« Mon conseil à la jeunesse : lire Karl Marx ». Chacun des six épisodes de Machine s’ouvre sur cette véritable citation d’Emmanuel Macron. Cette recommandation, Thomas Bidegain, Fred Grivois et Valentine Monteil, l’ont prise au pied de la lettre. Ils ont alors imaginé cette série déjantée, disponible gratuitement sur le site d’Arte, où les blagues fusent aussi vite que les coups de poing sont assenés aux capitalistes.
Dans Machine, une jeune femme au passé mystérieux s’allie ainsi à un ouvrier marxiste pour mener la lutte des classes dans une petite usine de province. Sur le papier, on vous accorde que cela peut faire peur. Mais si l’on rajoute une bonne dose de kung-fu, maîtrisé à la perfection par une héroïne en combinaison jaune façon Kill Bill, forcément, ça devient tout de suite plus intriguant.
Machine est ainsi une série complètement atypique, que l’on attendait depuis si longtemps en France. Alors pour vous convaincre de réviser vos classiques marxistes entre deux bastons, voici 4 raisons de succomber au charme de cette création Arte.
Pour le mélange des genres ultra référencé
On pensait ne jamais le voir de notre vivant et, pourtant, le grand jour est enfin arrivé : les arts martiaux façon Bruce Lee et Jackie Chan ont été mis dans un shaker avec l’humour des frères Coen (The Big Lebowski) et une grosse louche de conscience politique bien énervée, le tout à la sauce française.
Machine a ainsi dépassé toutes nos espérances, proposant un mélange des genres qui semble indigeste au premier abord, mais qui fonctionne finalement à merveille.
La série réussit ainsi l’exploit de plaire à de nombreux publics différents, tout en s’imposant comme une production de niche, qui ravira les adeptes très spécifiques d’humour cinglant, d’action parfaitement calibrée et de propos anti-capitalistes assumés.
Véritable révélation du dernier festival Séries Mania de Lille, où elle a été couronnée du Grand Prix, Machine pousse tous les curseurs à fond, avec un résultat profondément jouissif. Au fil de chacun des six épisodes, les longues scènes de baston sont ainsi légion, menées par l’actrice Margot Bancilhon (De Grâce).
Réalisant toutes ses cascades elle-même, dont un saut dans le vide complètement fou, la comédienne rappelle même les grandes heures d’un Tom Cruise, au féminin. À ses côtés, JoeyStarr étonne dans le rôle d’un touchant ouvrier marxiste qui prend Machine sous son aile.
Avec les employés de l’usine où ils travaillent, ils deviennent ainsi « Jean-Claude Van Damme, Che Guevara et sa brigade rouge », comme le décrit un autre personnage. Une bande complètement invraisemblable, avec qui on rêve pourtant de mettre le feu au capitalisme.
Pour des scènes de baston sur du K.Maro
Avec ses dreadlocks, sa combinaison jaune et sa maîtrise du kung-fu, Machine est une véritable machine de guerre. La preuve ? Elle peut grimper une immense côte à vélo, rattraper des camions de marchandise en marche, monter dedans à mains nues et frapper sans problème l’armoire à glace qui sert de conducteur.
Mais il manque quelque chose à cette scène de l’épisode 4, non ? Ah oui, j’allais oublier : tout ceci se déroule alors que le tube des années 2000, Femme Like U de K.Maro, résonne en fond.
Voilà tout le génie de Machine : faire appel en permanence à notre imaginaire collectif et populaire, sans jamais s’en moquer. Toutes les séquences de baston bénéficient ainsi d’une bande originale qui mélange Anastacia et The Chemical Brothers avec une fluidité rare. Et vous n’entendrez plus jamais Femme Like U de la même façon, on vous le garantit.
Pour le duo de Batman et Robin
Sortir le pop-corn pour commenter en direct la fuite d’une jeune femme qu’ils sont censés interpeller : voilà la passion de Batman et Robin, deux policiers dont le duo fait des étincelles dans l’épisode 5 de Machine. Leur apparition est furtive, mais tellement hilarante qu’elle se montre digne des meilleurs super-héros.
Pour le propos politique
Derrière les multiples couches d’humour, de baston et de références à la culture pop qui composent Machine, on trouve évidemment de véritables réflexions politiques anti-capitalistes, encore rares à la télévision. Il faut avouer qu’entendre du Karl Marx déclamé mot pour mot dans une série française, sur fond de révolte sociale ouvrière, est loin d’être une banalité.
À l’heure où les idées de gauche ont tendance à être noyées dans le débat public, voire diabolisées, on ne peut qu’applaudir la démarche de prendre le sujet du chômage et des délocalisations à bras le corps.
En terme de narration féministe, la construction du personnage principal prend également avec bonheur le contre-sens des récits habituels. Là où les héroïnes possèdent régulièrement un désir de vengeance, généralement après avoir subi de nombreux traumatismes sexuels, Machine, elle, ne rentre jamais dans ce carcan facile, très souvent utilisé dans le rape and revenge.
Au contraire, au départ, la motivation n’est clairement pas un critère. La jeune femme traîne même des pieds pour utiliser ses compétences martiales au service de la lutte des classes, avant de s’engager pleinement.
Il est donc tellement agréable de suivre un personnage féminin aux fêlures certaines, mais qui n’a pas besoin d’avoir souffert le martyre pour être une héroïne badass. Et puis, soyons honnêtes : développer une série sociale, qui récite des pans entiers du Capital sans devenir ennuyeuse une seule seconde, il fallait oser.
Le verdict
Machine
Voir la ficheOn a aimé
- La série française que l’on attendait
- Margot Bancilhon, impressionnante
- Le saut dans le vide de l’épisode 5
- L’improbable présence de K.Maro
- Faire des pompes avec Karl Marx
On a moins aimé
- On veut une saison 2 !
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