Tous les fans de pop culture nippone le savent. Les mangas et les animes japonais, bien qu’ils rencontrent d’importants succès commerciaux, sont des produits culturels largement piratés et diffusés illégalement sur Internet. Entre les sites de streaming, les plateformes de téléchargement et les forums de fans peu regardants sur la légalité de leurs contenus, les plus fiers représentants de la culture populaire du Soleil Levant font face, depuis de nombreuses années, à d’importantes fuites. Le manque à gagner donne le vertige puisqu’il est estimé à 2 000 milliards de yens, soit presque 17 milliards d’euros — en gardant à l’esprit toutes les nuances qu’il faudrait apporter à une telle évaluation…
Pour remédier à ce problème, le ministère des échanges, de l’économie et de l’industrie du Japon a déjà développé un réseau de logiciels chargé de scruter le web pour repérer les contenus illicites. Pour cela, les algorithmes de l’État fonctionnent en réalisant de multiples recherches sur Internet pour détecter les images qui posent problème. Mais les mailles du filet ne sont pas suffisamment resserrées pour garantir une efficacité totale. Ainsi, le gouvernement japonais a annoncé qu’il avait embauché des spécialistes humains chargés de faire, à peu de choses près, le même métier que les machines : fouiller les moindres recoins du web japonais pour signaler toutes les vidéos (animes et films) piratées. Ces derniers ont pris leurs fonctions depuis le début de la semaine.
Associer humains et machines contre le piratage
Le but de cette opération est simplement de se doter d’une force supplémentaire contre le piratage, les humains et les logiciels étant censés travailler de manière complémentaire. En effet, les ordinateurs utilisés, aussi puissants soient-ils, rencontrent plus de difficultés pour réaliser certaines tâches plus intuitives pour l’homme et s’adaptent moins facilement à de nouvelles situations.
Supprimer tous les contenus illégaux sur les forums japonais devrait pouvoir réduire considérablement le piratage d’animes au niveau international puisque les fans à l’étranger récupèrent généralement ces vidéos sur des sites nippons. Mais cela reste plus facile à dire qu’à faire.
En France, par exemple, une foultitude de sites et de forums diffusent des animes en version originale sous-titrés par des fans. Il suffit par exemple de lancer la recherche toute simple « One Piece anime » sur Google pour s’en rendre compte. Les trois premiers résultats affichés redirigent vers des sites de streaming ou de téléchargement qui ne respectent pas les droits d’auteur. Preuve de l’incommensurabilité de la tâche que se sont fixée les pourfendeurs de contenus illicites.
Or, pour un bon nombre de fans, la diffusion gratuite d’animes sur Internet, même illégale, contribue à l’expansion de la pop culture japonaise. À l’instar des séries américaines, le piratage d’une œuvre contribue à sa popularité. D’un point de vue culturel et de soft power, l’argument se tient. Néanmoins, sur un plan plus pragmatique, le Japon s’appuie aussi sur les ventes de mangas et d’animes pour booster son économie — le secteur devrait connaître une croissance de 40 % d’ici 2020.
Des solutions existent
Si la suppression de tous les contenus illégaux sur Internet relève plus d’une douce utopie que d’un objectif réaliste, ces dernières années ont tout de même vu naître bon nombre de sites de streaming légaux, offrant du contenu de qualité et presque en simultané avec les sorties japonaises. Des plateformes payantes telles que Anime Digital Network (ADN), Wakanim ou Crunchyroll mettent à disposition des internautes des catalogues fournis respectant le droit d’auteur.
Pendant ce temps, en 2014, le Japon initiait le Manga-Anime Guardians Project, une campagne en ligne de lutte contre le piratage de la sous-culture nippone. visant à rediriger les internautes vers des plateformes de diffusion légales. Il avait alors fermé 580 sites de piratage. Dans ce cadre-là, le gouvernement s’est notamment allié à l’association de distribution de contenu à l’étranger (CODA) qui unit des ayants droits dans la lutte contre le piratage et la promotion à l’international des produits culturels nippons.
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