Le Z Event 2022 sera marqué par le sceau d’une double polémique. L’absence de certaines figures du streaming d’une part, ce qui a déclenché la colère de certaines communautés de fan, et le choix de l’association soutenue, accusée de « greenwashing ». Depuis, Zerator, le créateur de ce marathon caritatif de jeux vidéo, essaie de calmer le jeu.

Ce devait être une fête autour du jeu vidéo, un évènement communautaire et l’occasion de venir en aide à une cause. Mais depuis le 4 juillet 2022, le ton monte vigoureusement autour de Z Event, le fameux marathon caritatif organisé chaque année par Adrien Nougaret, alias Zerator. En cause ? Le choix de l’association qui recevra les dons récoltés durant l’opération.

Car cette année, le choix de l’équipe s’est porté sur la fondation GoodPlanet. En apparence, celle-ci présente un profil tout à fait respectable : elle est présidée par Yann Arthus-Bertrand, célèbre réalisateur et photographe, à qui l’on doit La Terre vue du ciel, un ouvrage sur la beauté et la fragilité de la planète bleue. Il a donné lieu par la suite à un documentaire, qui a eu un impact notable pour saisir l’impact des activités humaines sur l’environnement.

GoodPlanet
La page d’accueil de GoodPanet. // Source : Capture d’écran

À l’heure où les conséquences du dérèglement climatique paraissent de plus en plus évidentes et menaçantes, le choix d’une structure environnementale comme GoodPlanet, qui entend agir dans le domaine de l’écologie, apparait cohérent. C’est aussi une première pour le Z Event : jusqu’à présent, les associations retenues étaient sur de l’aide aux personnes (Save the Children, Croix-rouge, Médecins sans frontières, Institut Pasteur, Amnesty International, Action contre la faim).

Seulement, comme la planète, les esprits s’échauffent depuis l’annonce du choix de GoodPlanet. Car il est reproché à cette fondation, comme à Yann Arthus-Bertrand d’ailleurs, de ne pas présenter un profil absolument impeccable pour parler d’écologie et, surtout, de ne pas être suffisamment irréprochable pour bénéficier de l’appui du Z Event. Ainsi, ces deux derniers jours, des citations de Yann Arthus-Bertrand sont ressorties, tandis que les activités et les liens de GoodPlanet sont pointés du doigt sur Twitter.

https://www.youtube.com/watch?v=H9u7e0F1NfU

Un soutien désormais renié à la Coupe du monde au Qatar

Principale réprimande qui revient sur les réseaux sociaux : le fait que Yann Arthus-Bertrand ait apporté par le passé son soutien à l’organisation de la Coupe du monde de football au Qatar, qu’il a semblé faire en échange d’une aide pour boucler le financement d’un de ses films, Home, afin de pouvoir diffuser gratuitement l’œuvre dans les pays arabes. C’est ce qu’il racontait au mois de décembre 2021 à France Inter, lors d’une interview.

Ce soutien à une compétition sportive dans un pays aux conditions climatiques très contraignantes (la compétition a été déplacée en hiver, les stades sont équipés d’un vaste système de climatisation) est évidemment apparu en contradiction avec les engagements publics de l’intéressé, qui intervient ponctuellement dans les médias pour sensibiliser l’opinion publique. Sans parler du coût humain pour faire sortir de terre six nouveaux stades et rénover l’existant.

yann arthus-bertrand
Yann Arthus-Bertrand. // Source : Ary Kerner

Ce soutien, Yann Arthus-Bertrand dit le regretter aujourd’hui. C’est ce qu’il ressort de son entretien radiophonique. « Je n’aurais pas dû le soutenir. J’ai envoyé plusieurs lettres aujourd’hui au Qatar, je n’ai pas de réponse », a-t-il assuré. Parlant même d’une « connerie », Yann Arthus-Bertrand a ajouté que le Qatar n’est pas un modèle de développement : c’est « le pays qui a la plus grosse empreinte écologique au monde. »

Des accusations de « greenwashing »

Quant à GoodPlanet, c’est à travers ses partenaires et ses mécènes que la fondation est pointée du doigt, car elle participerait, involontairement ou non, à des activités de « greenwashing » — cette pratique consiste à se donner l’apparence d’une organisation agissant au profit de l’environnement, alors que ses pratiques vont dans l’autre sens. Dans ces conditions, l’engagement de GoodPlanet ne serait pas si sincère et servirait de façade bien commode à d’autres.

La liste des soutiens, disponible sur le site de la fondation GoodPlanet, montre ainsi des entreprises comme BNP Paribas (une grande banque accusée de financer des activités dans les énergies fossiles), Total (un géant de l’industrie pétrolière), EDF (qui peut ponctuellement utiliser des énergies fossiles) et diverses autres sociétés, comme Garnier, Ariel, La Poste, Guerlain ou Allianz.

