Pardonnez notre ton volontairement grossier, en totale adéquation avec le sujet, mais le Marvel Cinematic Universe (MCU) est dans un sacré merdier depuis Avengers: Endgame. Pendant des années, Disney et Marvel ont roulé sur l’autoroute du succès, chacun des films remplaçant les autres tout en haut des charts. Toutefois, la fin de l’arc autour du méchant Thanos s’est transformée en un mur difficile à surmonter pour les deux multinationales.
Un mur qu’elles ont en réalité elles-mêmes dressé en s’épanouissant dans une forme de facilité, sans jamais se remettre en question. Le MCU a trouvé une parade temporaire : l’introduction du concept du multiverse, qui ouvre une ribambelle de portes de sortie. Mais cette solution n’en était pas vraiment une : elle n’a fait que servir sur un plateau des raccourcis évidents, qui ne construisaient alors plus rien du tout. L’édifice tout entier est aujourd’hui composé de murs qui s’érodent progressivement, laissant derrière eux un tas de poussière et d’incohérences. Il a plus que besoin d’un coup de pied dans le derrière.
C’est là que Deadpool entre en jeu. Autoproclamé messie du MCU — lire : le sauveur –, le super-héros porté par Ryan Reynolds peut incarner l’anarchie et le chaos dont Marvel et Disney ont besoin pour remettre de l’huile neuve dans un moteur qui ne fait plus rien avancer. Hélas, si Deadpool & Wolverine est bien le film d’action fun attendu, il ne rectifiera pas le tir tout seul. On pourrait presque y voir une métaphore sur le statut réel de Deadpool, qui n’a été ni ne sera jamais un sauveur.
Deadpool & Wolverine est le buddy movie (un peu trop) attendu
Armé de sa langue bien pendue et de son arrogance légendaire, Deadpool annonce la couleur dès le début de Deadpool & Wolverine : « Bienvenue au MCU, même s’il n’est pas au mieux de sa forme. » Disney et Marvel ont pleinement conscience de la situation dans laquelle ils se sont embourbés, aveuglés par les milliards de dollars au box-office et estimant sans doute que rien ne pouvait leur arriver. Le dire c’est bien, même si tout ne sera pas pardonné. Mais il faut maintenant des actes pour redorer le blason d’une source en théorie infinie de divertissement. Deadpool y amène sa violence sans rechigner, ce qui est déjà une bonne nouvelle.
Car, fort heureusement, Deadpool ne s’est pas fait lobotomiser par l’édulcorant Disney en intégrant le MCU — conséquence du rachat historique de la Fox. Durant l’introduction, on le voit exterminer des soldats sans aucune censure, ni ménagement de coups bas, au rythme du tube Bye Bye Bye de *NSYNC. Deadpool & Wolverine est un film Deadpool qui ne se renie pas, en assumant sa vulgarité, ses blagues sous la ceinture, sa cruauté, son humour noir, son autodérision, son quatrième mur brisé. Ainsi que son lot de caméos savoureux — et bien masqués par la communication — qui autorisent une revanche à certaines adaptations ratées.
Deadpool & Wolverine s’efforce de raccrocher les wagons comme il peut, en misant sur le concept bancal du multiverse. Toutefois, il reste avant tout ce buddy movie symbolisé par la bromance — IRL, pour ne pas dire irréelle au regard des crasses qu’ils se font — de Ryan Reynolds et Hugh Jackman. Ce dernier a accepté de renfiler le costume de Wolverine pour éclabousser l’écran de sang, de charisme, d’abdominaux et de talent (un zeste d’émotions aussi).
Son alchimie avec Ryan Reynolds, palpable depuis l’officialisation de son retour, y compris en dehors des caméras, n’est pas de la poudre de perlimpinpin. Elle transpire à chaque fois que l’iconique duo apparaît, avec ce petit côté « Je t’aime moi non plus » parfumé de gore. On en rêvait depuis la rencontre ratée dans X-Men Origins: Wolverine, Deadpool & Wolverine l’a fait. En résulte un spectacle fun, souvent bien amené et qui rappelle à quel point Hugh Jackman, en dépit d’un petit coup de vieux (sa musculature reste intacte), sera difficilement remplaçable.
On comprend alors très vite que la promesse de « sauver ce qu’il reste du MCU » s’évanouit au profit de la réunion au sommet entre deux personnages qui aiment se chamailler. Il y a un sentiment de « tant mieux », puisque Deadpool & Wolverine ne se perd pas en route. Mais les questions demeurent sur l’avenir du MCU (même le projet Blade, en souffrance, prend une balle perdue), maintenant qu’on est officiellement rentrés dans l’ère des mutants (selon les termes de Kevin Feige).
Disney et Marvel ne pouvaient semble-t-il pas filer les clés du camion à Deadpool, qui a la personnalité d’un adolescent prépubère irresponsable. Il n’empêche, le manque désormais durable d’une vision globale n’augure rien de bon pour la suite. L’inutilité de la scène post-générique, mécanisme de teasing roi dans le MCU d’avant, en est le symbole criant.
À l’arrivée, admirer, le sourire aux lèvres, Deadpool continuer à faire n’importe quoi dans la maison de Mickey a quelque chose de savoureux. Un n’importe quoi dans ce qui est devenu un n’importe quoi. Au moins le MCU n’a-t-il pas émasculé Deadpool — et Wolverine –, ce qui était à craindre. Toujours est-il qu’on crie beaucoup trop « mais non », devant l’absurdité de certains gags, pour un film qui s’improvisait grand messie. Tant mieux, mais tant pis. Tant pis, mais tant mieux.
Le verdict
Deadpool & Wolverine
Voir la ficheOn a aimé
- Le duo Reynolds/Jackman
- Pas de censure malgré Disney
- Deadpool est dans le MCU
On a moins aimé
- On n’en sait pas plus sur l’avenir du MCU
- La scène post-générique, ridicule
- Le multivers, toujours très bancal
Porté par la bromance irréfutable de Ryan Reynolds et Hugh Jackman, Deadpool & Wolverine coche toutes les cases du buddy movie poilant, qui mélange humour noir, violence et action dans un spectacle plaisant. L’intégration du mercenaire à la langue bien pendue au MCU reste toutefois sans réponse claire sur l’avenir réel de l’empire créé par Disney et Marvel.
Deadpool & Wolverine se greffe à l’édifice grâce à la magie bancale du multivers. Mais c’est encore trop fragile pour rêver à la gloire d’antan. C’est quelque part une bonne nouvelle pour le film de Shawn Levy, qui n’a pas besoin de rentrer au forceps des éléments narratifs susceptibles d’esquisser un futur plus brillant. Deadpool n’est pas le messie promis. Cela tombe plutôt bien, puisqu’il n’est pas vraiment un héros.
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