Le Copyright Madness revient cette semaine sur les tatouages problématiques de Lebron James, sur les lobbyistes qui s’opposent aux exceptions de droit d’auteur pour les aveugles et aussi sur la fâcherie qui oppose Ubisoft et Electronic Arts. Bonne lecture, et à la semaine prochaine !
Copyright Madness
Dans la peau. Les tatouages reviennent régulièrement dans le Copyright Madness, mais l’affaire suivante est la plus grave que nous ayons vue. On connaissait en effet déjà les trolls des brevets, mais voici que les trolls des tatouages font leur apparition. Une société américaine s’est en effet montée pour gérer les droits d’auteur des tatoueurs qui réalisent des motifs sur la peau de grands sportifs américains. Elle attaque en justice Take Two Interactive et Visual Concepts, les éditeurs du jeu NBA2K pour avoir fait apparaître des copies de tatouages sur les avatars de stars du basket comme LeBron James ou Kobe Bryant (alors qu’ils étaient d’accord de leur côté pour apparaître dans le jeu…). De quoi réfléchir avant de se faire faire un tatouage, car après vous aurez le copyright dans la peau et elle ne vous appartiendra plus vraiment !
30 millions d’amis. On pensait être définitivement débarrassé de l’affaire du selfie du singe, mais ce n’est toujours pas terminé. Fin janvier, la justice américaine a déclaré qu’un animal ne pouvait pas être considéré comme un auteur. Le singe est certes très proche de l’homme, mais cela ne suffit pas à faire de lui un auteur. Cette décision n’a pas suffi à calmer la PETA, qui cherche à défendre les intérêts du singe Naruto. Après cette défaite cuisante, l’association de protection des animaux revient à la charge en expliquant qu’elle va certainement déposer une autre plainte pour exiger des dommages et intérêts au nom de Naruto. La suite au prochain épisode. Mais nous espérons secrètement que les titulaires de droits du manga Naruto attaquent la PETA pour violation de copyright.
Aveuglement. En 2013, l’OMPI a adopté le traité de Marrakech, qui prévoit de généraliser au niveau mondial des exceptions au droit d’auteur en faveur des personnes souffrant d’un handicap visuel, afin qu’elles puissent obtenir des œuvres adaptées. L’Union européenne est en train d’examiner la ratification de ce traité et, si elle l’accepte, il pourra entrer en vigueur. Mais les lobbyistes de la propriété intellectuelle agissent pour faire barrage, prétextant que ces exceptions constitueraient pour les handicapés un « privilège injustifié » (sic). Et ils ont réussi à convaincre l’Allemagne et le Royaume-Uni de bloquer le processus. Encore une belle preuve du maximalisme dans lequel peuvent sombrer par idéologie les promoteurs de la propriété intellectuelle !
Trademark Madness
Réaction en chaîne. Les Fines Brothers sont deux frères qui ont popularisé sur YouTube le concept des vidéos de réaction, dans lesquelles ils filment des personnes en les faisant réagir à diverses choses. Partis de ce concept, ils l’ont décliné très largement en « Kids React », « Teens React », « Elders React », etc. Mais l’idée leur est venue de chercher à franchiser ce format pour proposer des licences payantes à ceux qui voudraient les imiter. Et pour verrouiller les choses, ils ont également déposé une série de marques, dont une sur le terme « React » lui-même. Cette initiative leur a valu de déclencher une véritable tempête de protestations et de perdre plusieurs centaines de milliers d’abonnés sur leur chaîne. On a aussi appris au passage que les deux frères avaient déjà commencé à envoyer des demandes de retrait à d’autres chaînes postant des vidéos de réaction. Le problème, c’est que ce format existait déjà depuis des lustres avant eux sur YouTube et que nul ne devrait pouvoir se l’approprier. Un peu comme si quelqu’un cherchait à avoir un monopole sur les « Draw My Life » ou les « Top 10 » ! Heureusement, les Fines Brother ont préféré abandonner leur projet devant la colère des internautes…
Casper. Dans certains cas de Trademark Madness, les consommateurs ont bon dos. On apprend cette semaine qu’un différend oppose deux sociétés du jeu vidéo, Ubisoft et Electronic Arts, à propos du mot « ghost ». Electronic Arts a tenté de déposer de le déposer en marque et cela n’a pas été apprécié par le concurrent Ubisoft. Ce dernier explique que ce dépôt de marque pourrait porter atteinte à la série de jeux d’infiltration Ghost Recon, qui existe depuis 2001. Selon Ubisoft, l’utilisation de la marque « ghost » par Electronic Arts pour des jeux de course pourrait induire en erreur les consommateurs. Mais évidemment, tout cela est source de confusion. Vous voulez acheter un jeu d’infiltration et subitement, au moment de passer à la caisse, vous vous retrouvez avec un jeu de voiture dans les mains !
