Chaque week-end, c’est la compilation de l’actualité de la propriété intellectuelle et de ses dérives, concoctée par Lionel Maurel et Thomas Fourmeux.

Cette semaine, le Copyright Madness revient sur une taxe sur les liens qui ne dit pas son nom, un artiste qui a protégé son jardin pour empêcher une compagnie pétrolière de bâtir un pipeline sur son terrain ou encore HBO qui s’en prend à une enfant autiste de 13 ans. Bonne lecture et à la semaine prochaine !

Copyright Madness

Hypertaxe. En septembre, la Cour de justice de l’Union européenne a rendu une décision dans laquelle elle considère qu’un simple lien hypertexte peut constituer une violation du droit d’auteur. On s’attendait à ce que cette jurisprudence ait des effets très négatifs ; c’est à présent certain. Un juge allemand a décidé cette semaine que les sites commerciaux devaient vérifier que tous leurs liens ne pointent pas vers des pages extérieures où se trouvent des oeuvres diffusées sans autorisation. On imagine le casse-tête, notamment pour des sites de presse par exemple. Peut-être que cela irait plus vite de remplacer l’hypertexte par une hypertaxe, car cela reviendra bientôt au même !

Headshot. Les studios qui développent des jeux vidéo sont parfois très à cheval sur la propriété intellectuelle et ils n’hésitent pas à cartonner des projets qui ne sont rien d’autres que des hommages réalisés par des fans. C’est le cas de ZeniMax Media, qui s’en prend à un fan qui a développé un jeu s’inspirant du célèbre Doom. Ce qui est particulièrement étrange, c’est que ZeniMax Media reproche au fan d’avoir utilisé des balises < meta > faisant référence aux productions vidéoludiques du studio sur son site web. D’après le studio, c’est l’utilisation de mots-clés copyrightés qui constitue la contrefaçon plutôt que la similarité entre les deux jeux. Encore un triste exemple dans lequel le droit d’auteur est utilisé contre la liberté de remixer et de créer.

Doom

Doom

Paysagiste. Un artiste canadien voulait faire barrage à une compagnie pétrolière qui désirait faire passer un pipeline dans sa propriété. Du coup, il a réaménagé son terrain avec des sculptures et des installations pour pouvoir déposer un copyright sur le tout, en tant qu’œuvre de « landart ». Le pire, c’est que ça fonctionne : voilà deux ans que la compagnie se casse les dents sur ce copyright sans arriver à faire avancer son projet. Mais il y a mieux : l’artiste va même jusqu’à exiger 500 dollars chaque fois qu’un représentant de la société veut entrer chez lui, au titre d’un droit de « visite » de son œuvre ! Peut-être qu’on devrait aussi déposer un copyright sur la forêt amazonienne pour la sauver ?

Trademark Madness

Barre de rire. Nous en avons déjà parlé à de nombreuses reprises dans cette chronique, mais voici le grand retour de l’affaire du Kit Kat. Pour rappel, Nestlé essaie depuis 2002 (!!!) de faire reconnaître la forme de ses barres chocolatées comme marque pour empêcher des concurrents de l’imiter. Une cour européenne a jugé cette semaine que pour garder sa marque, il allait falloir que Nestlé arrive à prouver que le public associait cette forme à son produit dans tous les pays de l’Union européenne. On lui souhaite bien du plaisir et on imagine déjà les questions de l’enquête : « souvenez-vous : en 2002, est-ce que vous pensiez que ce parallélépipède était un Kit Kat ? Oui / Non / Parfois / Ça dépend / Autre ». #LOL !

Shame of Thrones. HBO est visiblement très, très jaloux de tout ce qui touche à sa série Game Of Thrones, au point d’aller jusqu’à faire des choses assez sales. On a appris cette semaine que ses avocats avaient demandé le retrait d’un dessin réalisé par une jeune fille autiste de 13 ans, représentant un portrait avec la phrase « Winter Is Coming ». Il ne s’agissait même pas d’un des personnages de la série, mais HBO a déposé comme marque « Winter Is Coming » et il n’en a pas fallu davantage pour les voir dégainer leur propriété intellectuelle. Bon courage à présent au père de cette enfant pour lui expliquer en quoi elle est une dangereuse délinquante…

Liberté de la presse. Une curieuse histoire est en train de se jouer en Belgique autour du journal Métro. Des militants du collectif citoyens Tout autre chose ont voulu dénoncer les conditions de transport et les problèmes à répétition que subissent les voyageurs de la SNCF belge. Pour cela, ils ont décidé de publier une fausse version du journal Métro distribué dans les gares en pointant du doigt lesdits problèmes. Cela n’a pas plu aux propriétaires du quotidien, qui ont décidé d’attaquer le collectif en raison de l’utilisation abusive de leur marque. Le procès en cours est en train de devenir le procès du droit des marques contre la liberté d’expression…

Presse journal

CC Kaboom

Le Copyright Madness vous est offert par :

Lionel Maurel

Thomas Fourmeux

Merci à tous ceux qui nous aident à réaliser cette chronique, publiée sous licence Creative Commons Zéro, notamment en nous signalant des cas de dérives sur Twitter avec le hashtag #CopyrightMadness !

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