Pour essayer de comprendre un peu la déferlante Baldur’s Gate 3, il faut d’abord s’intéresser à ses créateurs, Larian Studios, un studio belge fondé il y a vingt-sept ans. Ce n’est pas n’importe quel studio. Depuis sa création, le développeur n’a eu de cesse de prouver son amour pour le jeu de rôle, en créant notamment l’une des séries de RPG modernes les plus plébiscitées de tous les temps : Divinity.
Les deux derniers épisodes en date, et particulièrement Divinity Original Sin 2 sorti en 2017, ont marqué les joueurs et la critique par un niveau d’écriture incroyable, des aventures mémorables et une rejouabilité presque infinie, tant les possibilités qui s’offrent aux joueurs sont multiples. Chez Larian, on aime les jeux qui peuvent prendre plusieurs centaines d’heures, et où personne ne vivra jamais la même aventure que le voisin. Et c’est précisément pour cette expertise que le studio était attendu au tournant en développant Baldur’s Gate 3, troisième épisode d’une série presque aussi vieille qu’Édouard Balladur. À soixante-neuf ans près.
Baldur’s Gate 3, c’est un peu le rêve mouillé de nombreux fans de JDR papier. Ce fantasme de prendre part à une grande aventure et de se faire raconter des histoires, en sachant que la seule bonne décision sera celle qu’on choisit de prendre. Passer un combat en usant de son charisme pendant un dialogue, voler une clé à un personnage pour éviter complètement une quête, assassiner le PNJ qui nous donne la quête ou parler aux animaux si nos pouvoirs le permettent… Une même quête donne généralement lieu à une myriade de solutions et d’issues possibles, l’imagination des joueurs étant le seul moteur pour avancer dans l’aventure.
La création de personnage en elle-même a déjà de quoi vous occuper un bon moment. Avec ses onze races, douze classes et quarante-six sous-classes, elle est directement basée sur les règles de Donjons & Dragons pour permettre aux nouveaux venus de forger un personnage qui leur correspond (jusqu’aux parties génitales). Qu’on veuille jouer la mêlée, les armes à distance, la furtivité, les sorts, le charme ou la nécromancie, il y en a pour tous les goûts. Le jeu propose même de définir une histoire, voire de faire du multi-classe pour mélanger deux arbres de compétences distincts et ainsi imaginer des combinaisons originales. Un homme-dragon avide d’or, qui connaît les plantes sur le bout des doigts et méprise les humains — c’est possible si vous en avez envie.
Et des aventuriers, il y en a quatre dans un groupe : on peut jouer à Baldur’s Gate 3 avec 3 amis qui occuperont chacun une place, ou partir en solitaire avec des compagnons contrôlés par l’IA — chacun avec leur histoire et leurs motivations distinctes. Dans ce cas-là, on contrôle les quatre personnages lors des combats et on utilise leurs différentes capacités pour se sortir des situations délicates. Une fois de retour à l’exploration, ils prendront part aux discussions, se lieront d’amitié et pourront être à l’origine de romances. Rarement dans un jeu de rôle a-t-on vu des personnages qui semblent aussi vivants, et dont la personnalité affiche des nuances, des émotions et des sautes d’humeur. Rarement a-t-on eu l’impression de parler avec de vraies personnes, en fait.
Quand on est largué dans un monde aussi riche, les possibilités peuvent clairement intimider. Déjà par la simple durée de vie du jeu annoncée : environ 80 heures pour l’histoire principale et plus de 200 si vous décidez d’attaquer quêtes et zones secondaires. Ça fait beaucoup de larges zones à explorer, avec des centaines de personnages, d’événements et de trésors cachés dans les recoins d’une forêt maudite, au fond d’une grotte lugubre ou dans une ville foisonnante. Mais c’est surtout quand on réalise le nombre d’approches pour un seul problème que le cerveau commence à chauffer un peu.
Prenons l’exemple d’une simple porte, celle qui vient juste après le didacticiel du jeu, dans les quinze premiers mètres de l’aventure. Elle est fermée, et tout bon aventurier a envie de savoir ce qu’il y a derrière. On peut tenter de la crocheter, ou de la détruire à grands coups de marteau. On peut aussi la contourner, et réaliser qu’une trappe située en haut de la montagne permet de descendre à l’intérieur d’une crypte, contenant plusieurs sarcophages, des pièges et un groupe de bandits. Le groupe de bandits en question réagit de différentes façons à l’approche des aventuriers. Il est possible de les surprendre en passant par une porte cachée, de casser le plafond en faisant tomber un rocher dessus, ou de les tuer. Et cette simple porte qui vous a déjà pris trois heures de votre temps représente environ 5 % de la toute première zone du jeu. Il y a de quoi avoir le vertige.
Il y a tout de même certaines choses qui peuvent surprendre lors des premières heures de jeu de Baldur’s Gate 3, surtout quand on s’attend à y trouver un RPG moderne. Puisque la formule se base sur le dernier livre de règles de Donjons & Dragons, elle utilise aussi ses règles bien connues des fans de JDR. Impossible de spammer les sorts, par exemple : ils occupent des emplacements en nombre limité que l’on doit recharger en effectuant un repos (long ou court) avec son groupe. Et lors des longs repos, les aventuriers établiront un camp et discuteront avant de dormir dans des paillasses pour repartir le lendemain. C’est exactement ce que l’on ferait dans une partie de jeu de rôle classique.
Les règles peuvent être un peu déroutantes, notamment l’équilibre entre phases de jeu en temps réel et tour par tour. Mais, promis, Larian a fait un incroyable travail d’accompagnement des nouveaux joueurs et il est possible de s’y retrouver même si on n’a jamais joué à un CRPG de sa vie ou qu’on ne s’est jamais essayé au jeu de rôle. Là est la plus belle réussite de Baldur’s Gate 3 : donner constamment au joueur l’impression de prendre part à une épopée qui le dépasse, où l’aventure finira inéluctablement par partir en vrille quand l’un des membres du groupe fera un mauvais jet de dés. On finit toujours par retomber sur ses pattes et on se remémore alors les mauvaises passes avec humour, comme des souvenirs gravés à jamais dans notre vie de joueur.
Certes, le jeu vient de sortir, et il vous faudra certainement un peu de temps pour en venir à bout. Mais ce n’est pas un jeu dont il faut avoir peur, et je vous promets que vous ne regretterez pas d’y mettre les pieds.
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