Mauvais joueur. Alors qu’il se proclamait d’avance grand gagnant, Donald Trump a finalement perdu dans l’Iowa face à Ted Cruz. Mais il s’est empressé de dénoncer une fraude électorale qui aurait permis à son adversaire de l’emporter. Ted Cruz a choisi de réagir par la dérision en parlant d’un « Trumper Tantrum » (« temper tantrum » voulant dire « gros caprice de gamin » en anglais). Ce terme s’est instantanément transformé en hashtag hyper-populaire sur Twitter. Or Trump va peut-être contre-attaquer… à sa manière ! Il a déclaré lors d’une émission de TV qu’il songeait à déposer une marque sur « Trumper Tantrum »… Il faut peut-être le prendre au sérieux, car l’exubérant candidat républicain est un fanatique du dépôt de marques : il a déjà enregistré son propre nom, ses slogans de campagne et même « Central Park » (bien que personne ne sache pourquoi…).
Patent Madness
Médaille d’or. Chaque mois l’Electronic Frontier Foundation décerne le prix du brevet le plus stupide. En ce mois de la chandeleur, le prix a été attribué à la société Xerox pour son brevet sur un réseau social de partage de documents physiques. On assiste une fois de plus à un cas de dépôt de brevet sur des choses existantes en employant des termes confus pour faire croire qu’il s’agit d’une véritable invention. En d’autres termes, Xerox a déposé un brevet sur… les bibliothèques ! Les établissements de prêts de documents physiques correspondent tout à fait à la description absconse du brevet de Xeorx ! ;-)
Chez nous aussi. Des géants comme Monsanto sont régulièrement accusés de biopiraterie, cette pratique douteuse consistant à s’approprier des connaissances médicinales traditionnelles en déposant des brevets sur les propriétés des plantes. Mais il semble que ces dérives aient aussi cours dans la recherche française. L’institut de recherche pour le développement (IRD) est pointé du doigt pour avoir déposé plusieurs brevets sur un arbuste tropical, le quassia amara, aux vertus médicinales et insecticides. Des juristes et associations dénoncent l’accaparement des savoirs traditionnels des peuples autochtones de Guyane et leur spoliation. Et visiblement, la biopiraterie serait pratiquée à plus grande échelle dans les laboratoires de recherche en France…
Le Copyright Madness vous est offert par :
Merci à tous ceux qui nous aident à réaliser cette chronique, publiée sous licence Creative Commons Zéro, notamment en nous signalant des cas de dérives sur Twitter avec le hashtag #CopyrightMadness !
+ rapide, + pratique, + exclusif
Zéro publicité, fonctions avancées de lecture, articles résumés par l'I.A, contenus exclusifs et plus encore.
Découvrez les nombreux avantages de Numerama+.
Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci
Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.
Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :
- 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
- 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
- 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.
Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.
Marre des réseaux sociaux ? Rejoignez-nous sur WhatsApp !