Voilà, c’est fini : il est temps de dire adieu à l’une des seules séries horrifiques actuelles, qui maniait l’art du suspense à la perfection. Avec cette saison 4, dont le dernier épisode est enfin disponible sur Apple TV+, le cinéaste M. Night Shyamalan met enfin un terme aux extravagantes péripéties de la famille Turner et de leur nounou, Leanne.
Un chapitre final très attendu, qui nous laisse mitigés, tant les ultimes minutes semblent calibrées pour nous emporter ou nous agacer, au choix.
Attention, cet article comporte des SPOILERS sur les 3 premières saisons de Servant.
Le retour d’une nounou d’enfer
Souvenez-vous : à la fin de la saison 3, nous laissions les Turner en mauvaise posture, alors que Dorothy était poussée dans le vide par une Leanne hors de contrôle, devant les yeux médusés de Sean, impuissant. La saison 4 nous propulse quelques mois plus tard. Dorothy est toujours vivante, mais doit rester clouée au lit, le dos détruit par sa chute implacable. Leanne, elle, dont les pouvoirs sont de plus en plus terrifiants, continue de s’occuper de Jericho, l’enfant de Dorothy et Sean, qu’elle a ramené d’entre les morts. La nounou du couple redoute d’être poursuivie par des membres de son ancien culte religieux, qui la poursuivent sans relâche.
Vous suivez toujours ? Tant mieux, puisque cette narration, déjà complexe et hautement improbable, monte encore d’un cran sur l’échelle de la pression avec de nouveaux personnages et des retours de têtes connues à la clé. Le moins que l’on puisse dire, c’est que Servant maîtrise l’art du suspense comme aucune autre série.
Une soirée entre voisins devient votre pire cauchemar
Dès le premier épisode de la saison 4, on retrouve tout ce qui fait la saveur de ce récit hors du commun. Si les intrigues poussives ont parfois terni l’ensemble de saisons inégales, la saison 3 sortait enfin du huis clos familial pour s’aventurer dans le monde extérieur avec succès. Ces 10 nouveaux épisodes s’inscrivent dans la même lignée. Une simple voiture devient alors un terrain de jeu horrifique idéal, la nuit d’Halloween prend une dimension encore plus macabre, une soirée entre voisins révèle nos pires cauchemars… Bref, Servant multiplie les lieux et les situations pour mieux nous clouer à notre canapé à chaque nouvelle idée créative.
Cette atmosphère étouffante est d’autant plus impressionnante que la série nous enferme dans un format de 30 minutes, habituellement réservé aux créations comiques. Servant utilise ainsi avec une habileté surprenante ce carcan télévisuel pour maintenir une tension constante, sans aucun temps mort. D’un point de vue visuel oppressant, Servant reste donc un sommet de maîtrise rarement vu sur le petit écran, y compris jusqu’à ses ultimes séquences.
Sainte Leanne, priez pour nous
Dans cette saison 4, c’est le personnage de Leanne qui devient véritablement le moteur de toute l’action. Si les épisodes précédents donnaient davantage de place et de pouvoir à Dorothy, c’est désormais la jeune femme qui mène totalement la danse. On aurait aimé davantage de cohérence sur ce terrain-là : dès la saison 1, Leanne tirait ses capacités surnaturelles de passages soigneusement choisis dans la Bible. Désormais, on assiste à une surpuissance qui frôle le ridicule. Mais, la tension nous captive tout de même, montant crescendo, tandis que Leanne atteint un point de non-retour dans l’envie de faire souffrir les autres.
Chaque épisode s’installe alors comme le nouveau tableau d’une pièce en plusieurs actes, tous plus horrifiques les uns que les autres. Mais, là où Servant prouve son génie, c’est justement dans sa capacité à ne jamais tomber dans l’épouvante facile, à coups de jump scares et autres musiques stridentes. Chez les Turner, l’effroi se dissimule plutôt derrière des cicatrices cachées, la préparation d’un gâteau, le grincement d’un parquet ou de simples lettres glissées sous une porte.
Le tout culmine d’abord à mi-saison, dans un épisode 5 mémorable, doté d’un sublime jeu de lumières et de contrastes, avec des plans qui sortent véritablement de l’ordinaire. Puis, vers l’épisode 8, les pouvoirs de Leanne prennent un tournant plus glaçant de jamais, notamment grâce à l’interprétation toujours impeccable de Nell Tiger Free (Game of Thrones). Dans cette dernière saison, la comédienne vole largement la vedette à ses partenaires de jeu, Rupert Grint (Harry Potter) et Toby Kebbell (Black Mirror). Seule Lauren Ambrose (Six Feet Under) peut rivaliser, grâce à une maîtrise impressionnante de ses émotions.
Un final génial ou décevant ?
Si vous êtes familiers avec le cinéma de M. Night Shyamalan, de Sixième Sens au Village en incluant Knock at the Cabin, sorti cette année, vous ne serez pas surpris que cette saison 4 remartèle ses thématiques favorites. Les idéologies de toutes sortes, d’autant plus lorsqu’elles sont de nature religieuses, sont ainsi à nouveau au cœur de Servant. À la fin de l’épisode 9, réalisé par M. Night Shyamalan lui-même, le cinéaste revisite, par exemple, la légende des anges et démons, postés sur nos épaules pour nous guider à travers nos choix de vie.
Il faut donc avoir une foi en béton pour les croyances mystiques afin de s’accrocher à ces nouveaux épisodes. Le final est en particulier assez éprouvant à cet égard. Nous ne dévoilerons pas ici le dénouement ultime, mais il divisera à coup sûr les fans de la série, tant le parti pris se révèle clivant. Si les dernières séquences nous semblent un peu précipitées et que l’on reste un brin sceptique par cette conclusion en demi-teinte, nous ne pouvons que regretter de devoir dire adieu à Servant. L’une des seules séries horrifiques actuelles tire ainsi sa révérence avec panache, certes, mais sa patte visuelle et narrative va grandement nous manquer.
Le verdict
Servant, saison 4
Voir la ficheOn a aimé
- Une réalisation vraiment originale
- Un casting exceptionnel
- Une grande maîtrise du suspense
- L’épisode 1, magistral
On a moins aimé
- Dire adieu à cette série
- Quelques incohérences
- Un final mi-figue, mi-raisin
Voici venu le temps de dire adieu à Leanne, Dorothy, Sean, Julian et Jericho. Cette fois, Servant nous quitte après une saison 4 à la réalisation exceptionnelle, malgré des contradictions narratives vraiment dommageables. On ne peut tout de même que saluer l’intelligence de cette série horrifique, qui nous a amusé autant qu’effrayé pendant toutes ces années. À l’heure actuelle, Servant était la seule à maîtriser aussi bien le dosage du suspense, le tout dans un format inhabituel de 30 minutes. Ces parenthèses d’épouvante vont donc nous manquer et nous laissent sur un final cohérent, mais qui ne mettra clairement pas tout le monde d’accord. Mais, après tout : c’est peut-être le signe d’une grande œuvre de fiction.
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