Il y a eu un meurtre dans le village de Tassing. Le baron de Rothvogel, riche mécène de l’abbaye de Kiersau, a été froidement assassiné, et le frère Piero, un moine affable que vous savez innocent, est accusé du crime. Vous êtes Andreas Maler, un jeune-maître artisan venu perfectionner sa technique d’enluminure en compagnie des moines de l’abbaye, et c’est à vous de déterminer qui est le véritable coupable en discutant avec les villageois avant l’arrivée de l’archidiacre chargé de juger l’affaire. Il y a cependant un problème : vous ne disposez que de quelques jours, et de nombreuses personnes ont de très bonnes raisons d’avoir tué le baron. Pire encore : vous ne saurez jamais qui est le véritable coupable, et il vous faudra vivre avec votre décision, quelle qu’elle soit, pendant de longues années.
Dans ses mécaniques, Pentiment se montre très classique à première vue : il s’agit d’un point and click, où le joueur se contente d’explorer des zones plutôt réduites pour s’entretenir avec différents personnages, résoudre quelques énigmes, faire quelques mini-jeux et observer les objets qui composent l’environnement. Mais dans la grande tradition du RPG – un genre cher au studio Obsidian, qu’on connaît notamment pour des jeux comme Pillars of Eternity ou Fallout: New Vegas – c’est aussi au joueur de choisir les éléments biographiques et les traits de caractère d’Andreas. Ils influenceront les options de dialogue et la suite de l’aventure. Est-ce que votre personnage a un penchant pour les délits mineurs et les bagarres ? Est-ce qu’il est extrêmement sociable et en quête de bon temps, ou est-ce qu’il a choisi de se dédier pleinement à son art ? Est-ce qu’il peut lâcher des références bien senties aux repères culturels de Florence, Venise et Milan, ou est-ce qu’il connaît la Flandre comme personne ? Est-ce qu’il s’y connaît en sciences occultes, en astronomie ou en latin ? Derrière une palanquée de choix en apparence triviaux se cache tout un enchaînement de systèmes, qui donnent toujours le sentiment à la joueuse ou au joueur de raconter sa propre histoire.
Dans Pentiment, un Maler ne vient jamais seul
Disponible dans le Xbox Game Pass
Bonne nouvelle : Pentiment est disponible dans le Xbox Game Pass dès le jour de sa sortie.
Dans Pentiment, des choix de dialogue tout bêtes peuvent faciliter ou entraver votre progression, et vous n’en mesurerez les conséquences que bien plus tard : si vous avez le malheur de saluer un personnage d’un signe poli de la tête et de vous plaindre de votre retard sur votre travail, il vous sera peut-être difficile d’obtenir ses faveurs à un moment crucial de l’aventure. Le jeu ne repose pas que sur des options de dialogue : chaque journée est divisée en plusieurs parties, durant lesquelles le joueur doit déterminer avec quel personnage s’entretenir ou passer du temps. Il n’y a que deux repas dans une journée : préférez-vous les passer avec un moine attiré par les sciences occultes qui a des raisons évidentes de vouloir le cacher, ou pensez-vous avoir de meilleures chances en discutant avec un couple de boulangers, sans doute mieux placés pour connaître tous les ragots du village ?
Il n’y a jamais de bon ou de mauvais choix dans Pentiment : certains personnages peuvent vous permettre d’explorer une piste intéressante, tandis que d’autres vous donneront le sentiment d’avoir perdu votre temps, sans qu’il n’y ait jamais aucun moyen d’en juger au préalable. Le jeu fourmille de zones secrètes et de quêtes annexes, et il faudra relancer au moins plusieurs parties pour en voir chaque élément.
En dehors de sa superbe direction artistique inspirée par les enluminures des manuscrits du Moyen-âge, l’un des plus grands atouts de Pentiment réside dans sa narration et sa précision historique. Le jeu a beau être truffé de mots barbares comme « scriptorium », « Wanderjahre » ou « Phillistins », il ne donne jamais l’impression de lire une page Wikipédia ou de suivre un cours magistral livré par un professeur ennuyeux — et obsédé par les vestes en tweed. Au contraire, il distille toujours ses informations de manière très naturelle, tout en traitant des thématiques aussi variées que la lutte des classes, l’oppression des femmes, la montée du protestantisme ou encore la disparition progressive des scribes au profit de l’imprimerie.
En outre, les personnages de Pentiment ont tous quelque chose d’attachant – ou de profondément détestable, c’est une question de point de vue – et ne laissent jamais vraiment indifférent. On prend un réel plaisir à apprendre à les connaître et à les retrouver lors des différentes festivités païennes qui ponctuent l’aventure.
Le jeu n’est cependant pas exempt de défauts : vous serez souvent condamné à lire et relire la phrase « Que Dieu vous bénisse » dès lors que vous saluerez un personnage, et le côté répétitif de certains dialogues est vite exacerbé par l’absence d’habillage sonore. La musique se fait très rare, et les effets sonores sont souvent les mêmes (le bruit d’une plume qui gratte un manuscrit, dont la dimension AMSR finit malheureusement par lasser). Si le jeu est très généreux (il faut compter une bonne quinzaine d’heures pour faire une partie complète, et sa rejouabilité est vertigineuse), cela se traduit aussi par certains problèmes de rythme sur quelques séquences. Divisé en trois actes, le jeu s’étend sur plusieurs générations et donne à voir les évolutions de la société – mais aussi les changements survenus dans la vie des villageois de Tassing, qui se souviendront bien évidemment de vos décisions. Des décisions qui continueront de vous hanter, bien après que les crédits du générique de fin aient commencé à défiler – et c’est sans doute là la plus grande réussite de Pentiment.
Le verdict
Pentiment
Voir la ficheOn a aimé
- Une direction artistique originale
- Un puits d’informations historiques, qui ne donnent jamais l’impression de lire une simple fiche Wikipédia
- Une enquête passionnante, où vous ne cesserez jamais de questionner vos propres choix
On a moins aimé
- Quelques soucis de rythme
- Certains personnages ont la fâcheuse tendance de se placer à côté de l’entrée d’une zone, tandis que d’autres sont laborieux à trouver
- Un habillage sonore un peu trop absent
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