Les ventes de DVD ont fortement reculé au début de l’année, malgré la réception d’avertissements de l’Hadopi par près d’un million d’internautes, et malgré la fermeture de MegaUpload qui accueillait avec MegaVideo la principale plateforme de streaming illégal.

Rien ne va plus pour l’industrie du cinéma. Au premier trimestre 2012, selon les chiffres publiés vendredi par le CNC, le nombre de DVD vendus en France a chuté de 17,1 % par rapport à la même période l’an dernier, avec 26,3 millions de DVD écoulés. Dans le même temps, les ventes de Blu-Ray ont augmenté de 24,6 %, mais leur petit nombre (3,25 millions d’unités) est loin de compenser la chute du format roi. Au total, hors VOD, le chiffre d’affaires de la vidéo en France a baissé de 10,5 % sur les 12 derniers mois.

Si le prix a baissé, il reste encore trop élevé pour les nouvelles sorties. Le prix moyen d’un DVD « de nouveauté » se situe en effet à 17,44 euros (-5,1 %), tandis qu’un nouveau Blu-Ray est vendu 22,52 euros (- 4,7 %). La demande de films à moindre prix est pourtant là : un tiers des Blu-Ray écoulés sont ceux vendus entre 10 et 13 euros, tandis que les DVD vendus entre 3 et 8 euros représentent 42 % des ventes.

Comme le note Pascal Lechevalier, les chiffres de la vidéo au premier trimestre mettent à mal le discours de l’industrie du cinéma, qui accusent sans cesse le piratage de leurs faibles performances :

A fin 2011, le Syndicat de l’Edition Vidéo Numérique (SEVN) expliquait la baisse de 13% du CA du DVD en 2011 et la relative progression du Blu Ray (+20%) par le fait que « l’offre de nouveaux titres a été moins riche en 2011 qu’en 2010, en particulier s’agissant des genres de films habituellement plébiscités en vidéo (action, comédie). »

Le SEVN avait même une autre explication pour justifier la panne de croissance de la vidéo physique : « piratage d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles, qui reste à un niveau élevé malgré les actions positives de la Hadopi, (qui) a continué à avoir un impact très négatif sur le secteur de la vidéo. Cet effet a notamment ralenti la croissance du Blu-ray et de la VOD. »

Avec la fermeture de MegaUpload, on était donc en droit d’attendre un sursaut du marché vidéo au premier trimestre 2012. Pas forcément un passage en positif, mais au moins un coup de frein à la dégringolade des ventes. Surtout qu’aux Etats-Unis, l’année 2012 commence sur une stabilisation du marché de la vente physique (-0,63%).

Or malgré la riposte graduée mise en œuvre par l’Hadopi, malgré la fermeture soudaine de la principale plateforme de streaming utilisée par les pirates, malgré les discours officiels qui affirment que le piratage ne s’est pas déporté massivement vers d’autres plateformes, le marché continue à couler. Et pour le moment, rien ne montre que la VOD profite davantage de la politique anti-piratage.

Peut-être faudra-t-il un jour se réveiller et se dire que le problème de la vidéo en France réside davantage dans la pauvreté de l’offre que dans l’incivilité de la demande.

A quand une réelle remise en question de la chronologie des médias ? A quand une offre d’abonnement à la VOD illimitée réellement intéressante, non seulement sur le plan des tarifs, mais aussi sur le plan des contenus proposés ? A quand une offre couplée cinéma + VOD pour les cinéphiles ? A quand une vraie réduction du prix des Blu-Ray, qui font des films en haute-définition un produit de luxe ?…

Concomitamment, le CNC a publié les chiffres des entrées en salle. Ils montrent que le cinéma continue de battre des records, avec 70,71 millions d’entrées sur les quatre premier mois de l’année 2012, soit 5,6 % d’augmentation par rapport à la même période l’an dernier (rappelons que 2011 a établi un nouveau record). Sur une année glissante, le cinéma a encore progressé de 11,7 %.

Et notre petit doigt nous dit que les cartes de cinéma illimité et la multiplication des offres tarifaires variées ont largement participé à ce succès. Beaucoup plus que les discours anti-piratage…

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