Un samouraï noir entre dans un temple japonais, lieu de quiétude, et saccage tout avec une férocité bestiale. L’image que cette scène renvoie est très, très parlante : celle d’un envahisseur qui pillerait une culture sans ménagement ni état d’âme. On est dans la destruction pure et dure de symboles forts.
Cette séquence est tirée du jeu vidéo Assassin’s Creed Shadows, qui a déjà fait couler beaucoup d’encre alors qu’il n’est même pas encore sorti (il a été repoussé à deux reprises). Elle a notamment été partagée par le créateur de contenu Shohei Kondo le 31 janvier, sur X (ex-Twitter). Originaire du Japon, il s’offusque de voir son pays être malmené par un jeu vidéo, plus particulièrement sa religion. Il n’est pas le seul à le faire et voilà Assassin’s Creed Shadows qui se retrouve embourbé dans une polémique totalement absurde. Une de plus.
Assassin’s Creed Shadows a toujours malmené la religion
« Réveillez-vous les défenseurs d’Ubisoft, et entendez notre voix ! Quel jeu Assassin’s Creed détruit un vrai site religieux ? La culture japonaise est dévorée mais mérite du respect », clame Shohei Kondo. Il accuse donc Assassin’s Creed Shadows de s’en prendre exclusivement à la religion japonaise. Sauf qu’il a tort et arrange la vérité pour nourrir son argumentaire poussant à la victimisation.
Le fait est que la religion, qu’importe sa forme, a toujours été malmenée dans les jeux vidéo Assassin’s Creed. C’est ainsi qu’on se retrouve à affronter le Pape, en personne, dans Assassin’s Creed II — où l’on apprend aussi que Jesus aurait réalisé ses miracles grâce à un artefact. Et dans Assassin’s Creed Valhalla, centré sur un viking, on enchaîne les attaques sur des monastères et on peut tuer un évêque en écrasant un énorme crucifix sur lui.
Interrogé par Numerama, Thomas Méreur, pigiste, spécialiste de la saga Ubisoft et auteur des livres Les Secrets d’Assassin’s Creed. De 2007 à 2014 : l’envol et Les secrets d’Assassin’s Creed: De 2014 à 2023 : Révolutions, rappelle : « Plus globalement, le lore de la série remet en question le concept même de dieux (puisque les mythologies sont en fait des histoires déformées qui ont vraiment eu lieu). » Dans l’un de ses livres, il écrit : « Cela peut paraître anodin, pourtant c’est une vision finalement très radicale, car elle repose ni plus ni moins sur une rationalisation de la religion. »
Et à lui de rappeler qu’il s’agit d’un « blasphème » assumé pour nourrir, rappelons-le, des récits de fiction. Il y a d’ailleurs un disclaimer au début des jeux, ce dès le premier opus : « Cette œuvre de fiction a été conçue, développée et produite par une équipe multiculturelle de confessions et croyances diverses. »
Tout porte à croire, plutôt que Assassin’s Creed Shadows est victime d’une cabale — un titre ambitieux que certains souhaitent voir échouer, sachant qu’Ubisoft joue gros. Cette polémique aurait-elle existé si Yasuke n’était pas noir ? On peut se poser la question puisque ce personnage est pointé du doigt par la frange raciste des joueurs et des joueuses depuis l’officialisation du jeu. Ajoutons à cela des pétitions pour tout faire capoter — au Japon, notamment.
Dernier point à ne pas négliger : ce clip qu’on pourra qualifier de barbare ne représente en aucun cas la personnalité de Yasuke, mais celle du joueur qui décide sciemment de tout détruire. Thomas Méreur, qui a pu jouer à Assassin’s Creed Shadows en avant-première, indique à toutes fins utiles : « Ce qui est assez hypocrite puisque c’est celui qui fait la vidéo qui est irrespectueux. Personnellement, les temples sont tellement beaux que j’étais en mode roleplay dedans, à marcher calmement en regardant tout autour. » À chacun sa conscience.
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