes qui ont ouvert TousAntiCovid en janvier. Ce chiffre équivaut à ce que l’on qualifie de « MAU » dans le jargon de la tech, pour « Monthly Active Users ». Le protocole de comptage du gouvernement n’est pas communiqué, mais on peut imaginer que l’ouverture de l’application sur un appareil suffit à déclarer une connexion, même si on ne s’en sert pas ensuite.
Là encore, peut-on conclure au succès ? En surface, oui. Mais rappelons tout de même qu’initialement, TousAntiCovid devait servir au traçage des contacts. L’application, quand elle s’appelait encore StopCovid, devait vous alerter si vous aviez passé trop de temps avec une personne positive.
Aujourd’hui, TousAntiCovid ne sert que rarement à cette tâche. Il s’agit d’une méga-application centralisant plein de données sur le Covid et, surtout, d’un portefeuille pour pass sanitaires/vaccinaux. On peut très facilement imaginer que ces fonctionnalités annexes intéressent un grand nombre des utilisateurs de l’application, même si des alternatives existent pour disposer du pass autrement. À l’heure où le pass est obligatoire dans de très nombreux lieux, TousAntiCovid est mécaniquement devenu un point de passage obligé.
Qu’en est-il du traçage des contacts ? Selon le rapport, 24 % des utilisateurs testés positifs ont le réflexe de l’indiquer dans l’application, ce qui est beaucoup plus que sur l’ensemble de l’année 2021 (11 %). Ce taux d’engagement plus élevé et l’envolée des cas permettent aux notifications d’exposition de remonter à la hausse (un million de notifications ces 20 derniers jours). On pourrait donc croire que le traçage des contacts fonctionne mieux, même si c’est surtout le nombre quotidien de cas qui gonfle artificiellement ces chiffres. En changeant de stratégie, le gouvernement a clairement réussi son pari avec TousAntiCovid. Toujours est-il que son plan initial n’y est pas pour grand-chose.
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