Après s’être affairé sur la saga Halo pour le compte de Microsoft, Bungie s’est lancé dans un sacré pari voilà plusieurs années : ériger un FPS au parfum de MMO et le faire tenir sur toute une décennie. Destiny, puisque c’est son nom, a finalement payé le prix de cette ambition aussi louable que démesurée. Critiqué sur pas mal de points dont certains se sont effacés au gré des mises à jour et des extensions payantes, le titre édité par Activision aura au moins eu le mérite de poser des bases saines et nettoyées, d’accoucher d’un univers et de se forger, malgré tout, une communauté de fans. Toutes les conditions étaient donc réunies pour développer un Destiny 2, pensé comme un nouveau départ. Pour tout le monde.
Un nouveau départ
L’affaire n’était pas si mince, mais nous pouvons affirmer bec et ongle que Bungie a retenu la leçon en tendant l’oreille pour écouter les joueurs. Ces derniers réclamaient par exemple une narration plus poussée. Elle l’est assurément dans Destiny 2. Si l’histoire est un peu neuneu, sinon bateau, et manquera toujours de ce souffle épique nonobstant des enjeux assez importants (un énième méchant très énervé et un peu fragile qui veut tout détruire alors que les héros sont désormais à l’agonie et sans défense), elle raconte quelque chose et se nourrit de très belles cinématiques et d’un casting fort en gueule pour impliquer le joueur au maximum. Une telle évolution, qui paraîtra normale et qui l’est de toute façon, avait déjà été amorcée par les dernières extensions de Destiny. Une autre preuve que Bungie a entendu.
Bungie fait montre d’une sacrée maîtrise
D’une manière globale, la réalisation de Destiny 2 est de haute volée, ce qui était déjà le cas dans son prédécesseur. En plus de musiques aux notes enveloppantes sachant s’envoler quand le besoin s’en fait sentir, le FPS s’appuie sur des graphismes d’une finesse assez inouïe et des effets lumineux aveuglants (on aurait tellement aimé une surcouche HDR pour sublimer tout ça). Il y a en outre cette belle variété des environnements traversés, dépaysants, voire contemplatifs, lors de certaines séquences ébouriffantes. Enfin débarrassé de la PlayStation 3 et de la Xbox 360, Bungie fait montre d’une sacrée maîtrise et c’est un sacré bonheur.
Les habitudes reprennent
Aux yeux de Bungie, Destiny 2 est un nouveau départ. Plus concrètement, tous les futurs Gardiens devront repartir de zéro, même ceux qui ont passé des milliers d’heures sur le premier opus. Tout juste devront-ils se contenter de retrouver l’apparence de leur(s) personnage(s) et apprécieront-ils les clichés d’introduction immortalisant leurs faits d’armes passés, par nostalgie (une excellente idée, soit dit en passant). Pourtant, derrière cette volonté affirmée, il y a un paradoxe qui sautera aux yeux des initiés, devant accepter de tout perdre : les sensations sont les mêmes.
Cette forme de constat vaut autant pour l’absence d’une classe inédite que pour le bestiaire peu ou prou inchangé — les Cabals rouges, les vilains, restent des Cabals tandis que les Vex, les Déchus, la Ruche et les Corrompus sont là. Bungie n’avait envie ni de bousculer ni de trahir son univers. Il l’a simplement renforcé avec des planètes à visiter et des PNJ qui les peuplent. Il faut dès lors se faire à l’idée que les serveurs réuniront toujours des Chasseurs, des Arcanistes et des Titans. Sans aucun doute pour une histoire d’équilibre, de cohésion et de logique scénaristique. Les plus pinailleurs pesteront toujours sur la personnalisation somme toute assez relative — comprenez par-là qu’il est difficile de ne pas ressembler au Gardien de son voisin. Par chance, ce point s’étoffera dans le futur, d’autant que la nouvelle nomenclature des armes ouvre la voie à la spécialisation (exemple : on peut devenir un pro du flingue, ce qui était moins possible avant).
On sent la maîtrise
Pour contenter un tant soit peu les aficionados, les développeurs ont quand même remplacé une doctrine — une famille de pouvoirs — par une autre appuyée par des considérations d’ordre narratif. Dans Destiny 2, les Gardiens perdent leur Lumière et doivent sauver le Voyageur, un puissant artefact ayant permis à l’Humanité de se développer et qui la protège de ses ennemis.
