L’année 2023 a été bien pourvue en excellents jeux de société pour deux joueurs. Et 2024 semble démarrer sous les meilleurs auspices, avec notamment les deux nouveautés que l’on vous propose aujourd’hui.
Malgré de nombreux points communs (une petite boîte, un petit prix, des règles simples, des parties courtes…), Boreal et Marabunta offrent des sensations de jeu bien différentes. Alors plutôt que de choisir nous, on vous laisse choisir vous, selon vos goûts. Ou alors, vous faites comme nous et vous prenez les deux. Vous ne devriez pas le regretter.
Boreal, le jeu des dilemmes
Le monde d’avant n’est plus, et la nature a repris ses droits sur les ravages des humains. Incarnez deux exploratrices en quête de découvertes et de connaissances perdues.
Devant vous, entre les deux adversaires, une rivière de huit cartes. À son tour, on choisit : réserver une carte de la rivière (la mettre de côté pour éventuellement la jouer plus tard) ou jouer une carte (de la rivière ou précédemment réservée).
Jouer une carte a un coût. Chaque joueur a un petit marqueur qui se déplace le long du plateau. Il indique à la fois la quantité de ressources dont il dispose, et les cartes qui lui sont accessibles, c’est-à-dire toutes celles à gauche du marqueur.
Pour jouer une carte, on recule donc ce marqueur pour en payer le coût, réduisant d’autant l’accès aux cartes pour le tour suivant. Puis, on pose la carte devant soi, dans une construction pyramidale (quatre cartes à sa base, puis trois, deux, et une dernière au sommet).
Les cartes ont des effets immédiats (gagner des ressources, en faire perdre à l’adversaire, inverser deux cartes de sa pyramide…) et des conditions de gain de points de victoire (deux points pour chaque carte d’une même famille, quatre points pour chaque famille pour laquelle on a plus de cartes que l’adversaire…).
Elles rapportent également des ressources à la fin de chaque tour… sauf à être recouvertes par une autre carte. Ce qui arrive nécessairement au bout d’un moment.
La partie s’arrête dès qu’une des pyramides est complétée, chacun compte son score et le plus grand total l’emporte.
Pourquoi jouer à Boreal ?
Aussi magnifiques que soient les illustrations, le thème n’est pas le point fort de Boreal. Ici, ce qui prime, c’est la mécanique. Plutôt simple, cette dernière est pourtant rudement efficace.
C’est le second jeu de l’éditeur, après l’excellent District Noir de l’an passé. Ce nouveau titre reste dans la même veine que le précédent : des règles simples, des parties rapides et un minimalisme typique des auteurs japonais.
Mais les points communs s’arrêtent là. On passe d’un jeu de bluff et de contre bluff à un jeu de stratégie, de placement et d’anticipation.
La corrélation entre les ressources disponibles et les cartes accessibles est vraiment bien fichue. Tout comme les contraintes imposées par la construction de sa pyramide. Il en ressort qu’il faut faire des choix importants à chaque tour, on est sans cesse en face de dilemmes qui rendent les parties tendues et passionnantes.
On peut regretter le manque d’originalité dans les effets des cartes, mais cela n’enlève rien au plaisir du jeu.
L’interaction n’est pas directe, mais bien présente pourtant : on réserve rarement une carte pour soi, plutôt pour la chiper à son adversaire. Cependant, dans le même temps, on perd quelque peu son tour, quand lui peut avancer dans sa pyramide.
Bref, c’est un chouette second jeu pour ce jeune éditeur. Il est différent du premier, tout en restant dans la même veine : simple, beau, minimaliste et malin. On a hâte de découvrir les prochains.
