Le célèbre et indispensable one more thing de la conférence pré-E3 2016 d’Ubisoft en avait décontenancé plus d’un au mois de juin dernier. Oubliez les Watch_Dogs et autre The Division, faites place à Steep, un jeu de sports extrêmes rappelant les années de gloire des franchises SSX ou Cool Boarders.
Le genre de la glisse a fondu comme neige au soleil depuis quelques années : la firme française entend le remettre au goût du jour avec les standards actuels, comprenez par-là avec du monde ouvert à gogo, des défis communautaires, un multijoueur étroitement lié au solo, et tutti quanti.
À quelques jours des premiers flocons de neige, Steep veut nous convaincre de plonger tête la première dans la poudreuse, que ce soit en snowboard, avec des skis, en parapente ou en wingsuit. Le choix de la fraîcheur est-il payant pour Ubisoft ?
Une fois l’introduction passée sans trop d’encombre mais avec quelques gamelles quand même (oubliez l’apprentissage sur pistes vertes), on comprend vite que Steep laisse une totale liberté aux joueurs. La narration se limite à une voix-off nous rappelant, de temps en temps, les objectifs principaux ou nous invitant à prendre part à des évènements spéciaux tout juste débloqués. Le reste du temps, nous sommes seuls dans les différentes montagnes alpines parfaitement recréées par les équipes d’Annecy.
Liberté et contemplation
Très vite, les cols du Mont-Blanc, du Tyrol ou encore d’Aravis, volontairement rapprochés pour donner naissance à une carte grande, cohérente et vidéoludiquement appréciable, n’auront plus aucun secret pour vous. L’ascension passe par la nécessité de « capturer » des points clefs, les Drop Zones, en les observant à l’aide de jumelles, ce qui amène à un paradoxe : descendre pour mieux remonter afin de révéler de nouvelles zones.
Une mécanique qui n’a rien de nouveau dans un open-world. Les challenges, une centaine en tout, sont variés et s’accompagnent de missions plus orientées histoire, mélangeant un peu tout et donnant la parole aux… montagnes, et aux tâches liées à des sponsors de la vraie vie.
Hélas, la structure de la carte s’avère très compliquée. Pas pratique pour un sou, l’interface, qui n’est pas non plus aidée par ses zooms bizarroïdes, est tout sauf claire et ne permet pas d’utiliser des filtres pour mieux s’y retrouver. De fait, on avance sans trop savoir où aller, en enchaînant les défis, rangés par niveau, sans trop se poser de questions. On appellera ça la liberté.
Cette plongée dans l’inconnu est autant une source de plaisir — le potentiel de contemplation est assez évident grâce aux graphismes réussis — que de frustration à base de : « mais où est-ce que je suis censé aller, bon sang ?! ».
La carte est un joyeux barnum
À une époque où les titres ont une fâcheuse tendance à prendre les joueurs par la main, Steep laisse le joueur se débrouiller tout seul. Un positionnement qui aurait pu se justifier si l’agencement de la map était plus lisible. À ce sujet, on peut laisser le bénéfice du doute aux développeurs, qui auront tout le loisir de mettre à jour le jeu et de l’améliorer sur plusieurs points, y compris sur celui, essentiel, de l’ergonomie générale. En fonction des retours de la communauté, de grosses améliorations seront peut-être lancées dans les mois à venir.
En ce qui concerne les graphismes, force est de reconnaître qu’Ubisoft Annecy a fait un excellent travail. On pourra toujours dire que les environnements sont vides, une condition indispensable pour avoir un moteur qui tient la route sans rechigner (quelques bugs de collision à noter tout de même). Mais personne ne pourra les attaquer sur leur beauté, retranscrivant à merveille les bol d’air frais ressentis lors d’un voyage à la montagne, et le sentiment de gigantisme qui en découle.
La neige est éclatante, la poudreuse accroche, le soleil brille de mille feux (n’oubliez pas vos lunettes) et les rochers sont aiguisés. Cela rappellera des souvenirs de colo de ski à certains, sachant que le tout baigne dans une ambiance sonore bien travaillée et rythmée par une bande son rock et pop. Là encore, on parle de liberté.
Le planté de bâton
Steep doit d’abord s’apprécier pour son gameplay, articulé autour de quatre disciplines : le snowboard, le ski, le parapente et le wingsuit. Et même cinq en réalité tant nous pourrions aisément ajouter la téléportation, moyen de locomotion le plus efficace pour passer d’un challenge à l’autre (Ubisoft à oublié les téléskis et les télésièges pour les remontées). Cette possibilité d’user de manière illimitée de cette faculté va d’ailleurs à l’encontre du principe même de l’exploration et participe pour beaucoup au sentiment du « j’enchaîne les défis et tant pis pour le reste. » Pratique, indispensable mais un peu trop puissant.
