Autant être honnête dès le début : j’avais totalement abandonné Black Mirror. Si les premières saisons sont restées imprimées dans ma mémoire, sous forme d’avertissements traumatisants sur le futur, les derniers épisodes m’avaient fait jeter l’éponge. Après une saison 5 réduite à 3 récits affligeants, j’avais même décidé de ne pas me plonger dans la saison 6.
Mais il faut reconnaître que j’avais sous-estimé le génie de Charlie Brooker, le créateur de la série de SF. Et si, comme moi, vous aviez perdu complètement foi en cette anthologie, accrochez-vous à vos sièges : la saison 7 est disponible depuis le 10 avril 2025 sur Netflix, et il s’agit d’un comeback inespéré, qui nous a laissés en larmes.
Que vaut la saison 7 de Black Mirror ?
Depuis ses débuts, il y a plus de dix ans, Black Mirror prend un malin plaisir à nous torturer l’esprit, à grands renforts de concepts technologiques et futuristes bien trop proches de notre réalité. Et en 2025, l’anthologie de SF a visiblement décidé de renouer avec ses origines. On y retrouve ainsi son essence, à savoir un regard cynique sur notre présent. Charlie Brooker continue donc à réaliser ce qu’il sait faire de mieux : imprimer nos rétines pour toujours avec des récits chocs. Mais cette saison 7 s’accompagne d’un twist singulier : la grande arrivée de l’émotion dans des récits habituellement si défaitistes.
Avec un parti pris étonnamment plus doux, Black Mirror se rapproche ici davantage de l’excellente romance de San Junipero, que du constat malaisant de Chute Libre. Résultat : on se surprend à ressentir beaucoup d’amour et de positivité, teintés d’une pointe de nostalgie mélancolique, face à la majorité de ces 6 nouveaux épisodes, qui nous font même décrocher des larmes au passage.

Face à une actualité de plus en plus sinistre et alarmante, qui ressemble désormais beaucoup trop au mème This is fine, Charlie Brooker nous apporte ce que l’on espérait plus : de l’apaisement. Alors, certes, le monde est pourri. Certes, quelques récits de cette saison 7 vont vous terrifier jusque dans les recoins les plus intimes de votre chair. Mais vous y trouverez également le plus bel épisode que l’on ait pu voir dans Black Mirror, jusqu’à aujourd’hui. Et cela n’a pas de prix.
Notre classement des épisodes de la saison 7 de Black Mirror, du pire au meilleur
Bête Noire (épisode 2) — Note : 4/10
Avez-vous déjà détesté quelqu’un, que votre entourage trouve pourtant merveilleusement génial ? Bête Noire utilise cette situation plutôt banale, pour en faire un sujet évidemment effrayant. On y suit Maria, une créatrice de chocolats, alors qu’elle retrouve une ancienne camarade de classe, nommée Verity, par hasard. Son quotidien va alors être bouleversé par cette vieille connaissance, qui semble appréciée de tous…
Pendant 40 minutes, Bête Noire réunit de nombreux éléments familiers : la sensation de perdre, progressivement, pied avec la réalité, le harcèlement scolaire en toile de fond et la quête infinie du pouvoir. Malheureusement, malgré une impression constante de malaise, l’épisode n’arrive jamais à décoller, la faute à une histoire un brin poussive. Dommage.

De simples jouets (épisode 4) — Note : 5/10
En 2018, Bandersnatch réinventait le concept des épisodes interactifs, avec une sombre histoire de jeu vidéo et de programmation. Sept ans plus tard, l’univers connaît une suite que personne n’avait réclamée, autour du personnage central de Colin Ritman. Le pari était clairement risqué pour Black Mirror et le résultat, en demi-teinte, était malheureusement à prévoir.
Commençons par les points positifs : Peter Capaldi (Doctor Who) en vieil homme abîmé par la vie, on dit tout de suite oui. L’acteur britannique, absolument monumental, porte toute l’intrigue de cet épisode sur ses frêles épaules. Mais le récit, qui met en scène des Tamagotchi devenus machiavéliques sous forme de huis clos et de flashbacks incessants, finit par se perdre dans une surenchère de gore et de violence inutile.
De simples jouets aurait pourtant pu être une excellente revisite du thème inépuisable de l’invasion extraterrestre. On retiendra plutôt le génie marketing de Netflix, qui a accompagné l’épisode d’un jeu vidéo, créé spécialement pour l’occasion.

