Le premier épisode de la nouvelle saison de Black Mirror, la célèbre série dystopique de Netflix, mettait en scène l’avenir sombre… des plateformes SVOD. Non sans ironie, Joan is awful (Joan est horrible en VF) dresse le portrait d’une femme dont la vie toute entière est transformée en série TV. En cause : elle n’a pas lu les mentions légales de Streamberry — la fausse plateforme SVOD similaire à Netflix — avant de s’y inscrire.
Comme pour poursuivre la satire dans la vraie vie, le compte Twitter de la série vient de révéler un nouveau site : You Are Awful (Vous Êtes Horribles). Cette plateforme, qui copie les codes de Netflix, est ouverte à l’inscription.
« Vous êtes horribles », comme dans Black Mirror
Streamberry vous demande d’abord votre nom :
Puis vous devez uploader une photo :
Ensuite, c’est simple : il « suffit » de consentir à livrer votre image à Streamberry et à dire que vous avez lu et approuvé les termes. Il « suffit » : combien d’entre nous ont déjà validé ces termes sans jamais les lire ? C’est là tout le propos de cet épisode. Et si, pour une fois, on prenait le temps de les lire ?
Pour ce faire, il faut cliquer sur le lien Terms of Service and Privacy Statement. À la cinquième page, la section Name and Likeness est particulièrement intéressante :
« En interagissant avec cette Expérience, vous accordez à l’entité Netflix qui vous fournit cette Expérience, à ses affiliés et successeurs et ayants droit respectifs et à toute personne autorisée par l’un d’entre eux (collectivement, » Netflix « ), le droit irrévocable, perpétuel, mondial et non exclusif d’enregistrer, de représenter et/ou de faire votre portrait et d’utiliser, et d’accorder à d’autres le droit, mais non l’obligation, d’enregistrer, de représenter et/ou de faire votre portrait et d’utiliser, votre image réelle ou simulée, votre nom, votre photographie, votre voix, vos actions, etc. dans le cadre du développement, de la production, de la distribution, de l’exploitation, de la publicité et de la promotion de cette Expérience, dans tous les médias connus à ce jour et conçus ultérieurement, et dans toutes les langues, tous les formats, toutes les versions et toutes les formes liés à cette Expérience, sans compensation pour vous ou pour toute autre personne, sauf si la loi l’interdit. »
Résumons : comme dans l’épisode, il s’agit de livrer l’intégralité de votre image, pour toujours et sous toutes ses formes, que le service peut alors utiliser sous un format réel ou simulé pour du contenu.
Dans l’épisode Joan is awful, on apprend que Joan n’était en vérité qu’un premier test : Streamberry envisageait de produire une série basée sur la vie de chaque utilisateur et utilisatrice de la plateforme. Ce qui est possible, car chacun et chacune a accepté les termes, en consentant donc que cette série soit produite. Et bien sûr, sans la moindre rémunération, ce qui est là encore dans le contrat d’utilisation.
Même si ce site de Streamberry n’est autre d’une opération promotionnelle liée à Black Mirror, et que (a priori) Netflix ne va pas faire de vous un avatar pour une série TV, l’expérience reste perturbante : la leçon de l’épisode n’est-elle pas justement qu’il ne faut pas aller au bout en consentant à l’aveugle ?
Si l’on va au bout de l’expérience — avec une photo floue histoire que notre future série Streamberry soit inexploitable (oui, on joue le jeu au premier degré) –, le faux service SVOD Streamberry crée une page à votre image, comme dans l’épisode de Black Mirror. Avec votre prénom, suivi de « is awful ». Tenterez-vous l’expérience ou refuserez-vous d’accepter les termes ?
Sur son compte Twitter, Netflix France a même changé son nom, son logo et sa bannière pour se renommer « Streamberry ».
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