Dans Neon White, le plan a capoté. Un job s’est mal passé et cette fois-ci, c’est vous qui avez pris la balle de trop. C’est vous qu’on a assassiné. Vous vous réveillez dans l’au-delà avec une sacrée migraine et une vilaine amnésie, avant qu’on vienne vous voir pour vous annoncer la nouvelle : vous êtes maintenant un Neon, et pour gagner votre place au paradis, il va falloir charbonner. Le grand monsieur dans le ciel a la flemme, c’est à vous qu’il demande de faire le sale travail : purger les différents quartiers qui entourent le paradis des démons qui les squattent. White, notre personnage principal qui passe pour le moment un sale mardi, apprend donc qu’il doit enchaîner douze destinations le plus vite possible avant le jour du grand jugement — où on décidera s’il remporte son ticket pour le paradis.
Pour faire les choses vite, il fallait un jeu qui va vite, et c’est précisément la grande réussite de Neon White. Le jeu d’Angel Matrix et Ben Esposito est un FPS où les missions durent moins d’une minute et consistent à franchir la ligne d’arrivée en ayant éliminé tous les démons sur le chemin. On colle quelques obstacles, des séquences de voltige, quelques ennemis et surtout un chronomètre au milieu de l’écran, et nous voilà avec un jeu de speedrun où plus que les armes, ce sont les mouvements et la vitesse qui importent. Les armes ne ressemblent même pas vraiment à ce qu’on trouve d’habitude dans un jeu de tir, d’ailleurs. Ce sont des cartes, que l’on ramasse dans les niveaux (par terre ou après avoir tué un ennemi) et qu’on conserve dans sa main en se baladant à travers le décor. Chaque carte a un nombre d’utilisations limité et quand on clique pour ‘jouer une carte’, ça tire un coup de feu. Tout simplement.
Le Desu des cartes
Disponibilité
Neon White est disponible depuis le 16 juin sur PC et Nintendo Switch.
Alors évidemment, quand on découvre un jeu de tir qui est aussi un jeu de cartes, il y a de quoi hausser les sourcils. Mais dans les faits, c’est plutôt malin comme idée et on le réalise très rapidement après avoir lancé le jeu. Chaque arme est associée à une carte de couleur (le pistolet jaune, la mitraillette verte, le fusil bleu ou le fusil à pompe rouge) qui permet de savoir immédiatement quel type de pétoire on vient de ramasser et quel sera l’effet d’un clic gauche. Après quelques niveaux, Neon White introduit une seconde mécanique liée aux cartes : la possibilité de les défausser grâce au clic droit, et d’activer ce faisant une capacité secondaire. Elles peuvent aller du saut pour le pistolet au bond en avant pour le fusil, jusqu’à une bombe collante qui permet d’éliminer un groupe d’ennemis ou de se projeter dans les airs. Ces capacités sont d’une importance capitale dans les mouvements du personnage mais elles nécessitent un poil de réflexion, puisque les activer supprimera la carte concernée de notre main, et, par ricochet, l’arme qui va avec.
Neon White est un jeu qui répond au doigt et à l’œil
S’ajoutent à cela quelques nuances comme la nécessité de tenir le compte de ses cartes et de ses munitions (plutôt rares, ça aide) ou des éléments destructibles dans les niveaux. Dans chacune de ses douze missions, toutes composées d’une dizaine de petits niveaux, Neon White nous balade dans des environnements minimalistes à la colorimétrie épurée, où tout est pensé pour ne jamais arrêter d’avancer. Au lancement du chrono, il faut se lancer, et penser rapidement pour analyser la topologie d’un niveau et savoir où aller. Fort heureusement, Neon White est un jeu qui répond au doigt et à l’œil et où l’on comprend facilement comment naviguer. Chaque quartier du paradis sera l’occasion de découvrir une nouvelle mécanique de jeu, du double saut au dash jusqu’à un piétinement vertical. Et une nouvelle capacité apprise, ça amène généralement beaucoup de nouvelles façons de jouer avec l’architecture d’un niveau ou d’éliminer ses ennemis. On expérimente, on meurt, on expérimente à nouveau, on meurt encore et toujours mais ce n’est pas grave, parce qu’on commence chaque nouvel essai avec de nouvelles connaissances.
La fièvre du speedrun dans Neon White
D’un essai à l’autre, un niveau ne bouge pas dans Neon White. Le décor est le même, les ennemis sont immobiles et les cartes sont tout le temps placées aux mêmes endroits. Tentative après tentative, la mémoire musculaire se met en place et permet d’appréhender les situations avec davantage d’aisance. C’est très pratique, parce que ça laisse le joueur apprendre par cœur les endroits qu’il visite pour s’améliorer, en le laissant prendre son temps s’il en a envie. Chaque niveau est associé à une jauge de vision, qui correspond aux connaissances accumulées grâce à chaque run. Plus on va jouer un niveau, plus la jauge va monter et à certains paliers, on a accès à un fantôme de notre meilleur temps, un tableau des scores et même des conseils — symbolisés en jeu par des petites marques orange à suivre pour trouver un raccourci. Concrètement, c’est une aide qui ne prend pas par la main. Elle est même désactivable, pour les gros malins qui n’ont jamais eu besoin des petites roulettes pour faire du vélo.