Eulogie (épisode 5) — Note : 9/10
Attention : il faut préparer les mouchoirs avant de s’installer confortablement pour découvrir Eulogie. Avec cet épisode bouleversant, Black Mirror plonge ainsi dans le domaine de l’émotion pure, grâce à l’histoire de Phillip. La solitude de ce vieil homme est troublée lorsqu’un coup de téléphone lui apprend une terrible nouvelle : la mort de Carol, son amour de jeunesse, à qui il a offert son cœur pendant trois ans. Pour préparer son enterrement, il reçoit un kit spécial lui permettant de sélectionner des souvenirs bien précis, afin de les diffuser en l’honneur de la défunte. L’occasion pour lui de revisiter sa mémoire et, peut-être, de poser un nouveau regard sur cette passion perdue…
Après Bientôt de retour, l’épisode 1 de la saison 2, Black Mirror s’intéresse à nouveau à la thématique du deuil, avec une approche rafraîchissante. Grâce à des photos immersives, Phillip peut ainsi littéralement replonger dans ses souvenirs, avec leurs odeurs, leurs visages parfois flous et la petite musique qui les entoure. Mais ces détails reflètent-ils vraiment la réalité ? Loin des technologies terrifiantes ou malaisantes auxquelles Black Mirror nous a habitués, Eulogie est un véritable éloge à l’amour, aux occasions manquées et à ces êtres chers qui manquent si fort à nos vies. Tout simplement brillant.

Des gens ordinaires (épisode 1) — Note : 9/10
Voilà probablement l’épisode le plus Black Mirroresque de cette nouvelle fournée. Situé en ouverture de la saison 7, Des gens ordinaires vous mettra une véritable claque, au point de vous provoquer quelques nuits blanches (testé et désapprouvé). Dans cet univers proche du nôtre, Mike et Amanda, un couple ordinaire et aimant, va ainsi entamer une lente descente aux enfers. La cause ? Rivermind, un programme implanté dans le cerveau d’Amanda pour lui sauver la vie, mais qui va transformer son existence en cauchemar…
Avec Des gens ordinaires, Charlie Brooker revient enfin aux bases de Black Mirror, avec une technologie suffisamment familière pour nous troubler et des personnages suffisamment attachants pour nous faire trembler avec eux. Chris O’Dowd (The IT Crowd) et Rashida Jones (The Office) donnent ainsi vie à Mike et Amanda avec une subtilité renversante, dans cet épisode qui vous retournera à coup sûr le cœur puis le cerveau (ou tout en même temps). Petit conseil personnel : ne le regardez surtout pas juste avant de dormir, au risque de cogiter pendant des heures sur la probabilité, ou non, d’un tel scénario glaçant dans la vraie vie.

USS Callister : Au cœur d’Infinity (épisode 6) — Note : 9/10
Vous avez tout oublié du destin de l’équipage de l’USS Callister, au cœur de l’un des meilleurs épisodes de Black Mirror, dans la saison 4 ? Pas de panique : le tout premier sequel de l’histoire de la série a pensé à tout. Avant de voyager à nouveau dans l’hyperespace d’Infinitity, vous pourrez donc bénéficier d’un petit récap de cet épisode culte, qui rendait parfaitement hommage à Star Trek. Avec cette suite, on quitte une saga culte de SF pour suivre un autre chemin : celui de Star Wars. Et si l’on pouvait craindre une panne d’inspiration de la part de Charlie Brooker, il n’en est rien : l’USS Callister opère un retour en force, en parvenant même à surpasser l’original.
L’épisode, d’une durée magistrale d’1h30, multiplie ainsi les références à des univers bien connus de la pop culture, de Seul au monde à Severance en passant par Matrix ou… Real Housewives. USS Callister : Au cœur d’Infinity coche finalement toutes les cases pour s’inscrire au Panthéon de Black Mirror : drôle, finement écrit, bourré d’action, rempli de twists à la pelle et infusé d’une réflexion bienvenue sur les dérives technologiques. Que demander de plus ?

Hotel Reverie (épisode 3) — Note : 10/10
On vous l’avait promis, il est ici : Hotel Reverie est, sans aucun l’ombre d’un doute, le plus bel épisode de Black Mirror, toutes saisons confondues. Véritable hommage à l’âge d’or du cinéma ainsi qu’aux films en noir et blanc des années 1940, cette romance éternelle réinvente ainsi le septième art avec beaucoup de délicatesse. On y assiste à la rencontre entre deux actrices hollywoodiennes, à deux temporalités différentes, grâce à la magie de l’intelligence artificielle.
Ici, point de cynisme à l’horizon : juste une histoire d’amour qui rappelle les grandes heures de San Junipero, mais aussi des classiques comme Matrix ou Her. On frissonne encore à la simple pensée de la sublime séquence évoquant le temps qui passe, sur Clair de lune de Debussy. Derrière ses références évidentes au cinéma, Hotel Reverie cache également de magnifiques portraits de femmes, et notamment de ces icônes qui ont participé à l’éclat d’Hollywood, avant de connaître un destin tragique. Ne vous fiez pas à sa durée de plus d’une heure, qui peut vous effrayer : acceptez simplement de vous laisser porter par la douce mélancolie de cet épisode hors du temps.

Le verdict

Black Mirror saison 7
Voir la ficheOn a aimé
- Hotel Reverie, le plus bel épisode de Black Mirror
- Des gens ordinaires, pour cauchemarder
- Eulogie, pour verser une larme
- Le retour en force de l’USS Callister
On a moins aimé
- L’histoire poussive de Bête noire
- Des Tamagotchi machiavéliques, vraiment ?
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