Bien évidemment, Bungie a procédé à des menus changements sur les arbres de compétences et offert une aptitude en plus à tout le monde. Très décriée car trop aléatoire dans Destiny, la progression s’arrête une fois encore au niveau 20 puis passe par l’équipement pour faire grimper la puissance. Comme dans tous les MMO, le nerf de la guerre devient très vite le loot. À ce sujet, la présence de microtransactions reste regrettable, même pour des éléments cosmétiques.
Comme dans tous les MMO, le nerf de la guerre devient très vite le loot
On y fait quoi, de fait, dans ce Destiny 2 ? Eh bien pas mal de choses pour commencer. Avant de penser au end game, il s’agit d’abord de finir l’histoire (comptez une grosse dizaine d’heures), à laquelle s’ajoute toute une ribambelle d’objectifs annexes pour devenir de plus en plus fort. Il y a de tout : des petites missions, des quêtes décevantes, des événements publics qui peuvent devenir épiques sous certaines conditions (pour plus de récompenses encore), des trésors bien cachés et des patrouilles (des petites tâches annexes). Tout n’est pas débloqué d’entrée et il faut mériter le contenu via des jalons à terminer et des étapes primordiales à passer. On soulignera le soin apporté à l’interface, davantage claire, épurée et expliquée. En résumé : moins austère, plus accessible.
De la même manière, les récompenses sont beaucoup mieux pensées, évitant cet écueil consistant à avoir le sentiment que l’on joue pour rien. Sur chaque planète, on a la possibilité de gagner des jetons permettant de parfaire sa réputation et de recevoir du loot en conséquence. Cela pallie en quelque sorte le caractère aléatoire des objets que l’on ramasse, même si, parfois, vous serez le couillon de l’histoire lors de vos sessions à plusieurs (ndlr : le seul qui ne recevra pas un équipement légendaire). L’injustice fera toujours partie de Destiny 2, qui s’apprécie sur le long terme et se pense au quotidien. Le genre à faire passer par tous les états : de la colère née de cette frustration à faire du surplace à l’immense joie d’obtenir un précieux sésame. Le bâton et la carotte.
Pensé pour le multi
Sans surprise, Destiny 2 est un titre qui prend tout son sens en compagnie d’autres joueurs, si possible des amis et dans un Clan (pas encore disponible à l’heure où nous écrivons ces lignes). Les solidaires pourront encore prendre part à des Assauts, l’équivalent de donjons très rémunérateurs, et guetter non sans impatience le Raid, l’instance qui demandera du fil à retordre (pas encore disponible non plus à l’heure où nous écrivons ses lignes). En outre le PvP, baptisé Épreuve, n’a pas disparu. Il s’est même étoffé en s’inspirant d’Overwatch sur certains modes et certaines cartes. Là, aussi, par souci d’uniformisation, il y a des jetons à gagner pour débloquer du loot, du loot et encore du loot. Il y en aura pour tout le monde.
On terminera cet addictif voyage en rappelant que Destiny 2 évoluera avec le temps, sous-entendu que nous ne sommes pas au bout de nos surprises. Maintenant que Bungie a suffisamment d’expérience en bagage, on peut faire confiance au studio quant à sa faculté à alimenter son MMOFPS dans les mois à venir. Nous, on y retourne.
Vous pouvez acheter Destiny 2 pour 58,99 euros.
Le verdict
Destiny 2
On a aimé
- Beau comme un soleil
- Du contenu à en revendre
- Une maîtrise sans faille
On a moins aimé
- Un peu de paresse sur le bestiaire
- L'injustice logique du loot aléatoire
- Des microtransactions, vraiment ?
Nous pouvons bel et bien affirmer que Bungie a appris de ses erreurs du passé, sans doute commises dans la précipitation et sous l'excuse du baptême de feu. Il n'avait plus vraiment le droit de se tromper avec Destiny 2 et, attendu au tournant, le studio propose un FPS teinté de MMO beaucoup plus maîtrisé, un poil mieux écrit, davantage complet et moins injuste dans son système.
Le nouveau départ, si critiquable était-il lors de l'annonce, apparaîtra plus que jamais comme une bonne chose, en espérant qu'il accouche d'un suivi poussé pour occuper les joueurs durant des mois, voire des années. C'était la promesse originale. Elle est maintenant digérée et peut compter sur des bases solides pour transformer l'ambition en réalité. Aux joueurs, maintenant, de s'affirmer comme les gardiens de son avenir. Pour que, jamais, sinon le plus tard possible, s'éteigne la lumière.
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