Autant l’avouer tout de suite : on attendait Un meurtre au bout du monde comme l’on trépignait autrefois d’impatience en guettant ses cadeaux, la veille de Noël. Mais l’on avait peut-être mis la série sur un piédestal, et l’âme d’enfant en nous s’est vite retrouvée déçue en constatant que, sous le sapin, les beaux emballages laissaient place à une simple clémentine et du chocolat. Voilà l’effet produit par ces 7 épisodes, qui seront disponibles au compte-goutte, chaque mardi, sur Disney+.
Alors, pour éviter la déception que nous avons connue en découvrant cette saison 1, nous vous conseillons vivement de baisser vos attentes : non, Un meurtre au bout du monde n’est malheureusement pas à la hauteur de The OA, sortie sur Netflix en 2016. Si elle parvient à nous surprendre, ce n’est pas tant grâce à son mystère enneigé, mais plutôt dans sa façon de s’éloigner justement de tout ce qui faisait le sel de l’OVNI fantastique que l’on avait tant aimé.
Bye bye Netflix, bonjour FX
Depuis la fin de The OA, en 2019, les créateurs de la série, Brit Marling et Zal Batmanglij s’étaient montrés extrêmement discrets. Il faut dire que cette production originale Netflix avait été sauvagement annulée, après seulement deux saisons de haute volée. Plusieurs pétitions et quelques mouvements de fans plus tard, malheureusement vains, et nous voilà en 2023, prêts à découvrir leur nouvelle création, cette fois pour la chaîne américaine FX (disponible chez nous sur Disney+). Une façon de repartir à zéro en s’éloignant des considérations mystiques de The OA avec Un meurtre au bout du monde.
On y suit Darby Hart, jeune enquêtrice en herbe, dont les talents de hackeuse ne sont plus à prouver. Alors qu’elle vient de publier son premier roman policier, elle est invitée par le milliardaire Andy Ronson à participer à une retraite en Islande, aux côtés de 8 autres convives. Isolés en pleine nature glaciale, celles et ceux qui pourraient bien changer le futur échangent sur leurs compétences respectives. Mais après le premier dîner, un cadavre est découvert. Persuadée qu’il s’agit d’un meurtre, Darby se lance sur les traces du tueur pour l’empêcher de commettre de nouveaux crimes…
Des personnages aussi froids que les paysages d’Islande
Sur le papier, l’intrigue d’Un meurtre au bout du monde semble réunir beaucoup de bons points : une énigme façon Agatha Christie, une critique des ultra riches comme dans Glass Onion, une ambiance polaire qui rappelle les grandes heures des polars nordiques et la présence d’Emma Corrin, formidable princesse Diana dans The Crown, pour incarner le personnage principal. Enrobez tout cela dans du papier cadeau type science-fiction, et vous auriez normalement dû obtenir le thriller de l’année. On espérait ainsi une suite spirituelle de The OA, brouillant les pistes à chaque instant et nous baladant dans un tourbillon de twists fantastiques complètement inattendus.
À l’inverse, cette intrigue policière, sans aucune once de fantastique, peine bien à nous surprendre, en enchaînant ses 7 longs épisodes, qui durent parfois jusqu’à 1h15 pour… pas grand-chose. Si Emma Corrin remplit largement sa part du contrat, elle est bien la seule à nous impliquer véritablement dans ce mystère qui tombe à plat, face à un casting charismatique, mais aux personnages tellement froids que l’on peine vraiment à s’y attacher. D’autant que l’enquête principale est polluée de nombreux flashbacks, censés nous dévoiler la psychologie du personnage de Darby, mais qui se révèlent finalement plutôt encombrants dans la narration.
Le même effet que cuisiner dans Zelda (oui, oui)
Et c’est bien là le problème central d’Un meurtre au bout du monde : vouloir tout raconter sur notre époque, à coups de dialogues creux, sans vraiment prendre le temps d’approfondir chaque sujet. De l’intelligence artificielle au changement climatique en passant par les milliardaires de la tech façon Elon Musk, les millenials ou les féminicides, on finit par frôler l’overdose. Pourtant, ces thématiques sont cruciales et méritent d’être traitées à l’écran.
Alors que la grève des acteurs et des scénaristes vient de prendre fin à Hollywood, mettant en lumière les potentiels dangers des évolutions technologiques dans les domaines créatifs, évidemment qu’il reste primordial d’interroger ces problématiques. Mais il faut avouer que voir ces questionnements presque résumés à une phrase comme « Internet, c’est juste quelques machines qui fonctionnent dans le noir » relève presque de l’absurdité.
Et même si l’on considère uniquement les éléments liés au classique « whodunit », dont on adore habituellement reconstituer le puzzle, la série ne tient même pas ses promesses. Il nous est évidemment impossible de vous dévoiler le retournement final dans ces lignes, mais au terme des 7 épisodes, nous avons clairement eu l’impression d’avoir perdu notre temps pendant de longues heures, à ressasser des clichés policiers déjà vus mille fois sur le petit et le grand écran.
Finalement, regarder Un meurtre au bout du monde, c’était un peu comme cuisiner lors de nos parties de The Legend of Zelda : Tears of the Kingdom : s’attendre à une mixture supposément délicieuse qui se transforme sous nos yeux horrifiés en un plat douteux. Alors oui, c’est nourrissant lors de longues soirées d’hiver sans rien d’autre à se mettre sous la dent, mais on retiendra la leçon à l’avenir : The OA ou rien.
Les deux premiers épisodes d’Un meurtre au bout du monde sont désormais disponibles sur Disney+. Un épisode sera ensuite mis en ligne chaque mardi, jusqu’au 19 décembre 2023.
Le verdict
Un meurtre au bout du monde
Voir la ficheOn a aimé
- Emma Corrin ❤️
- Un environnement glacé anxiogène
On a moins aimé
- Des dialogues creux
- Un propos technologique daté
- Une enquête déjà vue mille fois
- Des épisodes trop longs
- Donnez-nous la suite de The OA
Un meurtre au bout du monde aurait dû être le thriller policier de cet hiver, teinté des extravagances folles des créateurs de The OA. Mais ce qui semblait être une enquête bien ficelée, aux secrets bien gardés, s’avère finalement retomber platement comme un mauvais soufflé. On sauve quand même l’interprétation torturée de Emma Corrin, vue dans The Crown, dans le rôle d’une hackeuse qui enfile sa casquette de détective. Il est plus difficile, en revanche, de défendre le reste des personnages, cantonnés à des figures de riches un brin détestables, embarqués dans un mystère à la résolution vraiment bâclée. On en attendait mieux de Brit Marling et Zal Batmanglij, qui nous avaient pourtant éblouis avec The OA. Mais pour cette fois, on préfère zapper.
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