La plateforme vidéo de Google se montre plus sévère face à la prolifération de la désinformation. Un cadre du groupe indique que la majorité des vidéos effacées proviennent de chaînes affiliées au gouvernement russe.

YouTube frappe un grand coup contre la désinformation. La plateforme de Google a retiré plus de 70 000 vidéos et supprimé 9 000 chaînes liées à la guerre entre la Russie et l’Ukraine, rapporte le quotidien britannique The Guardian ce 22 mai. YouTube indique que les diffuseurs sanctionnés avaient enfreint les règles relatives au contenu, notamment en qualifiant l’invasion de l’Ukraine de « mission de libération ».

« Nous avons une politique contre la négation d’événements violents majeurs, elle s’applique pour tout, de l’Holocauste à Sandy Hook (tuerie scolaire aux Etats-Unis). Évidemment, ce qui se déroule en Ukraine est un événement violent majeur, et donc nous avons pris des mesures sans précédent sur la base de cette politique », a déclaré Neal Mohan, le responsable des produits chez YouTube.

« Notre plus grande responsabilité est s’assurer que les personnes puissent obtenir des informations précises, de haute qualité et crédibles », a-t-il ajouté.

YouTube n’a pas fourni une liste des contenus et des chaînes retirés. Néanmoins, Neal Mohan indique que la majorité des vidéos reprenaient le discours du Kremlin sur l’invasion. « Je n’ai pas de chiffres précis, mais vous pouvez imaginer qu’une grande partie sont des récits qui proviennent du gouvernement russe, ou d’acteurs russes au nom du gouvernement russe ».

La chaîne de Vladimir Soloviev, présentateur star et propagandiste du Kremlin, a été supprimée. L'animateur appelait régulièrement à attaquer l'Europe et étendre l'invasion à d'autres pays. // Source : Telekanal / YouTube
La chaîne de Vladimir Soloviev, présentateur star et propagandiste du Kremlin, a été supprimée. L’animateur appelait régulièrement à attaquer l’Europe et étendre l’invasion à d’autres pays. // Source : Telekanal / YouTube

Sanctionné, mais toujours présent en Russie

La popularité de YouTube en Russie rend la plateforme aussi nuisible qu’utile pour le Kremlin. Les opposants à Vladimir Poutine peuvent y partager librement leur contenu, tout comme les organes de désinformation et les médias détenus par le gouvernement. Près de 90 millions de russes se servent de la plateforme de Google pour se divertir ou s’informer. La semaine dernière, le ministre russe du développement numérique, Maksut Shadaev, a déclaré que son gouvernement ne bloquerait pas YouTube, malgré les différends sur le contenu qui ont valu à la plateforme d’être condamnée à une amende par la justice pour ne pas avoir retiré des vidéos interdites.

Depuis le début de l’Invasion, YouTube s’est engagé à lutter contre la désinformation en commençant par supprimer des chaînes et notamment celle du propagandiste favori du Kremlin, Vladimir Soloviev. « YouTube reste le plus grand site de partage de vidéos en activité en Russie même », a déclaré Neal Mohan. « C’est donc un endroit où les citoyens russes peuvent obtenir des informations non censurées sur la guerre ».

Les comptes associés aux ministères russes de la défense et des affaires étrangères ont également été temporairement suspendus ces derniers mois, pour avoir décrit la guerre comme une « mission de libération ». YouTube a aussi banni Russia Today et Sputnik, les deux principaux relais du discours du Kremlin à l’international, au mois de mars.

1 milliard d’heures de vidéo sont visionnées chaque jour sur la plateforme, et le groupe tente tant bien que mal de filtrer ce titanesque contenu. Au plus fort de la crise du Covid, YouTube avait supprimé plus de 130 000 vidéos mettant en cause le vaccin. Les contenus choquants sont également dans le viseur du groupe et de nombreux youtubeurs en ont fait les frais. La chaine de Donald Trump avait également été temporairement banni après que l’ancien Président a alimenté l’invasion du Capitole par ses partisans.

La suppression de 9 000 chaînes diffusant un discours volontairement erroné sur l’invasion russe marque une nouvelle étape dans la politique de modération de YouTube. Le groupe affiche son intransigeance face à la désinformation durant les évènements d’actualités majeurs.

Facebook et Instagram sont déjà interdits en Russie et l’accès à Twitter a été restreint. Le blocage des relais de propagande fait perdre à YouTube son aspect utile pour le Kremlin qui ne devrait pas tarder à répliquer.

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