Ces derniers mois, le silence était d’or pour Neil Gaiman. Une attitude qui ne ressemblait pas à la personnalité de l’auteur de Good Omens et de Sandman, habituellement si éloquent. À l’été 2024, cette figure majeure de la littérature fantasy et du monde des séries a ainsi été visée par un podcast mis en ligne par le média britannique Tortoise Media : Master: the allegations against Neil Gaiman. Cinq victimes y racontaient les agressions sexuelles que Neil Gaiman leur avait fait subir, entre 2002 et 2022. Une enquête édifiante, qui n’a pourtant pas connu le retentissement médiatique espéré. L’auteur en a alors profité pour garder le silence sur le sujet, niant ces accusations uniquement par l’intermédiaire de ses représentants.
Mais une nouvelle investigation, menée cette fois par la journaliste Lila Shapiro pour Vulture, et publiée le 13 janvier 2025, a changé la donne. On peut y découvrir le témoignage de huit femmes, détaillant les agressions sexuelles et les viols commis par Neil Gaiman à leur encontre. Cet article, accablant, a obligé le célèbre écrivain à prendre enfin la parole sur le sujet.
Neil Gaiman « brise le silence »
Après des mois de silence, Neil Gaiman s’est donc finalement exprimé, face aux multiples accusations dont il fait l’objet. Dans un post, mis en ligne le 14 janvier 2025 sur son blog personnel et sobrement intitulé « Breaking the Silence », il revient ainsi sur les plaintes qui le visent. À noter qu’il s’agit de sa première publication sur ce blog depuis le 3 juin 2024, coïncidant avec la période de sortie de la première enquête le concernant, dans les colonnes de Tortoise Media.
Dans cette longue déclaration, Neil Gaiman répond à la nouvelle enquête de Vulture, publiée la veille. Il explique avoir suivi les différentes « histoires qui circulent sur Internet » à son sujet, au fil des derniers mois, « avec horreur et consternation », tout en justifiant son silence par un « respect pour les personnes qui ont partagé ces récits et par un désir de ne pas attirer encore davantage l’attention sur de fausses informations ». L’auteur ajoute qu’il se sent désormais obligé de prendre la parole.
Il estime qu’il se reconnaît « en partie » dans les témoignages recueillis au fil des enquêtes, regrettant certaines descriptions de faits qui n’ont « jamais eu lieu » : « Je suis loin d’être une personne parfaite, mais je n’ai jamais été impliqué dans des pratiques sexuelles non consenties, avec qui que ce soit. Jamais. »
Des regrets, mais pas d’excuses
Neil Gaiman raconte qu’il a parcouru à nouveau les échanges écrits qu’il a pu avoir avec les femmes qui l’accusent, estimant que leur contenu et la façon de les recevoir n’a jamais changé : « Il s’agit de messages entre deux personnes qui apprécient des relations sexuelles totalement consenties et qui souhaitent se revoir. À l’époque de ces relations, elles me semblaient positives et heureuses des deux côtés ».
L’auteur de Sandman reconnaît tout de même, avec le recul, qu’il « aurait pu et aurait dû faire tellement mieux » : « J’étais émotionnellement indisponible, tout en étant sexuellement disponible, j’étais focalisé sur moi-même et je n’ai pas été aussi attentionné que j’aurais pu ou aurait dû l’être. Je ne me souciais visiblement pas des émotions des autres, et c’est quelque chose que je regrette, vraiment profondément. C’était égoïste de ma part. J’étais obnubilé par ma propre histoire, et j’ai ignoré celle des autres. »
Si Neil Gaiman ne s’excuse jamais, dans sa longue publication, il estime avoir tout de même réfléchi à son comportement, ces derniers mois, et considère qu’il travaille actuellement à réparer ses torts. Sans la nommer précisément, on peut comprendre entre les lignes qu’il a entamé une thérapie : « Pour moi-même, pour ma famille et pour les personnes que j’aime. Je ferais tout mon possible pour mériter leur confiance, ainsi que celle de mes lecteurs. »
« Je ne suis pas disposé à tourner mon dos à la vérité »
Malgré tout, l’auteur conclut son post en niant en bloc les accusations qui le visent : « Je n’accepte pas qu’il y ait eu une quelconque forme d’abus. (…) Certaines histoires horribles qui sont désormais racontées n’ont tout simplement jamais eu lieu, tandis que d’autres ont déformé la réalité. Je suis prêt à prendre la responsabilité de chacune des erreurs que j’ai pu faire. Je ne suis pas disposé à tourner mon dos à la vérité, et je ne peux pas accepter d’être décrit comme quelqu’un que je ne suis pas. Je ne reconnaîtrai pas des choses que je n’ai pas faites. »
Pour le moment, Neil Gaiman n’a pas engagé de poursuites judiciaires contre les femmes qui l’accusent, ni contre la rédaction de Vulture.
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