Cet article a été initialement publié en 2022, lors du second tour de l’élection présidentielle entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen.
Pour les Législatives 2024, l’estimation d’un résultat à 20 heures est plus compliquée. D’où la présentation de fourchettes, le temps d’affiner les estimations.
Comme le veut la coutume, c’est à 20 heures que le résultat d’une élection tombe en France.
Les chaînes de télévision organisent un décompte et, dans le cas d’une élection présidentielle, le nom du candidat élu apparaît à l’écran. Plusieurs jours plus tard, le Conseil constitutionnel présente les résultats définitifs de l’élection, quand tout a été dépouillé et que les bureaux accusés d’irrégularités ont été écartés.
Les résultats de 20 heures sont-ils fiables, alors que les bureaux des grandes villes ferment justement à cette heure ? Nous nous sommes interrogés sur le fonctionnement du dépouillement, à quelques heures de la fin des Législatives 2024.
À 20 heures, ce sont de vrais résultats, pas des sondages
Il y a beaucoup d’incompréhension autour des résultats de 20 heures.
Beaucoup de Françaises et de Français semblent convaincus qu’il s’agit de sondages réalisés à la sortie des urnes, en attendant l’arrivée de chiffres officiels. Est-ce le cas ? Figurez-vous que les sondages à la sortie des urnes n’existent plus depuis plusieurs années. Chez Ipsos, un des sondeurs partenaires des médias, les résultats qui tombent à 20 heures sont issus d’un calcul réalisé par des enquêteurs envoyés dans 500 bureaux de vote sélectionnés au vu de leur représentativité de la France (grandes villes, petites villes, clivages politiques…). Parmi ces bureaux, 400 bureaux ferment à 19 heures, 100 à 20 heures. Différents instituts se chargent de ces enquêtes, communiquent ensuite leurs résultats aux médias, puis les mettent à jour tout au long de la soirée. Sur les grandes élections nationales, ils ne se sont jamais trompés.
Pour effectuer ces calculs, les enquêteurs sélectionnent des bureaux dans différentes villes et s’y rendent. Ils assistent aux premiers dépouillements puis remontent l’information. Grâce à un calcul sophistiqué (on ne se contente pas d’une moyenne, on observe par exemple les évolutions dans les bureaux qui ont l’habitude voter plus pour un parti que pour un autre), ils arrivent rapidement à des résultats considérés fiables. À 20 heures, les médias annoncent les résultats les plus récents, puis les actualisent dans les minutes qui suivent en attendant les chiffres officiels.
Dans le cas d’élections comme les législatives, ce calcul est beaucoup plus compliqué (il y a plusieurs élections, ce n’est pas un match national). C’est pour cette raison que les calculs des instituts donnent une tendance (« entre 200 et 250 sièges » par exemple) qui s’affine au fur et à mesure de la soirée, quand les gagnants définitifs sont connus d’une circonscription à une autre. Les premières fourchettes ne doivent répondre qu’à une seule question : est-il possible qu’une majorité absolue existe dans un parti ce soir ?
Plusieurs heures après les premiers résultats, les fourchettes devraient se resserrer (notamment grâce aux résultats des circonscriptions les plus importantes, là où plusieurs issues sont possibles). C’est vers 21 heures ou 22 heures que la future Assemblée nationale devrait être plus facile à imaginer.
Pour les chiffres de l’abstention, Ipsos récupère les données du ministère de l’Intérieur et effectue un calcul pour estimer à quoi il faut s’attendre à 20 heures.
L’erreur est-elle possible ?
Avec leur modèle statistique, les instituts de sondage empêchent un scénario à l’américaine de se produire (en 2020, les premiers bulletins donnaient Trump gagnant puis les votes par correspondance, dépouillés ensuite, ont permis à Biden de l’emporter). La présence d’enquêteurs dans plusieurs bureaux de vote permet d’obtenir une moyenne équilibrée et, jusqu’à aujourd’hui, a toujours permis aux médias d’annoncer les bons résultats à 20 heures, à quelques centièmes de pour cent près. Il y a eu des doutes dans le passé (Jean-Luc Mélenchon au premier tour en 2022 par exemple, qui s’est rapproché du second tour au fil de la soirée), mais les prédictions initiales étaient bien les bonnes.
Que se passerait-il si deux candidats sont trop proches ? C’est difficile à dire. Nous avons tenté d’interroger Ipsos sur la question à plusieurs reprises, sans jamais recevoir la moindre réponse. On peut imaginer que les médias joueraient la prudence, en attendant une actualisation plus précise grâce aux vrais dépouillements. Dans le cas des Législatives, les fourchettes servent à éliminer tout risque.
Dans les circonscriptions de l’étranger (ou dans les territoires d’Outre-mer), les dépouillements ont lieu plus tôt, généralement le samedi, afin de ne pas avoir d’incidence sur le résultat final du dimanche. La raison de cette différence est toute simple : le décalage horaire.
Peut-on faire confiance aux sondages sortis par les médias étrangers ?
Une autre méthode existe pour déterminer les résultats d’une élection : les sondages du jour. Les instituts appellent massivement des Français pour leur demander pour qui ils ont voté (s’ils ont voté) et communiquent les réponses aux médias, même si les médias français ne doivent rien dire avant 20 heures pour ne pas influencer le suffrage. C’est de là que viennent certaines fuites sur le hashtag #RadioLondres, qui prétendent communiquer les résultats en avance.
Sont-ils fiables ? Généralement, oui. Mais, en 2002, aucun sondage du jour n’avait imaginé Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle. Ces méthodes peuvent sans doute causer du tort aux candidats dont on n’assume pas toujours le vote, et donc déformer la réalité. Les résultats de 20 heures, suivis par ceux du ministère de l’intérieur (actualisés en temps réel, mais ils commencent pas les bureaux qui ferment en premier) puis de ceux du Conseil constitutionnel, sont différents et sont plus fiables. Dans le cas des Législatives, avec un scrutin non national, les sondages du jour sont encore plus incertains.
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