Qu’est ce que les Kardashian ont changé entre leur fête de Noël de 2013 et celle de l’année d’après ? Pratiquement rien, Kris a encore fait une décoration bling-bling, Kylie a encore pris des selfies et Kim et Kanye étaient toujours assis côte à côte, captivés par leurs iPhone. La seule différence c’était peut être la présence d’un photomaton. C’est en tout cas le détail qu’a méticuleusement relevé Racked.
Toutefois, loin d’être une pinata de plus dans les fêtes de la West Coast, derrière ce photomaton se cache un service ultra-premium de selfies professionnels. En effet, les célébrités s’entourent désormais de nombreux experts de la photo et de la communication afin de gérer leur image en ligne, notamment dès qu’il s’agit de retoucher leurs imperfections. Ces nouvelles sortes de community manager privés ont inspiré les fondateurs d’un service assez proche : MirMir.
Un onéreux secret beauté
Ne tentez pas de chercher MirMir le photomaton magique dans votre boutique d’application ou sur Google, le service premium ne cherche pas à être accessible, ni même à être connu de tous. Pourtant la société derrière ce service ne manque clairement pas de clients et bien sûr les Kardashian en sont.
Dans le petit milieu des célébrités 2.0, MirMir est sur toutes les bouches et de tous les comptes Instagram : dès lors, nul besoin de pub pour cette startup, sa meilleure réclam’ étant les selfies des célébrités qui payent pour le mystérieux service de MirMir.
Si vous suivez sur les réseaux sociaux, un ou des membres de la famille télévisuelle Kardashian, vous avez certainement déjà remarqué le grain et la singularité de certaines photos publiées. Ces dernières, comme celle ci-dessus, sont reconnaissables grâce à un effet noir et blanc très doux, des photos très lumineuses dans lesquelles tout le monde a une peau parfaite et un teint halé.
Ces photos, prises comme des selfies, ne sont pas juste de bonnes photos prises au bon moment après des séances de maquillage interminables, ce sont bien plus le produit d’un photomaton magique : le fameux MirMir.
Lancée en 2013 par Ryan Glenn et Sean Spencer, deux anciens professionnels de la photographie, MirMir est une startup atypique qui réussit grâce à l’expertise de ses fondateurs. Ryan Glenn était par exemple responsable des lumières sur la fashion week de New York. Et c’est précisément cette expertise, jusque-là réservée aux studios, que les deux co-fondateurs ont voulu apporter à leurs riches clients.
Avant de créer ensemble MirMir, les deux entrepreneurs avaient déjà leurs propres services de location de photomatons premium. Cela, jusqu’à leur rencontre, qui débuta la longue histoire du photomaton zéro défaut.
La société est basée à Los Angeles, mais vous pouvez louer votre MirMir à New York, San Francisco, Dallas, et au Canada. À condition de payer les plus de 2 400 € de frais de location pour 4 heures de photomaton.
Évidemment, à ce prix, vous ne trouverez pas vraiment la même machine que pour vos photos d’identité. En réalité, le service vendu par MirMir est aussi logiciel qu’humain, et un tout petit peu technique. Comprenez que la société envoie en fait deux personnes de son staff, armées d’un boitier photo étrange dans les grands événements mondains.
Les fondateurs refusent bien entendu d’expliquer les moyens technologiques mis en place pour parvenir aux photos dont le style est immédiatement reconnaissable. Des théories traînent sur Reddit, mais ces dernières semblent trop simple pour expliquer le rendu surréaliste de ces seflies flawless. Ryan Glenn expliquera à Racked : « Il n’y a aucun composant dans ce que nous faisons qui rend les gens plus beau. C’est un tout en réalité : c’est l’appareil photo, la lumière, le logiciel et surtout notre personnel qui connaît les bons angles pour rendre beau chacun. C’est pourquoi nous fournissons du personnel avec nos appareils contrairement à nos concurrents. »
The Verge, qui a aidé Racked à mieux saisir la magie derrière MirMir, a eu des difficultés à comprendre précisément le traitement logiciel des photos prises par la société. Il semblerait, qu’en réalité, la startup n’ait pas un simple filtre, mais une technologie de détection des visages qui lui permettrait d’appliquer des flous et des accentuations aux endroits nécessaires pour paraître éternellement jeune et beau. En plus d’un traitement des lumières qui provoque un halo christique étrange et parfois, il faut le reconnaître, d’un goût douteux.
Génération retouchée
Le problème de MirMir est assez similaire au problème des photos Instagram trop retouchées : elles sont des perceptions patinées, modifiées, agrandies et finalement faussées d’une réalité que l’on souhaite partager. S’il n’y a pas de vrais enjeux moraux derrière la disparition de nos ridules sur les réseaux sociaux, on s’inquiétera tout de même de voir des célébrités et des anonymes payer deux SMIC pour des photos surréalistes et qui leur donne un air de fantôme.
Le plus curieux dans cette histoire est un témoignage du fondateur de MirMir : « Le plus gratifiant dans MirMir, c’est le nombre de célébrités, qui sont souvent photographiées par les meilleurs photographes du monde, mais qui malgré ça, nous donnent quand même des retours très enthousiastes. » Autant dire que la vision artistique de ces dites célébrités se réduit à une peau zéro défaut, ce qui constitue en soi et pour soi une belle photographie dans le petit monde de l’apparence de L.A.
Cette tendance esthétique n’est pas née sur la West Coast et n’est pas non plus l’invention de MirMir. En effet, l’obsession de l’algorithme pour la retouche beauté vient d’Asie. Les femmes asiatiques après avoir lancé à travers le monde la folle mode des BB Creams — fond de teint sous forme de crème de jour qui éclaircit et unifie les peaux — ont en réalité institué une nouveau canon de beauté au-delà des terres asiatiques, jusqu’en Europe et aux États-Unis.
Une normalisation d’un teint sans défaut et très clair, qui rappelle étrangement les éclairages et les méthodes de MirMir. Mais ces technologies, en réalité, proviennent elles aussi d’Asie, notamment du Japon et de la Chine où les représentations de la beauté passent désormais, quasi-automatiquement, par l’utilisation de filtres photographiques ayant pour objectif de modifier l’apparence de l’épiderme et des traits du visage.
D’ailleurs, les filtres préinstallés dans les applications de smartphones chinois ne sont pas les mêmes que leurs équivalents destinés aux marchés européens et américains. On retrouve une importation de ces filtres asiatiques sous le nom d’effet « Glamour » notamment dans l’éditeur Snapseed de Google. Ces drôles de filtres n’ont pas pour objectif d’améliorer la qualité de votre photo, ni même de la vieillir logiciellement, seulement d’appliquer sur votre peau une sorte de flou et une augmentation du contraste bien mesurée pour vous rendre « beau ». À l’heure de la mise en scène de soi permanente sur les réseaux sociaux, le futur de la retouche photographique se trouve aussi du côté de l’embellissement logiciel automatisé.
In fine, l’ère du selfie sera donc aussi celle d’une perception de soi étrange et ambiguë dans laquelle on se retouche systématiquement avant de se montrer comme nous ne sommes définitivement pas. Le no filter est-il la nouvelle honnêteté ?
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