Exigeant sans jamais être frustrant
Par ces petites idées simples mais efficaces, le joueur est accompagné tout au long de sa découverte d’un titre qui, pourtant, ne se retient pas de hausser le ton quand il en a envie. Les premières missions sont assez classiques dans leur construction mais assez vite, on se retrouve face à de nouveaux ennemis (hostiles ou non), des bâtiments à traverser, des sauts de plusieurs dizaines de mètres et des rotations à 180° quand on est lancé à pleine vitesse. Pile quand on commence à maîtriser une nouvelle capacité et à enchaîner les sauts de cabri dans un niveau, Neon White prend un malin plaisir à nous asséner une tape sur l’épaule avant de nous dire ‘regarde, j’ai ajouté un lance-roquettes et un grappin’. Grâce à un level design intelligent et une courbe de difficulté bien dosée, le jeu sait se montrer exigeant sans jamais être frustrant. On ne s’en lasse pas, et il ne nous noie jamais sous les mécaniques de jeu, pour justement se concentrer sur l’essentiel : le rythme.
Et il faut reconnaître que Neon White est très, très fort pour ça. Pris dans la fièvre du speedrun, on vit comme une attaque personnelle la découverte du tableau des scores, quand on comprend qu’on a fait trois secondes de moins qu’un ami dans notre liste Steam. C’est peu, trois secondes. Une personne normale s’arrêterait là, et se dirait qu’il faut plier bagage, que ça ne sert à rien de s’acharner pour être meilleur qu’un type qui ne va jamais relancer le jeu et voir qu’on a battu son temps. Mais c’est addictif, votre truc, et il n’y a même pas de temps de chargement entre les niveaux. Alors pourquoi ne pas relancer le niveau une dernière fois ? C’est sûr : qu’on peut trouver un raccourci si on essaye de sauter au-dessus de ce mur, ou qu’on peut gagner une seconde en passant par ce trou. Plus rapidement qu’on ne le pense, on se met à recommencer le même niveau en boucle en se mordant la lèvre, optimisant virages et sauts sous un déluge de breaks de batterie et de synthés mordants (la bande-son est incroyable) pour essayer de grappiller quelques dixièmes de seconde par-ci par-là. On enchaîne les tentatives machinalement, comme un pantin déshumanisé en quête de rédemption, et dont la seule priorité avant d’aller se coucher serait d’obtenir la médaille d’As sur tous les niveaux.
Neon White parle trop
Au total, c’est plus d’une centaine de niveaux qu’il faut apprendre à maîtriser pour venir à bout du jeu, après dix à quinze heures. La durée de vie dépend de votre appétence pour les dialogues et les longues séquences de visual novel. Car, oui, Neon White est un jeu qui parle beaucoup. Réussir une mission amène le héros un peu plus près des portes du paradis, et sera l’occasion de zoner un peu au milieu des personnages qui peuplent l’au-delà. Il y en a qui sont attachants, comme ce chat déguisé en CEO qui fume son cigare sur un petit nuage, ces fantômes qui tiennent un cinéma ou les anges qui travaillent à l’administration du paradis. On prend sincèrement plaisir à visiter chaque quartier pour voir ce qu’il cache et découvrir de nouvelles têtes, parce qu’il y a des fois où c’est vraiment drôle.
Et il y a les autres Neons, des personnages hauts en couleur qui cherchent comme nous à atteindre le paradis. Red, Green, Violet et Yellow sont tous un peu bizarres à leur manière. Au fond, ils ne sont pas de mauvais bougres. C’est juste qu’ils adorent parler, et souvent pour ne rien dire. Les conversations sont pourtant très soignées : c’est super bien animé, les dialogues sont doublés, la mise en scène est propre et cerise sur le gâteau, on peut même trouver des cadeaux dans les niveaux qui feront évoluer nos relations avec les personnages et donneront accès à des quêtes secondaires. Hélas, on doit se farcir de longues minutes de dialogues vides de sens et en toute franchise, il arrive un moment où les arcs narratifs tournent un peu en rond et les retournements de situation ne surprennent plus vraiment.
Quand vous commencerez à en avoir marre de lire des personnages faire des blagues de fesses, n’hésitez pas à abuser du bouton Avance Rapide. Certains, comme Doom, ont eu la présence d’esprit de ne pas nous imposer un scénario vide d’intérêt entre chaque mission. D’autres comme Neon White auraient peut-être mieux fait de suivre un peu l’exemple. Qu’à cela ne tienne, vous passerez quand même un super moment.
Le verdict
Neon White
Voir la ficheOn a aimé
- Le mélange de FPS et de cartes, c’est malin
- Se coucher à deux heures du matin pour ‘un dernier niveau’
- Difficulté et level design aux petits oignons
On a moins aimé
- Des dialogues parfois drôles, souvent épuisants
- Quand ça s’arrête, on en veut encore
- Ces ‘amis’ qui réussissent les niveaux avec une seconde de moins que moi
Neon White n’est clairement pas un jeu à mettre entre toutes les mains. Passez votre chemin si vous n’aimez pas les FPS qui vont très vite, si les visual novel vous répugnent ou si le speedrun ne vous intéresse pas. Si c’est ne serait-ce qu’un peu votre passion, par contre, vous y trouverez un jeu addictif, prenant et qui gère son rythme comme un chef. Le genre de jeu qui vous fait éteindre l’ordinateur à deux heures du matin avec le palpitant qui s’affole, la pupille noire et de la sueur sous les doigts. Il est un peu moins doué pour raconter une histoire mais on lui pardonne, tant il excelle dans l’art de transformer ses joueurs en voltigeurs fous.
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