Emma Roberts et Dave Franco sont clairement des atouts pour Nerve. Ce thriller pour teenagers s’est doté d’un couple idyllique de jeunes gens à la plastique parfaite qui donnent des envies de barbe à papa et de virées en moto. Les deux jeunes acteurs prennent la tête d’une affiche poussive : l’une est notre reine incontesté de Scream Queens et de American Horror Story — dans lequel elle a donné naissance à un des Gif les plus connu (surprise bitch) — l’autre est issu des gênes miraculeux de la famille Franco.
L’intrigue du thriller repose sur un énièmeThe Game : comprenez qu’il y a un jeu et qu’il pousse au pire. Mais derrière cette construction narrative vue et revue, Nerve voudrait laisser entendre qu’il est un film moderne sur le web, les réseaux sociaux et surtout l’effrayant dark web.
Ainsi, les premières minutes du film mettent en avant une réalisation assez grotesque d’une caméra pénétrant à l’intérieur d’un ordinateur. Et c’est peut être là tout le manque créatif de Nerve qui représente le monde de l’informatique à la Matrix, avec des emojis. Et il est toujours décevant, en 2016, de voir le numérique représenté de manière totalement surréaliste, en accumulant les clichés et les inexactitudes, le tout dans un film qui fait commerce de son aspect critique sur la société de l’apparence que sont les réseaux sociaux.
Les « GAFA » y jouent un grand méchant rôle où ils volent nos données et conservent nos identités sans que l’on sache vraiment comment ils y parviennent et le dark web est peuplé de geeks malfaisants (ou trop sympas de temps à autre) vivant dans des squats qui parodient clairement Mr. Robot. Mais soit, une fois la consternation de la représentation passée, le film nous donne à voir sa deuxième facette : un thriller moralisateur.
Les GAFA y jouent un grand méchant rôle
Vee (Emma Roberts) est une jeune fille intelligente qui ne veut pas se laisser embarquer dans le nouveau délire à la mode : Nerve. Il s’agit d’un jeu social en réalité augmentée entre Chatroulette et Pokémon Go sur lequel les ados vont réaliser des défis pour de l’argent. Mais si l’argent coule à flot, sans que l’on ne sache pourquoi, les kids vont d’abord sur Nerve pour avoir « plus de followers sur Instagram », comme l’avoue la meilleure amie de Vee. Le ton est donné, Internet accouche toujours de systèmes de domination où l’apparence et le voyeurisme sont nécessairement maîtres… Sans aucune autre réalité sociale que celle ci, le terrible jeu qui sépare Internet entre watchers et players va finir par séduire notre délicate Emma Roberts qui se laisse tenter.
Son premier défi lui fait rencontrer le playboy mystérieux de l’intrigue amoureuse, et on comprend à demi-mot que Vee continue de jouer à Nerve principalement pour le beau Dave Franco. Et tant pis si elle y perd son âme, Dave est mystérieux. Elle enfourche donc sa bécane et l’esthétique à la Neon Demon que l’on a également vu dans l’infâme XOXO se met à battre son plein dans New York, la nuit.
Ensuite les moins mauvaises minutes du film s’étirent dans une sorte de road trip dans lequel nos deux héros flirtent avec le danger et les défis de leurs pitoyables et anonymes watchers. C’est là qu’on trouve le vrai intérêt du film : les plans sont justes et palpitants lorsqu’il s’agit de filmer vertige, vitesse et fureur. Et on s’inquiète follement de voir de si jolies têtes mourir.
La banalité des premières minutes rejoint la médiocrité intellectuelle des dernières
Mais la fin s’embourbe dans le mélodrame et la morale selon laquelle l’anonymat du net rend inhumain est très indigeste. La banalité des premières minutes rejoint la médiocrité intellectuelle des dernières, et on se dit qu’en-dehors d’une jolie photographie, on ne sauvera pas grand chose de Nerve.
Néanmoins, on retiendra une certaine idée de ce qui angoisse l’adolescent lambda aujourd’hui : avoir peu de followers et se faire voler ses données personnelles. Une telle lucidité, ça impose le respect.
Le verdict
Nerve
On a aimé
- Suspense efficace
- Un casting séduisant
- BO et photo très teen
On a moins aimé
- Caricatural et dépassé
- Souvent gênant de banalité
- Confondre deep et dark web
Malgré un début et une fin consternants, il y a quelques bonnes minutes palpitantes dans Nerve. Et pour celles-ci, on pourrait aller le voir si l'on s'ennuie vraiment ce week-end. Mais la vraie déception d'un film dont on attendait pas une grande ingéniosité vient de la mauvaise qualité de son discours sur le web. Grotesque et caricatural, ce film pour teens rate sa cible et manque d'intérêt sur ce qui aurait dû être sa crédibilité.
Enfin, nous rirons tous dans une quinzaine d'années de ces esthétiques flashy à coup de néons et de lens flares qui auront régné sur les années 2010. Nerve en illustre parfaitement la vacuité.
Ailleurs dans la presse
- Variety : « Nerve is a comic-book vision of how the Internet has become a gladiatorial arena of voyeurism. »
- Télérama : « Le message sur la nocivité des effets de groupe et le pillage des données sur le Net pèse des tonnes »
- IGN : « Sommes-nous pour autant obligés de vivre continuellement les mêmes séquences comme les fêtes dans les appartements ou la séance shopping ? »
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