En 2021, le marché du DVD pesait 164,45 millions d’euros et 31,29 millions d’unités vendues. Ces chiffres, qui proviennent du baromètre CNC-GfK de la vidéo physique de 2021, témoignent de l’affection que semblent toujours porter les Français et Françaises aux DVD, dont on prédit pourtant la disparition depuis plusieurs années.
Il faut dire que les concurrents ne manquent pas. Entre les plateformes de streaming comme Netflix, Amazon Prime ou Disney + et les Blu-ray, le DVD a de sérieux concurrents. Toutefois, le DVD semble conserver une certaine avance. Le Blu-ray, que l’on pouvait s’attendre à voir dépasser le DVD, plafonne par exemple en 2021 à 7,89 millions d’unités vendues. C’est presque 4 fois moins que les DVD. Mais, alors, pourquoi le DVD parvient-il encore à s’attirer les faveurs des consommateurs en 2023 ?
Le DVD, un achat économique
On peut d’abord penser que le succès du DVD est dû à des raisons économiques. Pour un même film, le prix est souvent réduit par rapport à la version en Blu-ray. Par exemple, le DVD de One Piece : Red, le dernier film de la licence, est vendu à 22 €, quand le Blu-ray coûte 26,23 € dans sa version standard. Il n’y a que les plateformes de VOD qui proposent des prix d’achats inférieurs, allant de 7,99 € à 9,99 € pour l’achat du film. Parallèlement à ces prix de base, les commerçants font fréquemment des promotions sur les DVD qui datent ou qui sont très récents. Il est ainsi fréquent de trouver des DVD vendus à 10 €, voire moins. Pour le consommateur qui préfère les achats physiques, le DVD reste donc un moyen plus accessible d’obtenir un film ou une série.
En dehors de l’aspect économique, le DVD se démarque aussi du Blu-ray dans sa compatibilité avec différents appareils. Le second nécessite des équipements plus pointus et plus récents, ce qui est nettement moins le cas du premier. Le DVD est compatible avec une bonne partie des lecteurs et des téléviseurs utilisés par les Français, là où le Blu-ray exige des équipements plus spécifiques. Lorsqu’on sait que la durée de vie moyenne d’un téléviseur est de sept à huit ans en France, il est plausible de penser que les téléviseurs capables d’exploiter tout le potentiel des Blu-ray ne sont pas majoritaires dans les foyers français. Et, leurs prix parfois exorbitants n’arrangent rien.
Pour l’utilisateur, les DVD offrent surtout une qualité d’image et de son cohérente, là où les Blu-ray ne parviennent pas toujours à faire ressentir une différence flagrante de qualité, même avec des périphériques plus modernes. Pour les consommateurs, c’est une donnée très importante : « J’ai une télévision achetée en 2019, mais qui a une définition maximale de 720p. Je ne suis pas spécialiste, mais acheter un Blu-ray au lieu d’un DVD ne me rapporterait rien, puisque ma télé ne me permettrait pas d’en profiter », explique Solène, rencontrée au rayon DVD de la Fnac.
Le DVD, solution de sûreté
Plusieurs consommateurs interrogés sont dans le même cas que Solène. Mais, d’autres privilégient le DVD pour d’autres raisons, comme le catalogue proposé. Existant depuis 1995, le DVD permet aussi la diffusion de films parfois antérieurs à cette date. Les Enfants de Lumière, sorti la même année, n’est, par exemple, trouvable qu’en DVD. À ce jour, il n’existe encore aucune version du film en Blu-ray et il n’est proposé sur aucune plateforme de streaming légale, a pu constater Numerama.
Beaucoup d’autres films sont dans ce cas, comme l’explique Margaux Baralon, journaliste spécialisée dans le cinéma, interrogée par Numerama : « Aujourd’hui, certaines plateformes ont des contenus qu’elles peuvent sortir du jour au lendemain de leurs catalogues si elles le souhaitent. Et, si vous n’avez pas acheté le DVD, vous n’avez plus d’autres moyens de voir légalement » la série ou le film en question.
Pour appuyer ses propos, Margaux Baralon a pris l’exemple de la série Succession. Il est possible de trouver la saison 4 et les saisons précédentes sur Amazon Prime. Cela n’a pas toujours été le cas. « Pour voir la première saison de la série Succession de façon légale, à moins d’avoir le DVD chez soi, ce n’était pas possible. Il y a vraiment un enjeu autour de la préservation des œuvres. Il faut bien voir qu’aujourd’hui les DVD qui se vendent, ce sont beaucoup, beaucoup de vieux films ou séries, plus que de nouveautés. »
La volonté de ne pas dépendre des plateformes de streaming joue aussi un rôle important, selon la journaliste : « Aujourd’hui, le DVD est pour certains films vraiment le seul moyen d’arriver à les regarder, et ce, alors que l’on a une offre qui peut paraître pléthorique sur les plateformes. Mais, aujourd’hui, il y a des films que vous ne pouvez trouver nulle part. Donc, plutôt que d’attendre qu’une plateforme se décide à acquérir les droits de tel ou tel vieux western, vous avez tout intérêt à essayer de trouver des DVD. »
Derrière la survie, une stratégie marketing certaine
Pour les consommateurs, le DVD reste donc une alternative sérieuse par rapport au Blu-ray et aux plateformes de streaming, des alternatives pas nécessairement prisées par tous les cinéphiles. Ce sont souvent eux qui sont d’ailleurs les plus fidèles au format physique et plus particulièrement au DVD.
Ce n’est pas un simple caprice. Pour ces cinéphiles, les DVD ont une vraie plus-value. Ces passionnés possèdent des versions longues de films ou de séries, des bandes-annonces, des bêtisiers, des scènes coupées ou encore des making-offs, qui permettent de découvrir tout le processus de production d’une œuvre. Une source de contenu non négligeable pour les consommateurs les plus passionnées, qui ont là l’opportunité d’en savoir plus sur leurs films favoris. L’existence de coffrets et de livrets spéciaux donne également une valeur importante au DVD.
Les éditeurs et les magasins en ont fait une réelle stratégie marketing, d’après Margaux Baralon : « On voit que c’est vraiment un marché pour cinéphile passionné. Même si les ventes [globales] baissent, on continue de vendre à une niche. »
Paradoxalement, il faut aussi souligner que malgré son ancienneté, le DVD reste plus vendeur que le Blu-ray. Ce dernier a longuement peiné à convaincre le grand public. Au début de sa commercialisation en 2006, rares étaient les personnes parvenant à détecter une différence de qualité sensiblement importante par rapport au DVD, à tel point que le Blu-ray n’a jamais vraiment réussi à remplacer le DVD.
Au fil des années, le DVD devient de plus un objet de collection, comme le fait Hugo, de passage à la Fnac pour acheter quelques DVD : « J’ai toujours aimé acheter des DVD, peut-être parce que mes parents le font depuis que je suis tout petit. J’aime bien faire grandir ma collection. »
L’idée de collectionner l’objet un peu « ancien » qu’est devenu le DVD permet aussi aux enseignes de continuer à faire survivre ce support. Et, selon Margaux Baralon, c’est une vraie tradition chez les cinéphiles : « Il y a vraiment l’ambition de se forger une DVDthèque de la même manière que l’on se forge une bibliothèque. Je lis sur tablette, mais j’aime posséder les livres physiquement parce que ce sont des objets qui vous définissent un peu aussi chez vous et ça, c’est important, cette envie de possession de l’objet physique qui compte. »
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