- Boreal est un jeu de Masafumi Mizuno, illustré par Yuko Iwase et édité par Spiral Éditions
- Pour 2 joueurs, à partir de 10 ans et des parties d’environ 25 minutes
- Au prix de 16,50 € chez Philibert
En bref
On a aimé
- Un système malin comme tout
- Des choix et des imbrications à chaque tour
- Des illustrations magnifiques…
On a moins aimé
- … mais un thème absent
- Les effets des cartes un peu trop classiques
Marabunta, le jeu des compromis
À la tête d’une colonie de fourmis, vous cherchez à récolter les richesses de votre territoire. Seul problème, une autre fourmilière s’est installée dans les environs.
Au centre de la table, le plateau représentant la zone de jeu, constitué de plusieurs cases hexagonales et divisée en six régions. Et, de chaque côté, le plateau personnel des deux joueurs.
À son tour, on retourne une tuile et on lance six dés, puis on divise le tout en deux groupes, à notre bon vouloir. Notre adversaire choisit ensuite l’un des deux groupes en premier, et nous laisse l’autre. Chacun applique ensuite les effets des éléments ainsi récupérés.
Cela consiste principalement à écrire des chiffres sur le plateau avec le feutre à sa couleur, en partant de sa fourmilière, ou à cocher des cases sur son plateau personnel.
On étend ainsi petit à petit son territoire, et on active des bonus depuis son plateau. Certains emplacements du plateau accordent des effets quand on s’y place, notamment les très lucratifs cupcakes qui rapportent beaucoup de points de victoire.
La partie prend fin quand l’une des trois conditions est remplie, et les joueurs décomptent alors leurs points de victoire. En plus de ceux marqués en cours de partie, chaque région peut nous en faire gagner, à condition d’y être majoritaire. Le plus gros total l’emporte.
Pourquoi jouer à Marabunta ?
Marabunta s’inscrit dans la gamme des jeux à deux de l’éditeur (Splendor Duel, Jaipur, et d’autres). Il ne démérite pas face à ses classiques.
La présence de dés ou de feutres pour cocher des cases. Un thème avec des insectes, des illustrations enfantines. On pourrait croire à un jeu accessible et léger.
Accessible, il l’est, ses règles ne comportant pas de difficulté particulière. Il est en revanche nettement plus stratégique et cérébral qu’il ne paraît de prime abord.
Tout le jeu tourne autour de la mécanique du « je divise, tu choisis ». Et, il faut bien avouer qu’elle fonctionne presque toujours. On pense évidemment au très bon Hanamikoji, au classique San Marco, au trop peu connu Chantilly, au récent The Great Split, etc.
Vous l’aurez compris, on adore cette mécanique. Accolée à celle du roll&write (on lance des dés, on coche des trucs), le mélange forme un ensemble cohérent et parfaitement fonctionnel.
Mais, en y ajoutant des effets sur les plateaux, le hasard des dés, la majorité dans les régions, on obtient un jeu qui demande beaucoup de réflexion. Plus qu’on l’imagine en voyant la taille et l’illustration de la boîte.
Ce n’est pas un défaut, au contraire même. Contrairement à la taille des éléments, un peu trop petits pour être parfaitement lisibles.
Si vous cherchez un jeu léger, sans prise de tête, prenez-en un autre. Par contre, si vous cherchez un jeu de duel, avec un peu de hasard, de l’interaction, et une bonne dose de réflexion, le tout dans une petite boîte facile à emmener partout, Marabunta devrait vous combler.
- Marabunta est un jeu de Reiner Knizia, illustré par Ingrid Desmidt et édité par Space Cowboys
- Pour 2 joueurs, à partir de 10 ans et des parties d’environ 30 minutes
- Au prix de 17,90 € chez Philibert
En bref
Marabunta
Voir la ficheOn a aimé
- Le principe même du « je divise, tu choisis »
- Un peu de hasard (les dés)
- Et beaucoup de stratégie
- Un chouette matériel…
On a moins aimé
- … mais c’est un peu petit, ça manque un peu de lisibilité
- Beaucoup de choix, trop pour qui n’aime pas se faire des nœuds au cerveau
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