Le Copyright Madness revient cette semaine sur l’accusation de plagiat visant la chanteuse Taylor Swift, le cauchemar que constitue l’accord commercial TPP, la fermeture de plusieurs sites de sciences provoquée par Elsevier ou encore le problème d’une marque comme « Fuckoffee ». Bonne lecture, et à la semaine prochaine !
Copyright Madness
Trolls Gonna Troll. La chanteuse Taylor Swift apparaît cette semaine dans les colonnes du Copyright Madness. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce n’est pas elle qui incarne le rôle du plaignant. Elle nous avait pourtant habitué à quelques débordements, en déposant des titres et des paroles de ses chansons comme marque. Cette fois-ci, la star est accusée de plagiat par un chanteur de R’n’B américain. Ce dernier accuse la pauvre Taylor d’avoir volé des paroles d’une de ses chansons et lui réclame la somme de 42 millions de dollars en dédommagement. Ce qu’il lui reproche exactement, c’est d’avoir employé une phrase de 22 mots, incluant l’expression « Haters Gonna Hate » — presque passée dans le langage courant — dans le hit « Shake it Off » ! Ce chanteur ombrageux n’est pas simplement cupide, il souhaite aussi à présent que son nom apparaisse comme coauteur de la chanson. Il a raison, on ne rigole pas avec le droit moral !
Guerre du Pacifique. Une fuite sur Wikileaks nous avait déjà montré que le volet « Propriété Intellectuelle » de l’accord commercial TPP (Trans-Pacific Partnership) risquait d’être menaçant. La publication complète du texte cette semaine par les gouvernements des États-Unis et de Nouvelle Zélande révèle que nous avons en réalité affaire à un monstre épouvantable, pire qu’ACTA en son temps. Le texte (de 2000 pages !) prévoit en effet pour tous les signataires un allongement de la durée du copyright à 75 ans après la mort de l’auteur ; les hébergeurs pourront être obligés de retirer des contenus dès réception d’une notification de violation du copyright, sans possibilité de recours si la plainte n’était pas justifiée ; les possesseurs d’appareils électroniques ne pourront plus les jailbreaker ou les modifier sans se rendre coupables d’infractions et les ayants droit pourront même attaquer les États devant des tribunaux arbitraux s’ils estiment qu’ils ne protègent pas suffisamment leur propriété intellectuelle ! Si le TPP est adopté, il pourrait entraîner le monde entier dans un engrenage et avoir un impact sur le TTIP en cours de négociation entre les États-Unis et l’Union européenne…
https://twitter.com/fightfortheftr/status/662342982247534592
Pirates de la science. Partager la science, cela pourrait sembler une chose naturelle. Mais c’est loin d’être le cas… Un tribunal de New York a ordonné cette semaine la fermeture des sites Sci-Hub, Library Genesys et BookFi, qui donnaient accès gratuitement sur Internet à des centaines de milliers d’articles et d’ouvrages scientifiques. C’est Elsevier, le plus gros éditeur scientifique au monde qui a déposé plainte pour violation du droit d’auteur. Or les auteurs de ces contenus sont des chercheurs rémunérés par de l’argent public, mais qui cèdent leurs droits à des éditeurs qui revendent ensuite les articles aux universités, en amassant au passage une plus-value juteuse puisqu’ils ne payent pas les chercheurs ! Un site comme Sci-Hub avait pour objectif de libérer cette science privatisée, afin de la rendre accessible notamment aux chercheurs des pays du Sud où les universités n’ont pas les moyens de payer l’accès aux bases de données des éditeurs. Dans un monde normal, c’est Elsevier qui devrait se retrouver au tribunal pour vol !
Trademark Madness
Bullshit. Le Bureau de la Propriété Intellectuelle britannique s’est fait remarquer cette semaine en rejetant la demande de dépôt de marque d’un café londonien. En effet, il a refusé d’enregistrer la marque « Fuckoffee » parce qu’il manque la lettre « c » entre « fuck » et « offee ». Bien évidemment, il ne s’agit pas de la seule raison. Le Bureau considère également que la mention « Fuck » constitue une offense pour une partie importante des Britanniques. Comme une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, le patron du café a aussi reçu une lettre du propriétaire de l’immeuble qui l’exhorte à retirer l’enseigne « Fuckoffee ». Serait-ce donc cela le flegme britannique ?
Kebab. On a parfois tendance à l’oublier, mais les recettes ne peuvent pas être protégées par le droit d’auteur. Pour remédier à cela, certains restaurateurs vont user du droit des marques pour défendre leur précieux. C’est le cas notamment du restaurant King of Donair qui accuse Donair King de violation du droit des marques. Il faut tout de même noter que le plaignant se situe à Halifax au Canada et l’accusé est localisé en… Colombie ! King of Donair craint que la ressemblance des noms provoque une confusion chez les consommateurs qui pourraient éventuellement croire qu’il s’agit de la même chaîne. C’est à ce genre de choses qu’on voit que la paranoïa est une maladie grave ! Mais au fait, qu’en pense Robert Ménard ?
Patent Madness
Tête au carré. Le secteur des appareils photo est un marché très concurrentiel dans lequel chaque fabricant essaie de tirer son épingle du jeu. Les moyens mis en œuvre par certains d’entre eux leur ont permis de décrocher un ticket pour le Copyright Madness. Cette semaine, le fabricant Polaroid, qui commercialise une petite caméra portative, a annoncé qu’il poursuivait l’entreprise GoPro pour violation de brevet. Polaroid reproche à son concurrent d’avoir commercialisé une caméra… en forme de cube ! Le brevet détenu par Polaroid est pourtant très explicite. En 12 mots, il précise qu’il concerne une caméra dont le design est une forme cubique. A travers ce cas de Patent Madness, Polaroid rejoint le cercle très fermé des fabricants fous, comme Apple avec ses rectangles aux angles arrondis.
Gros poisson. Tous les mois, l’association américaine EFF décerne le prix du « Stupid Patent of The Month ». Cette fois encore, elle nous régale avec un brevet complètement idiot. La compagnie Precision Trolling Data (oui, c’est son vrai nom…) a déposé en 2003 un brevet intitulé « Marine Electronics With Lure Depth Analyzer ». En réalité, cette société éditait à l’origine un livre dans lequel elle recensait des informations sur les profondeurs auxquelles il faut placer un leurre pour attraper tel ou tel poisson. Son brevet porte simplement sur le fait de rendre accessible ces données par un ordinateur. Comme le fait remarquer EFF, si le simple fait de rendre des données accessibles par ordinateur est protégeable comme un invention, on n ‘est pas sortis de l’auberge ! Comme toujours, le plus incroyable dans ces histoires, c’est que ce brevet a pu être enregistré comme valide…
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