Je me souviens très bien du moment où j’ai découvert la saga Dragon Age. C’était en 2014, avec l’épisode Inquisition. À l’époque, occupant déjà le poste de journaliste spécialiste des jeux vidéo, je devais en faire le test. Le RPG m’était tombé des mains au bout de quelques jours. Je ne l’ai alors repris que bien des semaines plus tard, et cette seconde chance s’est avérée fructueuse : un verdict rendu avant le passage à la nouvelle année, avec l’impression d’avoir joué au jeu de l’année.
Dix ans ont passé et le studio BioWare propose — enfin — un nouvel épisode, intitulé Dragon Age: The Veilguard. Je me suis bien évidemment promis de ne pas en rester à ma première impression, comme ce fut le cas pour Dragon Age: Inquisition. Après une grosse quinzaine d’heures à enchaîner les quêtes et à faire des choix à la portée cruciale, je peux bel et bien dire que Dragon Age: The Veilguard est une réussite presque totale. Ses quelques défauts ne sont rien face à la richesse dont il fait preuve.
Points forts
- Narration maîtrisée et prenante
- Système de combat bien pensé
- Techniquement solide
Points faibles
- Progression trop lente
- Gameplay un peu flou dans les déplacements
- DA mi-figue mi-raisin
Dragon Age: The Veilguard, ou l’aventure avec un grand A
Une aventure à soi
En discutant avec un ami qui joue aussi à Dragon Age: The Veilguard, on s’est rendu compte qu’on ne vivait pas tout à fait la même aventure. Ce qui souligne l’impact des décisions, qui est réel.
Dragon Age: The Veilguard me rappelle beaucoup la trilogie Mass Effect (développée par le même studio). Dans son cheminement, et sans en dire trop sur le scénario (ce qui n’aurait pas beaucoup de sens puisque chacun façonne les rebondissements en fonction de ses décisions), on retrouve les mêmes leviers. À savoir : la réunion d’une bande de personnages au caractère bien trempé et aux aptitudes hors du commun pour combattre une menace hyper puissante, le tout saupoudré de jalons clés pour multiplier les embranchements et accentuer les choix difficiles à prendre. Une structure finalement classique dans un RPG, qui plus est se déroulant dans un univers de fantasy.
Dès lors, ce que raconte Dragon Age: The Veilguard brille davantage dans les petites, mais multiples interactions entre les membres de l’équipe (qui ont chacun leurs motivations et leurs intérêts à défendre), que dans le récit en lui-même. Ce n’est pas forcément un mal, puisque les dialogues sont bien écrits et certaines thématiques — l’inclusivité en tête, y compris pour les personnes non binaires — très bien traitées (au grand dam d’une frange réactionnaire et mécontente, avec le review bombing habituel pour protester). Cette formule gagnante se répercute aussi dans le contenu annexe, avec des zones à la taille modeste qui révèlent leur richesse à mesure qu’on les explore. Bien évidemment, vos actes comme vos mots auront des incidences partout, y compris dans les relations avec vos alliés, avec des répercussions évidentes ou plus subtiles. À ce titre, la personnalité des protagonistes est incroyablement creusée, avec des états d’âme auxquels on peut s’identifier.
Ce soin accordé à la narration permet à Dragon Age: The Veilguard d’impliquer la joueuse ou le joueur d’une fort belle manière. En prime, BioWare n’a pas oublié d’accorder de l’importance à la réalisation. Si la direction artistique souffle le chaud et le froid en termes d’ambiance, l’impression générale est plutôt bonne. Il y a une belle variété dans les décors, la solidité technique est à souligner et le casting ne manque vraiment pas de charisme (petite mention sur la beauté des coiffures et des cheveux, digne de L’Oréal). Tant d’éléments qui offrent toujours plus d’arguments à cette épopée éclatée en une dizaine de chapitres, que certains abandonneront sans problème pour enchaîner les tâches d’un enjeu inférieur (la mécanique des factions est là pour motiver).
Dragon Age: The Veilguard assure aussi dans la partie action, avec des combats qui mélangent tout à la fois le temps réel (avec un bon feeling quand on frappe) et la stratégie, avec un menu qui offre la possibilité de mettre en pause pour planifier les attaques de son équipe. En effet, alors qu’on incarne une héroïne ou un héros qu’on peut personnaliser de A à Z, le RPG permet de diriger un trio complet (en donnant des ordres aux deux autres). Ce sera alors à nous de trouver des synergies efficaces pour éliminer plus rapidement des ennemis, lesquels adorent protéger leur grande barre de vie avec une armure qu’il faudra au préalable briser.
Il est toutefois dommage de constater que cette apparente profondeur finit vite par se tarir, puisque les possibilités de varier les plaisirs sont moins nombreuses que ce qu’on pourrait imaginer. BioWare aurait pu épaissir un peu plus cette notion de synergie, ce qui aurait rendu les combats bien plus intéressants à la longue. C’est d’autant plus vrai que la progression lente ne motive pas vraiment à se battre : terrasser un ennemi bien plus puissant que nous pour gagner une quantité riquiqui d’expérience, ce n’est pas très valorisant. Un défaut qui a une conséquence directe sur la montée en puissance, assez peu appréciable. Il est compensé par un arbre de compétences qui permet de se spécialiser, voire de tester différents builds grâce au remboursement gratuit des points dépensés.
Autre point qui pourrait décevoir : le gameplay n’est pas toujours irréprochable, notamment la maniabilité du personnage et la manière dont fonctionne le ciblage (surtout face aux adversaires avec plusieurs points d’impact et / ou dans des endroits exigus). Les déplacements peuvent se révéler imprécis dans certaines situations, et ils ne sont pas aidés par la rigidité des animations qui faussent ce qu’on voit à l’écran. Parfois, les sauts sont une plaie à bien caler, sachant que les développeurs ont eu l’ingénieuse idée d’utiliser la même touche pour les sauts et certaines interactions courantes. En résultent des situations loufoques où on saute sur place alors qu’on voulait simplement ramasser des ressources. Dragon Age: The Veilguard n’est pas toujours irréprochable, mais sa recette s’appuie sur suffisamment d’ingrédients savoureux pour se régaler et profiter d’un festin.
Le verdict
Dragon Age: The Veilguard
Voir la ficheOn a aimé
- Narration maîtrisée et prenante
- Système de combat bien pensé
- Techniquement solide
On a moins aimé
- Progression trop lente
- Gameplay un peu flou dans les déplacements
- DA mi-figue mi-raisin
Dans le gameplay, ou que ce soit sur le fond ou la forme, Dragon Age: The Veilguard doit composer avec des défauts manifestes. Mais ils sont négligeables face à la générosité débordante dont fait preuve ce RPG développé par un studio soucieux d’offrir un jeu soigné. L’aventure mise sur une narration ambitieuse, notamment dans les rapports entre les personnages, pour captiver. Soulignons aussi ses efforts sur l’inclusivité, au risque d’être épinglé par une frange réactionnaire.
Dix ans après Dragon Age: Inquisition et en attendant le futur Mass Effect, BioWare s’offre un retour par la grande porte. Dragon Age: The Veilguard a des heures et des heures de contenu dans sa besace, et invitent à explorer des zones maîtrisées pour découvrir les répercussions de ses nombreux choix. Dans ces conditions, il est difficile de ne pas s’impliquer.
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