Chaque samedi, c’est la compilation de l’actualité de la propriété intellectuelle et de ses dérives, concoctée par Lionel Maurel et Thomas Fourmeux.

Le Copyright Madness revient cette semaine sur DC Comics qui veut protéger l’image de la Batmobile, Moulinsart qui met la pression sur un graphiste qui détournait Tintin, l’attitude plus que douteuse du gouvernement équatorien ou encore les risques pesant sur le cosplay aux USA. Bonne lecture, et à la semaine prochaine !

Copyright Madness

Hacker. Le site TorrentFreak nous rapporte que le MIT est l’un des plus gros contrefacteurs du web à cause de sa plateforme Scratch. Scratch est une plateforme open source s’adressant aux enfants pour leur apprendre les rudiments de la programmation informatique. Les utilisateurs peuvent ainsi créer et remixer des jeux vidéo ou des animations et les partager avec l’ensemble de la communauté. Plus de 12 millions de projets ont déjà été mis en ligne sur la plateforme. Mais la British Phonographic Industry (BPI) a mis son nez dans ce nid à pirates et a constaté que des fichiers audio sous droits étaient utilisés dans certaines créations. Google a d’ailleurs recensé plus de 40 000 signalements pour violation de droits d’auteur concernant l’adresse de la plateforme Scratch. Il s’agit pourtant de contenus créés par des enfants à des fins d’éducation, sans aucun but lucratif ! Visiblement pour la BPI, le fair use n’existe pas.

Super-héros. Il y a des trolls du copyright qui n’ont honte de rien et ne cachent pas leur désir de gagner beaucoup d’argent avec la propriété intellectuelle. C’est le cas notamment de DC Comics, en procès depuis plusieurs années contre un garagiste qui a eu la mauvaise idée de commercialiser des voitures customisées en batmobiles. DC Comics est propriétaire de la licence Batman et entend le faire savoir. Après avoir traversée différentes juridictions, l’affaire se poursuit désormais jusqu’à la Cour suprême. Selon DC, la batmobile est un personnage motorisé. Évidemment, c’est tellement logique. KITT dans K2000 est aussi un personnage motorisé. Et ne parlons pas des Transformers. C’est avec cet argument fallacieux que DC Comics essaie de convaincre les juges. Le garagiste tente de faire entendre raison en démontrant qu’il s’agit plutôt d’un objet pratique, qui de ce fait ne peut être protégé par le copyright. Le plus fou dans cette histoire, c’est que le bureau du copyright a déjà estimé le copyright ne peut s’appliquer à des véhicules…

Moulinsart, le retour. Cela faisait quelques temps que nous n’avions pas parlé de la société Moulinsart dans le Copyright Madness. On constate que l’entreprise qui gère les droits de Tintin n’a pas pris de bonnes résolutions en 2016. Une fois de plus, Moulinsart n’a pas supporté un usage transformatif du petit journaliste à houppette. Sur Facebook, un jeune graphiste publiait régulièrement des détournements de Tintin dont le seul but était de rire et de faire rire. Il n’a jamais prétendu vouloir monétiser son travail. Il avait même pris contact avec Moulinsart, qui l’avait autorisé à réutiliser les dessins d’Hergé. Mais la fête est finie : les ayants droit lui ont expressément demandé de supprimer les détournements de sa page Facebook. Encore une fois, on se rend compte de l’urgence de repenser en profondeur le système pour garantir un droit au remix !

Équatorial. L’Équateur est l’un des pays où la liberté de la presse est extrêmement malmenée par le gouvernement, qui fait pression sur les journalistes osant critiquer sa politique. Or celui-ci a trouvé une combine pour détourner le droit d’auteur à des fins de censure. Le gouvernement passe par le cabinet Arès Rights, implanté en Espagne, pour envoyer des plaintes pour violation du droit d’auteur à des sites de presse indépendants, lorsqu’ils utilisent des photographies ou des documents officiels pour illustrer leurs articles. Ce petit jeu dure depuis 2011 et Arès Right aurait ainsi envoyé plus de 186 plaintes à la demande de politiciens et d’organismes gouvernementaux équatoriens. Et pour que ces menaces soient encore plus efficaces, Arès Rights s’appuie sur le DMCA, la loi américaine sur l’application en ligne du copyright. Magie de la mondialisation !