En revanche, les quatre sports ne sont pas tous logés à la même enseigne. En commençant par les pires, on dira que le parapente est à oublier tant les sensations sont aux abonnés absents, la faute à la lenteur des déplacements et au manque d’intérêt des missions liées.
Parapente : 0 sensation
Pour le ski, on cherche encore son utilité face au snowboard, beaucoup plus excitant et facile à manier. Le wingsuit, pour sa part, accouche d’épreuves vertigineuses, sans conteste les meilleures de toutes quand on souhaite en prendre plein les yeux et avoir les poils qui se hérissent en prenant des risques.
En revanche, ceux qui espéraient pouvoir démarrer une balade en parapente, enchaîner sur du wingsuit et se finir en snow peuvent se raviser car il faut obligatoirement passer par la case à pied pour changer de discipline. Un passage à oublier, pas seulement à cause des animations ridicules, mais surtout lors des accélérations qui portent bien mal leur nom.
En snow, comme en ski, il est bien évidemment question de tricks à sortir dans certaines épreuves. Steep est une belle déception en la matière. La physique bancale y est pour beaucoup, à l’instar de la caméra, impossible à gérer soi-même, ce qui n’aide pas à correctement apprécier son placement lors des retombées.
Si le rider dispose d’une jauge d’équilibre s’exprimant en G, on a du mal à réellement appréhender la réussite ou l’échec d’une figure en cours, tout comme le score qui en résultera. Parfois, un simple saut se transformera en cauchemar tandis qu’un 1 080° ric-rac passera comme une lettre à la poste.
En d’autres termes, Steep n’est ni trop ni assez permissif. Cette absence de choix entre l’arcade et la simulation entraîne une prise en main assez aléatoire dans sa partie tricks. N’est pas Tony Hawk qui veut.
Progression bif bof
Dans Steep, la progression passe logiquement par de l’expérience à accumuler afin de grimper dans la hiérarchie (plusieurs catégories). Les différents niveaux à atteindre, jusqu’au 25, donnent accès à des épreuves supérieures mais n’ont aucune incidence sur les compétences du rider, fixes tout du long. Même constat du côté de l’équipement, avec des changements uniquement cosmétiques mais nuls en termes de prise en main (vous pourrez quand même dévaler les pistes en vous déguisant en animal si le coeur vous en dit).
À l’arrivée, le seul moyen de s’améliorer reste la pratique, ce qui ne donne pas vraiment envie de s’accrocher plus que de raison. Il y avait pourtant un potentiel de loot assez conséquent, surtout avec quatre sports différents.
Ubisoft Annecy a peut-être oublié la dimension RPG de sa production. Mais, du côté des fonctionnalités multijoueurs, il a pensé à tout avec une expérience connectée en permanence. Un système de classement rappelle votre niveau réel par rapport aux autres, tandis que la possibilité de jouer de manière indirecte avec les autres est une excellente idée. L’aspect communautaire est renforcé par la possibilité de créer ses propres défis, afin de voir qui sera capable de les relever, ou de former des groupes en croisant d’autres riders.
Toujours dans l’annexe, pour ne pas dire le superflu, le studio a mis le paquet sur la dimension replay, avec des clips très bien mis en scène et personnalisables pour les envoyer comme il se doit sur les réseaux sociaux. Se fendre d’avoir trouvé un bon spot et de lui faire honneur pour mieux le montrer aux copains ? Check. Il y a de quoi faire, même s’il manque quelques ingrédients pour relever encore plus les ambitions.
Le verdict
Steep
On a aimé
- Le sentiment de liberté
- Quelques bonnes sensations
- Plutôt joli
On a moins aimé
- Carte bordélique
- La physique et la caméra
- Progression peu engageante
Avec Steep, on pourra tout autant voir le verre à moitié plein et à moitié vide. Personne ne pourra reprocher à Ubisoft de ne pas essayer autre chose même si le genre existait déjà. Mais toujours est-il qu'il manque quelques éléments au bonhomme de neige pour tenir debout. Il y a des fulgurances et des déceptions et, surtout, de la place pour faire mieux.
D'un autre côté, nous pouvons faire confiance à Ubisoft, qui a l'expertise et les moyens d'améliorer grandement la formule et pondre quelque chose de plus cohérent. On pense d'abord à l'ergonomie générale avant de se pencher au cas par cas avec, par exemple, le parapente, véritable parent pauvre du quatuor de sports proposés. Il est donc difficile de condamner totalement Steep, même s'il ne faudra pas être regardant sur tout pour y prendre un réel plaisir. C'est un peu une piste rouge avec beaucoup de bosses.
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