La page des partenaires présente également les actions de ces sociétés aux côtés de GoodPlanet. Ainsi, « BNP Paribas soutient de nombreux projets de la Fondation GoodPlanet », à travers notamment un programme d’action carbone en Inde, mais aussi l’apport d’expertise. Pour EDF, il s’agit de deux projets, en Inde, l’autre en Indonésie, avec entre autres de l’énergie solaire. Pour Total, il est question d’un appui à la construction de biodigesteurs.

Panneaux solaires. // Source : Pixabay
Certaines entreprises sont accusées de faire du « greenwashing ». // Source : Pixabay

Des éléments susceptibles de faire mouche ? À lire les réactions, certainement pas. « Financer une association ‘écolo’ qui promeut une industrie les plus polluantes qui soient… Non merci, ça sera sans moi, et choisissez mieux la prochaine fois », tranche Hassan. « Il est difficile de donner de l’argent qui servira à ce genre de promos », prévient Jauraio, en pointant des publications de GoodPlanet.

Les critiques pointent par exemple l’usage des NFT pour lever des fonds, d’autres la place accordée à l’anthroposophie et la biodynamie, qui sont des courants marqués par des pseudosciences. Certaines de ces pratiques s’apparentent à de l’agriculture biologique, d’autres versent dans la pensée magique où, l’on voit des approches — dans le vin notamment — dont les effets n’ont jamais été validés par la science et dont l’efficacité est mise en doute.

Résultat des courses, les critiques pleuvent sur Twitter contre le choix du Z Event et de Zerator d’avoir retenu GoodPlanet.

Le désarroi de Zerator

À tel point que l’organisateur du marathon caritatif a fini dans la matinée du 5 juillet par se fendre d’un message, où il exprime un important désarroi : « ce qui se passe autour de Z Event 2022 m’affecte énormément. J’essaye de me concentrer sur le positif. Je suis abasourdi par la méchanceté de certains (d’une violence très intense) autour d’un événement gratuit caritatif dans lequel on met tellement de temps et d’énergie. Dégouté. »

Ce message, en réalité, est le miroir d’une autre vive controverse qui a émergé au même moment depuis l’annonce de la line up des personnalités qui participeront à l’édition 2022 du Z Event. Le problème ? Une querelle de chapelle, car les fans de tel ou tel streameur qui n’est pas présent ont évidemment donné de la voix pour faire part de leur désaccord — et faire comprendre qu’ils bouderaient l’évènement, tant que leur star ne sera pas présente.

Le Z Event a bien sûr ses personnalités récurrentes, et des liens d’amitié ont pu se nouer avec le temps entre Zerator et d’autres. Il y a aussi des invités qui sont là ponctuellement, sur une ou deux éditions, mais sans avoir la certitude de revenir l’année suivante. Il faut également composer avec la disponibilité des uns et des autres. Parfois, des invités ne pourront pas honorer leur présence à cause d’engagements pris antérieurement.

Zerator, lors d'un évènement en 2016. // Source : Julien Kuhnel
Zerator, lors d’un évènement en 2016. // Source : Julien Kuhnel

À cela s’ajoute aussi le fait que le Z Event est un évènement en présentiel dans un lieu physique, avec un nombre limité de places — même si souvent, tout est fait pour pousser les murs et accueillir un maximum de monde. Il faut que l’organisation soit en mesure d’assumer une cinquantaine d’heures de streaming — soit près de trois jours — pour le marathon, la logistique et l’intendance devant suivre. Impossible, en clair, d’inviter tout le Twitch Game et le YouTube Game français.

Parmi les absents qui ont été signalés pour l’édition 2022 figurent notamment le Joueur du Grenier, Squeezie, Michou, Locklear, Kamel, Billy, Amine, Laink, Terra ou encore Inoxtag. Il est difficile de savoir pour chacun d’eux les raisons profondes, qui ne sont pas toujours connues du public. Pour le Joueur du Grenier, c’est parce qu’il a déjà un évènement prévu sur les jours du Z Event. Pour d’autres, c’est possiblement l’attitude à la Z Event 2021 qui a pu jouer. Inoxtag avait été au cœur d’une polémique pour des propos sexistes tenus en public et en direct.

Adrien Nougaret n’est évidemment pas rentré dans ce type de détail, mais il a fait savoir que les invitations avaient été envoyées le 4 mai, plusieurs mois à l’avance (le marathon aura lieu du 8 au 11 septembre) : « Quand c’est un problème de planning, c’est pas de chance, mais on ne peut pas tout décaler et on pensait que prévenir 5 mois à l’avance serait suffisant. Je suis évidemment déçu de ne pas voir certains streamers très importants de la plateforme, sachez qu’ils ont tous été invités, mais que personne n’est obligé de venir. »

L’intéressé s’est par la suite fendu d’une série de messages pour réexpliquer le but du Z Event, qui n’est ni une course aux vues ni une compétition pour battre à chaque fois des records de dons — même si franchir le plafond précédent reste appréciable. Et Zerator d’inviter le public à donner une autre association, si jamais celle qui a été retenue ne convient pas pour telle ou telle raison. Quant à GoodPlanet, Zerator a préféré renvoyer vers les réponses de l’association, qui depuis deux jours essaie de faire du « damage control ».

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