Cette semaine le Copyright Madness revient sur les déboires d’une chaîne YouTube dédiée à la série Game of Thrones, les tentatives de copyright sur l’expression Nuit Debout, les plans mercantiles de la famille Kardashian et le drôle de brevet d’IBM sur des imprimantes anti-piratage. Bonne lecture, et à la semaine prochaine !
Copyright Madness
Objet déconnecté. Cory Doctorow a récemment publié un article dans lequel il démontre comment le développement des objets connectés représente un danger pour nos libertés et un terreau fertile pour de futures dérives de la propriété intellectuelle. On y apprend que Google a annoncé la fermeture de l’entreprise Revolv, acquise quelques mois plus tôt, alors qu’elle commercialisait des objets connectés pour la maison. Par conséquent, l’ensemble des clients qui ont acheté ses produits vont se retrouver avec une multitude d’objets inutilisables, car l’infrastructure réseau ne sera plus opérationnelle. En raison d’une disposition prévue par le Digital Millenium Copyright Act, les propriétaires de ces objets ont l’interdiction formelle d’essayer de hacker leurs produits pour continuer à les utiliser, sous peine d’écoper une peine de 5 ans de prison. Avec le développement de ces dispositifs connectés, on ne paye plus l’acquisition d’un objet, mais simplement le droit temporaire de l’utiliser !
Censure. HBO commence à en avoir assez de se faire pirater de tous les côtés et en particulier avec la série Game of Thrones. La chaîne a demandé à YouTube de retirer la vidéo d’un vidéaste qui a construit sa notoriété en livrant des informations très précises sur le déroulé de la 6ème saison de la série. Il ne fait pas de spoil à proprement parler, mais il anticipe les événements qui vont se produire dans les épisodes quelques jours avant leur diffusion. Précisons également qu’il fait cela sans montrer d’image ou de contenus sous droit appartenant à HBO. La question est donc de savoir si le fait de raconter simplement les éléments d’une histoire est soumis ou non au droit d’auteur. Si la réponse est oui, cela vous empêchera certes de spoiler, mais aussi aux critiques de films de simplement résumer ou raconter l’intrigue d’un film après coup…
Dansez maintenant ! On se souvient tous de l’acteur Gene Kelly dans la comédie musicale Singing In the Rain. Son épouse, désormais veuve, a plutôt l’air de vouloir passer à la postérité pour les procès abusifs qu’elle est en train de lancer. Un chercheur américain voulait utiliser des interviews de Gene Kelly dans un ouvrage scientifique consacré à l’acteur. Mais elle lui refuse d’utiliser ces contenus, en estimant être titulaire du copyright sur tous les entretiens accordés par son mari de son vivant. Elle a saisi les tribunaux pour violation de ses droits. Quand on creuse, on se rend compte qu’elle veut surtout empêcher la parution d’un livre qui lui déplait sur le fond. Encore un exemple d’usage dévoyé du droit d’auteur à des fins de censure…
Trademark Madness
Trolls Debout ! Il fallait bien que cela finisse par arriver, mais les vautours auront pris leur temps cette fois. Plusieurs dépôts de marque sur Nuit Debout ont eu lieu ces derniers jours à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI), par des particuliers ou des sociétés voulant s’approprier l’usage de cette expression pour vendre des vêtements, des articles de papeterie ou des choses plus étranges comme des événements sportifs. On est ici encore une fois en présence de trolls cherchant à surfer sur la notoriété d’expressions devenues populaires pour faire leur business. On verra à présent si l’INPI aura la même réaction qu’avec Je suis Charlie ou Je suis Paris, expressions apparues après les attentats. L’institut avait alors sagement refusé l’enregistrement de ces marques en considérant que la diffusion très large de ces termes par le public s’opposait à ce que l’on puisse se les approprier comme marques pour vendre des produits.
Fumer tue. Le cigarettier Seita est en guerre contre le projet de paquet neutre qui vise à limiter la consommation de tabac en supprimant les choix marketing pouvant influencer les jeunes consommateurs. Seita craint une baisse des ventes de cigarettes et donc une diminution de ses profits. Pour tenter d’éviter cela, le fabricant a saisi le Conseil d’État pour tenter de faire invalider le décret sur le paquet neutre. Les arguments employés sont aussi épais que du papier à cigarette ! Seita estime que le paquet neutre constitue une forme de violation des droits de propriété intellectuelle et en particulier du droit des marques. Le fait de retirer le logo, la typographie, la forme et la couleur serait une annihilation de propriété intellectuelle. Pire, Seita estime que cela « prive le fabricant de ses droits, ce qui est contraire à la Déclaration des Droits de l’Homme (article 17 et 2) et à la Constitution française ». L’entreprise devrait aussi essayer de recourir au 49-3 !
Nom de famille. La famille Kardashian va encore s’agrandir, avec le mariage annoncé de la mannequin Blac Chyna avec Rob Kardashian, le frère de Kim, Khloé et Kourtney. Et quel est bien sûr le premier réflexe de la future mariée Blac Chyna ? Déposer son nouveau nom comme marque de commerce ! Elle s’appellera Angela Renee Kardashian et ne vous avisez pas de faire quoi que ce soit qui puisse gêner ses ambitions mercantiles. On vous laisse juge de décider si Rob a été épousé pour ses qualités humaines ou simplement pour son nom qui vaut de l’or…
Patent Madness
VoIP. Une entreprise spécialisée dans les services de VoIP accuse plusieurs grandes entreprises comme Apple ou les opérateurs AT&T et Verizon. Voip-pal.com leur réclame près de 7 milliards de dollars pour avoir violé deux brevets liés à la VoIP. Ce qui est croustillant dans cette affaire, c’est que Voip-pal a produit un document dans lequel elle se défend d’être un patent troll, comme si cela suffisait à légitimer son action en justice. Précisons également que Voip-pal.com n’a développé aucune technologie, elle a simplement acheté un portefeuille de brevets. Mais ce n’est pas un patent troll !
Downgrade. Normalement, on pourrait s’attendre à ce que des brevets soient déposés pour améliorer des technologies et pas pour les dégrader. Mais chez IBM, on a visiblement le sens de l’humour. La firme a en effet demandé un brevet sur un système empêchant les imprimantes de reproduire des documents protégés par le droit d’auteur ! Voilà donc le premier modèle d’imprimante « DRMisée » et on attend avec impatience à présent l’appareil photo qui refusera tout seul de photographier des bâtiments sous droit d’auteur ou le stylo qui tombera à court d’encre quand on voudra recopier des textes sous Copyright !
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