Quelle mouche a piqué Sony en ce début d’année 2023 ? Alors que le PlayStation VR2, facturé 600 €, s’apprête à sortir, la firme nippone ajoute un autre produit ultra onéreux à sa gamme PS5 : une manette de luxe, baptisée DualSense Edge. Pour 240 €, elle ajoute une palanquée de fonctionnalités à la DualSense (déjà excellente de base) et un soupçon de qualité de finition en plus. 240 € représente une sacrée somme : on peut presque acheter quatre DualSense normales pour le même prix.
Bien sûr, le segment des manettes élites existe depuis plusieurs années et, en réalité, l’entreprise arrive sur le tard. Cela fait maintenant deux générations que Microsoft propose son pad Xbox Elite Series 2, tandis que des constructeurs comme Scuf vendent aussi des produits sous licence adaptés aux personnes plus exigeantes. Sony devait s’y mettre pour gonfler son offre d’accessoires (il développe d’ailleurs un périphérique pour les personnes en situation de handicap).
Un tel tarif pour une manette peut se justifier sous certaines conditions : une durabilité exemplaire, une compatibilité sur plusieurs générations (comprendre : la DualSense sera aussi la manette d’une éventuelle PlayStation 6) et des fonctionnalités vraiment avancées. Après quelques jours avec une DualSense Edge entre les mains, force est de reconnaître que nous sommes… bien embêtés au moment de poser un verdict définitif.
La DualSense Edge face à la DualSense
55 grammes d’écart
La DualSense Edge pèse 335 grammes, contre 280 grammes pour la DualSense. Cet écart se ressent, sans que ce ne soit vraiment un défaut pour la prise en main (plus de poids permet de mieux ressentir l’objet).
L’avantage de l’attentisme, c’est que l’on peut copier ce qui marche si bien chez les autres. Par conséquent, la DualSense Edge reprend à son compte plusieurs bons arguments de la Xbox Elite Series 2 — l’une des références des manettes dites Pro. En l’occurrence, l’accessoire conçu pour la PS5 offre différents moyens de personnaliser son expérience de jeu, d’un point de vue hardware.
On retrouve donc :
- La possibilité de changer la forme des sticks, creusés de série, mais qu’on peut choisir bombés (avec deux hauteurs en prime). Sur ce point, on aurait quand même apprécié que Sony copie aussi le système aimanté de Microsoft pour faciliter les modifications. À la place, il faut tirer fort pour les changer.
- Deux palettes à l’arrière, à programmer dans une application dédiée (contre quatre pour la Xbox Elite Series 2). Là encore, on a le choix de la forme, entre une simple ailette quasiment collée à la coque arrière ou un demi-cercle beaucoup plus imposant.
- L’opportunité de modifier la course des gâchettes, avec trois paliers au programme. Ici, l’objectif est, par exemple, de réduire la course au maximum pour transformer la gâchette en bouton (ce qui pourrait faire gagner quelques précieuses millisecondes).
La DualSense n’a aucune de ces fonctionnalités. Elle n’est pas livrée non plus dans une coque de protection qui rassemblerait tous les accessoires de la DualSense Edge. Du côté des finitions, l’écart pourrait être plus significatif, au regard du gap tarifaire. Pour 170 € de plus, la DualSense Edge ne gagne qu’un soupçon de grip en plus (sur la gâchette, notamment, pour accrocher l’index, ou encore sur le pavé tactile, si peu sollicité) et arbore des boutons un peu plus fermes (à voir comment ils évoluent avec le temps). D’aspect, elle fait plus robuste (mais pas quatre fois plus robuste), exception faite de cette face avant à la finition brillante — qui n’est clairement pas un choix esthétique sur le long terme.
Ladite face avant renferme, au prix d’une manipulation peu évidente, les deux modules de stick qu’on peut intégralement remplacer. Derrière cette spécificité inédite, il y a un aveu de faiblesse : Sony ne peut ignorer le phénomène du Drift, très courant sur les Joy-Con de la Nintendo Switch — mais qui n’épargne aucun concurrent. La solution proposée par la multinationale est alors de permettre de tout remplacer à moindres frais, plutôt que d’avoir à tout racheter. L’idée est louable, mais la politique commerciale reste douteuse, surtout à 25 € pièce le module. Aussi, les ingénieurs de Sony pourraient aussi concevoir des sticks capables de tenir très longtemps, histoire que cela ne devienne jamais un problème.
Une application bien faite
La première fois que vous brancherez votre DualSense Edge à la PS5, vous serez directement envoyé vers les paramètres. C’est là où vous pourrez pousser la personnalisation encore plus loin, avec moult options pour reconfigurer les touches, attribuer les raccourcis ou encore régler la sensibilité des sticks. L’application est plutôt bien faite et, comme elle est intégrée dans l’écosystème PlayStation, évite d’avoir à passer par un PC.
On peut créer des dizaines et des dizaines de profils différents (un par jeu, par exemple), et en installer quatre en même temps dans la manette. Il suffira alors d’appuyer longuement sur l’un des boutons FN (situés sous les sticks) puis sur la touche correspondante pour sélectionner un profil. C’est simple et, surtout, ultra rapide.
La DualSense Edge, bien que pensée pour celles et ceux qui cherchent à maximiser les performances, est susceptible de faciliter la vie dans certains cas. Par exemple, on appréciera attribuer L3 et R3 aux deux raccourcis à l’arrière pour ne plus jamais avoir à appuyer sur les sticks (ce qui aidera leur longévité). Ce n’est qu’un infime détail, mais on ne peut nier le gain ergonomique. Dans un titre comme Elden Ring, certains déporteront les boutons de la croix directionnelle pour éviter trop de gymnastique des pouces quand on doit sélectionner un objet dans le feu de l’action.
À noter que la DualSense Edge ne perd rien par rapport à la DualSense normale en termes de technologies (retour haptique, gâchettes adaptatives, haut-parleur, microphone, gyroscope). En revanche, son autonomie est inférieure. On a eu du mal à dépasser les six heures en une seule charge lors de nos sessions (durée qui dépend de la manière dont les jeux sollicitent les technologies), alors que l’on peut espérer les dix heures sur la DualSense. Il s’agit d’une régression, puisque la DualShock 4 de la PlayStation 4 en était à ces standards. C’est surtout un vrai défaut face à la Elite Series 2, qui peut dépasser les 35/40 heures sans sourciller. À la décharge de la DualSense Edge, le public visé sera plutôt enclin à la laisser brancher pour des questions de performance. À ce titre, Sony fournit un accessoire pour que le long câble de près de trois mètres ne se détache pas.
La DualSense Edge est-elle faite pour vous ?
La réponse à cette question est probablement : non, en tout cas pour 95 % (voire 99 %) des propriétaires d’une PlayStation 5. Sony vise clairement une frange élitiste, en quête d’infimes avantages, pour aboutir à quelques infimes gains de performance dans une partie compétitive. Si vous n’entrez pas dans cette catégorie, alors l’excellente DualSense fera amplement l’affaire et, pour le prix d’une seule DualSense, vous aurez de quoi en acheter plusieurs pour tenir sur tout le cycle de vie de la PS5. Sony aurait peut-être dû en mettre un peu moins dans sa manette Pro, afin d’en faire un produit un peu plus abordable. En l’état, c’est vraiment très cher pour ce que c’est.
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