Des passages de la bible comparant l’homosexualité à une abomination, des publications mettant en garde contre les gays et les comportements « efféminés », ou encore des messages encourageant à « guérir » les personnes LGBT+… Ce sont des contenus que l’on peut toujours trouver sur Facebook, en 2022, en faisant une simple recherche sur l’homosexualité. C’est ce dont s’est aperçu Numerama en navigant sur le réseau social. Nous avons trouvé des contenus, publiés sur des groupes publics ouvertement LGBTphobes, appelant à la haine des personnes queer ou encourageant les thérapies de conversion.
Le réseau social, qui est utilisé par près de 40 millions de Français et Françaises chaque mois, avait annoncé dès 2010 prendre des mesures pour lutter contre l’homophobie sur la plateforme, et son règlement intérieur liste précisément l’interdiction des propos homophobes.
Douze ans plus tard, il reste encore très facile de trouver des pages ou des groupes ouvertement homophobes, et même d’en créer. Au lendemain de la journée mondiale de lutte contre l’homophobie, la transphobie et la biphobie, les exemples trouvés par Numerama montrent que les grandes plateformes comme Facebook ne sont toujours pas au niveau.
L’homosexualité, une « abomination » sur Facebook
Les pages et les différents groupes Facebook que Numerama a trouvés sont tous accessibles publiquement : il s’agit donc de contenus que tout le monde peut voir.
En tapant simplement le terme « homosexualité » dans la barre de recherche interne de Facebook, et en cliquant sur la catégorie « communautés », nous sommes ainsi tombés sur le groupe « Intercession contre l’homosexualité et autres problèmes de la vie ». Le groupe, qui faisait partie des 20 premiers résultats, compte plus de 450 personnes. Il est très actif, à raison de plusieurs publications par jour. Ces dernières mettent en avant une vision homophobe de la religion : il est expliqué à plusieurs reprises que l’attirance entre personnes de même genre n’est pas bien vue par l’église.
Les quelques rares personnes qui ont osé expliquer dans le groupe qu’elles pensaient être homosexuelles, ont, à chaque fois, reçu des commentaires sur le fait qu’elles devaient se faire soigner. « L’homosexualité est une abomination aux yeux de dieu, qui doit être considérée dans sa vraie nature », peut-on notamment lire sous un appel à l’aide.
Ce n’est pas le seul groupe. « Disons non à l’homosexualité » (180 membres), et « Non à l’homosexualité en Guinée » (320 membres) font également partie des 50 premiers résultats à s’afficher lorsqu’on cherche « homosexualité » dans les communautés Facebook, et contiennent peu ou prou les mêmes contenus. On trouve d’autres groupes du même acabit, comme « lutte contre l’homosexualité », ou encore « non à l’apprentissage de l’homosexualité à l’école ». En tout, Numerama en a trouvé une dizaine de ce genre, rien qu’en français.
Le fait que des groupes aussi dangereux puissent être parmi les premières suggestions du réseau social est particulièrement alarmant. Il serait totalement possible que de jeunes utilisateurs, à la recherche d’informations fiables, tombent par hasard sur ces contenus.
Des pages promouvant des thérapies de conversion
Numerama a aussi découvert des pages (elles diffèrent des groupes, où tout le monde peut publier des sujets de discussion) homophobes. Dans les résultats, peu après celles d’associations ou de médias LGBT connus, nous sommes tombés sur une page sinistre : « Comment sortir de l’homosexualité ». Suivie par 216 personnes, la page a été créée en 2018 et poste régulièrement des messages expliquant qu’il serait possible « d’abandonner la vie d’homosexualité », notamment grâce à « Jésus Christ ». L’administrateur de la page invite toutes les personnes LGBT qui le souhaiteraient à le contacter personnellement par message, afin de « sortir de l’homosexualité ».
En France, les thérapies de conversion sont illégales depuis la loi du 31 janvier 2022. « Généralement à destination d’un public jeune, elles ont des effets dramatiques et durables sur la santé physique et mentale des personnes qui les subissent : dépression, isolement, suicide », peut-on lire sur le site officiel Vie Publique.
Le même phénomène est observable dans d’autres langues qu’en français. En tapant « homosexuality », on trouve parmi les premiers résultats la page « Ex-LGBT Through Jesus Christ » (« ne plus être LGBT grâce à Jésus Christ », en français), likée par plus de 12 000 personnes, « Overcoming homosexuality » (« surmonter l’homosexualité ») comptant plus 7 000 likes, ou encore « Homosexuality is a sin against God » ( « l’homosexualité est un péché contre Dieu »), suivie par plus de 4 100 personnes.
Les homophobes n’ont pas besoin de se cacher sur Facebook
Ces groupes homophobes ne représentent heureusement pas la majorité des contenus. Il existe des pages ou des communautés faites par et pour les personnes LGBT+, dans lesquelles des contenus positifs sont publiés. Nous avons consulté de nombreux groupes de soutien entre personnes queer, et des pages où le sujet de l’homosexualité est abordé avec bienveillance.
Il n’empêche que des contenus homophobes, donc interdits par les conditions d’utilisation de la plateforme, mais aussi, par la loi, sont légions.
Contactée par Numerama, Meta, la maison mère de Facebook, nous a simplement répondu que « les discours haineux contre la communauté LGBTQI+ sont interdits », et qu’ils « suppriment ces contenus dès qu’ils en sont informés ». « Nous avons des outils de signalement sur Facebook et Instagram qui permettent aux utilisateurs de nous prévenir quand ils voient ce genre de contenus, et des équipes spécialisées qui examinent 7 jours sur 7 les rapports ». La présence prolongée de ces groupes sur le réseau social illustre cependant le fait que les outils de signalement ne marchent pas toujours.
Facebook a pourtant les moyens de lutter contre ces groupes : la plateforme utilise de nombreux procédés de modération automatique qui permettent de supprimer de manière proactive les contenus les plus dangereux. Le fait que des groupes homophobes continuent d’exister montre la limite de ces technologies, mais aussi, que Facebook fait des choix qui ne protègent pas toujours. Le site a ainsi censuré le terme « lesbienne » pendant longtemps, même lorsqu’il été utilisé par des associations de soutien aux personnes LGBT+.
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