Dans la vie, il y a souvent deux manières d’aborder les choses. Soit on se place dans le camp des enthousiastes, en prenant le risque d’être déçus (souvent, on cache la déception pour sauver les apparences). Soit on fait partie des éternels pessimistes, d’aucuns diraient aigris, avec pour principal bénéfice la découverte d’excellentes surprises. J’ai tendance à détester avant d’aimer et quand un jeu vidéo adapté du film RoboCop, cher à mon cœur, a été annoncé, j’ai d’abord fait montre de beaucoup de scepticisme.
Les craintes se sont un peu dissipées lors d’une première entrevue à la gamescom 2023. RoboCop: Rogue City, développé par Teyon (à qui on doit la piètre adaptation de l’univers Terminator), convainc dès les premières minutes. Pour une raison toute simple : le studio a parfaitement compris et digéré ce qu’était RoboCop, pondant alors un gameplay au diapason pensé pour faire plaisir aux fans. Tout n’est pas parfait, mais voir un tel projet casse-gueule s’épanouir est déjà une belle victoire en soi.
Points forts
- Un gameplay adapté au héros
- La violence graphique respectée
- Adaptation fidèle
Points faibles
- Un jeu qui veut parfois trop en faire
- Visuellement assez vilain
- Il faut aimer RoboCop
RoboCop: Rogue City ne trahit pas son héritage
Les événements de RoboCop: Rogue City se situent après ceux du deuxième film (réalisé par Irvin Kershner, l’homme derrière le meilleur Star Wars) — une bonne manière de faire comme si le troisième n’existait pas. Detroit est toujours une ville dans laquelle on n’a pas envie de mettre les pieds. La drogue et le crime gangrènent les rues et un individu mystérieux — frère d’un personnage vu dans le premier film — arrive pour faire davantage régner la terreur. Heureusement, on pourra toujours compter sur RoboCop pour rétablir l’ordre, avec un recours à la violence sans limite.
On ne pourra pas attaquer RoboCop: Rogue City sur l’authenticité, sauf à être nostalgique de la satire imaginée à l’origine par Paul Verhoeven. Le jeu vidéo se veut beaucoup plus simpliste, mais s’appuie tout de même sur une narration à souligner. Il y a notamment un bon travail sur la « conscience » du héros, qui connaît des bugs en raison de sa vie d’avant (quand il était un policier). On aura carrément l’occasion de choisir certaines lignes de dialogue pour influencer la manière dont les autres nous perçoivent, ainsi que la fin du jeu (comme dans les titres de Bethesda). RoboCop: Rogue City sait donc aller un peu plus loin que l’action sans concession.
Il est simplement dommage de constater que la réalisation ne suit pas toujours. Alors que RoboCop: Rogue City est animé par le moteur Unreal Engine 5, censé être l’outil de demain, il affiche parfois des lacunes dignes d’hier. Il est même assez vilain visuellement et trahit un manque certain de budget (on ne compte plus le nombre de bugs sonores).
Les fans apprécieront le torrent d’hémoglobine digne de la puissance qui émane de RoboCop. Les membres, les têtes et même l’entrejambe explosent au contact des balles qui sortent de son arme. Dans RoboCop: Rogue City, on passe la plupart de son temps à repeindre les murs avec le sang des criminels. Car la violence engendre la violence.
RoboCop: Rogue City est aussi un immense contre-pied
Quand on regarde le genre FPS à l’heure actuelle, on se rend compte que ses représentants les plus récents sont nombreux à axer le gameplay sur la rapidité. Il suffit de regarder Doom Eternal, un jeu ultra dynamique où tout va très vite. Double-saut, wallride, nécessité de bouger tout le temps, verticalité exploitée… Les jeux de tir épousent plus ou moins ces piliers pour être considérés comme modernes. RoboCop: Rogue City n’a pas du tout le morphotype de ses congénères. Il prend en réalité le contrepied de tout ce qui a été cité, avec un rythme très lent qui correspond à l’idée qu’on se fait d’incarner une machine lourde et surarmée.
RoboCop n’est même pas en capacité de sauter ou de courir. On ressent à chaque seconde la lourdeur d’une carcasse composée de métal. En résultent des sensations assez inédites, qui transforment RoboCop: Rogue City en shooter sur rails, la barre de vie du héros étant rarement un souci (il faut faire attention quand même, en activant les objets de soin au bon moment). Certains diront que c’est une simulation de massacre et il y a du vrai : RoboCop n’est pas du genre à poser des questions quand il faut faire régner la Loi.
Pour éviter de transformer l’expérience en épreuve répétitive, Teyon ose aller piocher des éléments d’un autre genre : le RPG. Alors que les missions principales de RoboCop: Rogue City démarrent toujours par un briefing, elles s’avèrent ensuite moins rectilignes qu’on ne pourrait le croire. En plus de l’enquête qui sert de fil rouge, il sera possible de remplir des tâches annexes, qui vont de la quête secondaire bien ficelée au respect des contraventions (vous avez toujours rêvé de coller une amende à une voiture mal garée ?). Tout cela dans l’objectif de gagner des points d’expérience pour faire évoluer les aptitudes de RoboCop, sachant qu’on peut aussi personnaliser son arme via un petit puzzle bien pensé.
Tous ces éléments si différents qui s’accumulent font de RoboCop: Rogue City un titre d’une richesse parfois maladroite, tant il a parfois du mal à tout assumer. Il n’en demeure pas moins qu’un vrai charme émane de cette proposition qui a le mérite de ne pas se contenter du basique pour surprendre (il y a même des phases d’enquête). Cela offre aux joueuses et aux joueurs des moments de calme qui permettent de souffler entre deux tueries de masse dans des environnements ternes et assez peu travaillés. C’est malin pour qui voudrait cacher — un peu — la misère. Franchement, ça aurait pu être pire.
Le verdict
RoboCop: Rogue City
Voir la ficheOn a aimé
- Un gameplay adapté au héros
- La violence graphique respectée
- Adaptation fidèle
On a moins aimé
- Un jeu qui veut parfois trop en faire
- Visuellement assez vilain
- Il faut aimer RoboCop
Loin d’être parfait, RoboCop: Rogue City est surtout loin d’être la catastrophe annoncée. Cette adaptation de la saga culte a presque tout compris de l’essence du personnage et de son univers. On lui pardonnera l’absence de satyre, tant le gameplay est en totale adéquation avec l’idée que l’on se fait d’incarner un héros mi-homme mi-machine. On a vraiment l’impression de jouer un tank, dans une violence graphique qui rappelle le chef-d’œuvre de Paul Verhoeven.
RoboCop: Rogue City se permet aussi quelques fantaisies en mélangeant les genres. Bien loin du FPS bourrin, il offre quelques libertés aux fans en leur permettant d’arpenter les ruelles malfamées de Detroit. Il y aura forcément une notion de plaisir coupable pour pardonner les quelques maladresses d’un studio qui s’efforce de bien faire. C’est toujours mieux que de regarder le dernier film de la trilogie initiale.
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