Equatorien

CC Mor

Bas les masques ! La Cour suprême des États-Unis va bientôt examiner une affaire dont l’issue pourrait bien rendre illégale la pratique du cosplay dans ce pays. La jurisprudence est en effet plus que confuse sur cette question. Normalement, la loi américaine considère les déguisements comme des « articles utiles », qui ne peuvent être protégés par le copyright. Mais certaines cours ont admis une protection, lorsque des éléments esthétiques sont « détachables » de la forme utilitaire du vêtement. Mais pour appréhender ce caractère « détachable », les juges ont imaginé dix théories différentes, ce qui rend les choses effroyablement complexes et incertaines. L’affaire que la Cour suprême va devoir trancher concerne un plagiat de costume de pom-pom girl. Mais tous les cosplayeurs des États-Unis peuvent commencer à retenir leur souffle…

Bruitages. Nous vous parlons régulièrement dans le Copyright Madness des déboires des youtubeurs, qui doivent faire face à la surveillance de ContentID, le « Robocopyright », qui scanne en permanence le contenu de la plateforme pour repérer des infractions au droit d’auteur. L’un d’entre eux, un virtuose du jeu Guitar Hero, a trouvé un moyen original de duper le système automatique de filtrage : il a bruité sa dernière vidéo entièrement à la bouche, en reprenant note à note un morceau d’Ozzy Osbourne ! Pour l’instant, ContentID n’y a vu que du feu et n’a pas shooté la vidéo. Mais le pire, c’est que malgré ce stratagème le youtubeur est encore dans l’illégalité, car fredonner une musique constitue toujours une contrefaçon (ps : et ce serait pareil en langage des signes !).

Trademark Madness

Tout de mème ! C’est désormais un phénomène récurrent : lorsque des mèmes créés sur Internet rencontrent du succès, ils finissent par attirer les convoitises. Et certains n’hésitent pas à se les approprier en déposant des marques. C’est ce qui est en train de se produire pour le mème « Be Like Bill », inventé par l’Italien Eugeniu Croitoru. Il s’agit d’un petit personnage en bâtonnets qui fait beaucoup rire les internautes sur Facebook. La page lancée par Croitoru compte déjà plus de 1,5 million de fans et les reprises du mème sont légion. Mais un dépôt de marque a été effectué en Angleterre par deux individus, qui cherchent à s’en réserver l’exclusivité pour vendre toute sorte de produits dérivés. Croitoru va donc devoir se lancer dans une longue et complexe croisade pour récupérer ce qu’il a pourtant inventé…

Patent Madness

Géométrie. Apple a récidivé avec un dépôt de brevet surprenant. Après les rectangles arrondis, le géant de la high-tech a déposé un brevet sur des capteurs photo. Mais il ne s’agit pas de n’importe quel type de capteurs. En effet, il s’agit de capteurs courbes. Hé bien oui, cela change tout. Si vous pensiez que c’est une stratégie pour pouvoir attaquer des concurrents sur la forme de capteurs photos, vous vous trompez complètement. Apple a déposé ce brevet pour pouvoir améliorer vos photos en captant mieux la lumière. Vous voyez vraiment le mal partout !

Le Copyright Madness vous est offert par :

Lionel Maurel

Thomas Fourmeux

Merci à tous ceux qui nous aident à réaliser cette chronique, publiée sous licence Creative Commons Zéro, notamment en nous signalant des cas de dérives sur Twitter avec le hashtag #CopyrightMadness !

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